L’introduction des analphabètes adultes à la science dans leurs langues maternelles est tout à fait indispensable pour le développement d’un pays. C’est pour cette raison qu’une école vient d’être créée à Klouékanmè où l’on enseigne la langue Adja. Cette école qui est une initiative du feu Pascal Fatondji a été relayée par le professeur Philippe Noudjènoumè pour concrétiser son rêve. Pour lui, toutes les langues maternelles sont capables de faire la science.
Présentez-vous à nos lecteurs ?
Je m’appelle Philippe Noudjènoumè enseignant à l’Uac à la retraite et président du parti communiste du Bénin.
Vous venez de créer une école où les élèves apprennent les langues nationales. Quelles sont les raisons qui vous ont poussé à prendre une telle initiative ?
L’initiative est de feu Pascal Fatondji. C’est lui qui a initié l’Institut international de recherche et de formation (Iniref) et qui est comme un label pour une recherche et une formation fondées sur l’unicité du genre homo en un seule espèce animale sociale, la richesse et l’équivalence de toutes les langues naturelles et l’épistémologie sans cesse rationalisée avec l’identification, le traitement, la représentation et le stockage de l’information et du signal.
Cela veut dire quoi concrè-tement ?
Cela veut dire que toutes les langues maternelles sont capables de faire la science. Il n’y a pas de langue supérieure en science. Au plus haut niveau que cela soit le français l’anglais l’allemand, le yoruba, le wasangari, fon ; aïzo, adja sont au même niveau. Et depuis lors l’Unesco a compris que toutes les langues peuvent faire l’objet de la science. Si on prend les peuples de tout le monde entier, ils s’instruisent dans leurs langues. Les Chinois, les Français et autres. C’est ce que notre cher et regretté Pascal Fatondji a compris en initiant l’instruction en langue maternelle. Il faut donc concrétiser cette théorie. La théorie selon laquelle les hommes peuvent s’instruire entièrement dans leurs langues. Tous les peuples hormis l’Afrique enseignent la science dans leur langue. C’est pourquoi moi j’ai décidé de poursuivre l’initiative de feu Pascal Fatondji en créant cette école.
Comment vous êtes parvenu à mettre en place une telle école ? Est-ce que vous avez le financement de la part de l’Etat béninois ?
La création de cette école « AJaJu j’Ete » qui signifie renaissance du peuple Adja n’a pas été facile. Il a fallu le concours de mes camarades pour que cela soit une réalité. Nous n’avons pas reçu le financement de l’Etat béninois.
Lorsque ces genres d’école seront pris en compte par l’Etat, on saura que cela n’est pas le fait du hasard. On doit faire des progrès énormes plus tard. Nous ne sommes pas contre les langues étrangères. Mais pour nous, l’instruction des langues maternelles sont importantes pour le développement d’un pays.
Les enseignants qui dispensent les cours dans cette école sont des instituteurs des écoles publiques ou bien ils sont formés pour enseigner les langues maternelles ?
Le premier est un alphababétisé en langue Adja. C’est quelqu’un qui a fait la vacation au primaire. Le second a fait la formation pédagogique. Il a aussi la maîtrise de sa langue maternelle.
Nous constatons que la langue Adja est la seule langue enseignée dans cette école. Vous pouvez-nous faire part des raisons ?
On ne peut pas enseigner la langue Adja à Abomey par exemple. Si on amène cette école à Bohicon ce sera en Fongbé. L’école de Klouékanmey doit enseigner systématiquement la langue Adja. Si on enseigne le fon, les enfants ne vont rien comprendre. Parce que la langue Adja est leur langue maternelle. C’est pourquoi nous avons insisté sur l’enseignement de la langue Adja. Nos enfants lisent mieux que ceux qui sont à l’école française. Ils lisent même le français. On introduira ces enfants à partir de la quatrième année en français et ils iront au Cep comme les autres.
Votre mot de fin à l’endroit de vos apprenants et ceux qui désirent inscrire leurs enfants dans votre école.
Je demande à ceux qui croient à l’avenir de venir aider cette école. Nous ne sommes pas contre les langues étrangères. Que ceux qui voient déjà un aspect politique s’approchent de nous pour qu’on puisse échanger. Ils n’ont pas besoin d’influencer les parents d’élèves. Le Bénin, c’est pour nous et nos langues maternelles doivent être enseignées aussi.
Propos recueillis par Boniface Kabla