Le Chef de l’Etat affiche une certaine détermination dans la lutte contre la corruption en multipliant ces derniers jours les demandes de poursuite d’anciens ministres devant la Haute cour de justice (Hcj). Mais face à la lenteur de la procédure engagée au Parlement en réponse à ces requêtes, il y a lieu de savoir si les députés joueront pleinement leur partition.
Les dossiers de demande de poursuite d’anciens ministres devant la Hcj n’ont toujours pas eu de suite favorable à l’Assemblée nationale. Alors que l’opinion nationale attend toujours d’être fixée sur le sort des personnalités dont les noms sont largement cités dans des affaires de corruption, la procédure devant permettre leur poursuite est frappée par une lourdeur déroutante. Il n’y a pas de célérité dans l’étude de ces dossiers. Et les députés risquent ainsi de ralentir l’ardeur affichée par le président Yayi Boni dans la bataille de la moralisation de la vie publique, de la lutte contre la corruption et de l’impunité qu’il a lancée. Un tout petit pas vient certes d’être fait dans le dossier Armand Zinzindohoué. La Commission des lois a émis un vote positif pour la poursuite de cet ancien ministre de l’Intérieur qui serait impliqué dans l’affaire Icc-Services, et ce, en attendant que la plénière se prononce conformément à l’article 137 de la Constitution. Mais la tâche reste grande pour l’Assemblée nationale. Il doit en effet permettre aux ministres Soulé Mana Lawani (l’affaire Cen-Sad), François Noudégbessi (affaire construction du nouveau siège du Parlement), Rogatien Biaou (affaire vente du domaine de l’Ambassade du Bénin à New-York) et Kamarou Fassassi (l’affaire des groupes électrogènes) de s’expliquer devant la justice. Plusieurs d’entre ces personnalités ayant d’ailleurs réalisé des memoranda sur ce qui leur est reproché, elles auront l’opportunité de se défendre face aux juges de la Haute cour de justice. Et pour qu’il en soit ainsi, les députés ont une lourde responsabilité à assumer. Ils doivent se départir de leurs affinités politiques ou autres liens pour amener la justice à faire toute la lumière sur ces ténébreuses affaires qui ont coûté plusieurs millions de franc Cfa à l’Etat et aux populations. Mieux, les députés ont la responsabilité de prendre les bonnes résolutions d’autant qu’il y a actuellement en détention provisoire plusieurs cadres suspectés d’être mêlés à certains dossiers dans lesquels sont cités des ministres. Une dizaine de personnes sont en effet détenues à la prison civile de Cotonou dans l’affaire Construction du nouveau siège du Parlement et méritent de s’expliquer devant la justice comme les membres du gouvernement impliqués dans des malversations. A tout le moins, les députés auront non seulement contribué à l’assainissement de la vie publique mais ils auront aussi montré que tous les citoyens sont égaux devant la loi.
La pression de la société civile…
Les organisations de la société civile sont de plus en plus moins bavardes sur certains sujets de préoccupation comme les dossiers sus cités. En tout cas, leur voix est moins audible. Et cela est inquiétant pour le processus de démocratisation en cours. Les malversations existent et ne rien entreprendre pour faire sanctionner leurs auteurs, sonnerait comme un acte de complicité qui encourage des "supers citoyens". Et vu les conséquences de ces affaires sur le fonctionnement de l’Etat, la société civile doit se montrer plus combattante face à la corruption. Elle pourra mettre à profit l’activisme qu’on lui connaît pour faire pression sur les députés apparemment un peu moins engagés. Tout comme le confient plusieurs analystes, elle œuvrerait beaucoup pour le retour de la confiance des populations dans les institutions républicaines si elle s’impliquait davantage dans la bataille.