Sur initiative du chef de l’Etat, Yayi Boni, l’Inspection générale d’Etat a été créée en 2006. Il a décidé, sans motivation convaincante, de la dissoudre en juin dernier. Environ trois semaines après, le président de la République a décidé de créer le Bureau de l’auditeur général (Bag). Cette mutation aux intentions inavouées n’est, ni plus ni moins, qu’une fantaisie au sommet de l’Etat.
Bonnet blanc ou blanc bonnet, le résultat est le même. Que l’Inspection générale d’Etat (Ige) se transforme, 9 ans après, en Bureau de l’auditeur général (Bag), les attributions sont les mêmes. Seulela personnalité juridique change, au regard de l’exposé des motifs contenus dans un communiqué du Conseil des ministres. En effet, par décret n°2006-627 du 04 décembre 2006, portant réorganisation des organes de contrôle et d’inspection de l’administration publique en République du Bénin, il a été créé, entre autres, l’Ige. Elle a pour objectifs, d’informer le président de la République d’une part, sur les entraves à l’application des mesures visant la bonne gouvernance, la saine gestion desfinances publiques. Et, d’autre part, de faire des suggestions sur les dispositions à prendre pour lutter contre la corruption et les infractions à caractère économique etfinancier. Dans cette logique, il fallait donner à l’organe les moyens conséquents et l’autonomie nécessaire à l’accomplissement des objectifs fixés. L’opinion publique a été surprise de la dissolution de l’Inspection générale de l’Etat à la mi-juin 2015, après 9 ans de vie. Le motif de la dissolution, selon les propos du président Yayi Boni, est d’introduire, dans le fonctionnement de l’organe qui est en charge d’inspecter, des réformes visant à transformer cet organe de lutte contre la corruption en une structure indépendante, autonome, dotée d’une personnalité juridique. Et voici, en remplacement de l’Ige, le Bag. LeBureau de l’auditeur général, porté sur les fonts baptismaux, est« doté d’une autonomie financière et d’une indépendance, pour une véritable lutte contre la mauvaise gouvernance et la corruption. » En termes de réforme, c’en n’est vraiment pas une. Car, au plan juridique, l’Ige a pour fondement un décret. Au lieu de le dissoudre et de procéder à la création d’une nouvelle structure, aux mêmes objectifs, il était plutôt préférable de prendre un décret modifiant le statut de l’Ige en lui accordant l’autonomie de gestion et, peut-être, le pouvoir de coercition. Par le passé, le président Yayi Boni a créé en 2006, par décret, l’Organe présidentiel de médiation (Opm). Mais, compte tenu des étendues de pouvoirs conférés à cet organe, des citoyens avaient saisi la Cour Constitutionnelle qui a déclaré le décret portant création de l’Opm contraire à la Constitution. Cet organe, au regard de ses pouvoirs, devrait trouver son fondement juridique au terme d’une loi et non d’un décret. Ce qui fut fait en donnant naissance au Médiateur de la République. A la lumière de ce qui précède, il a plu au président de la République de faire de la fantaisie ou de la pagaille. Car, l’Ige et le Bag ont même statut juridique. Une modification portant sur sa dépendance de la présidence suffisait pour éviter une dissolution qui donne lieu à toutes sortes de commentaires. Que deviendront les rapports des audits effectués pendant 9 ans par l’Ige ? Que fera concrètement le Bag en 9 mois ?
Jean-Claude Kouagou