Chaque année, des millions d’adolescentes sont victimes de grossesses précoces. Une situation qui s’observe beaucoup plus chez les populations pauvres, peu instruites ou rurales. Les Centres de promotion sociale (CPS) contribuent à la réduction de ce phénomène notamment à Glazoué où il est récurrent. Aissatou Saka Chabi Goro, chef du Centre de promotion sociale de la commune, fait ici le point des actions de son centre en matière de grossesses précoces chez les adolescentes.
La Nation : Quelles sont les attributions du Centre de promotion sociale de Glazoué ?
Le Centres de promotion sociale (CPS) de Glazoué est une structure déconcentrée de l’Etat qui travaille sous la dépendance du ministère en charge de la Famille. C’est le bras opérationnel de ce ministère dans la commune. Nous mettons donc en œuvre toutes les politiques dudit ministère. Nous nous occupons précisément de toutes les cibles du ministère et ces cibles sont les personnes du 3è âge, les personnes handicapées, les enfants vulnérables, et nous luttons contre les violences faites aux femmes et aux filles.
Comment le CPS vient-il en aide aux filles victimes de grossesses précoces ?
Quand les filles viennent au centre, nous les conseillons et les orientons et parfois, nous les aidons financièrement si les fonds sont disponibles afin qu’elles puissent faire les consultations prénatales. L’appui financier provient de l’auteur de la grossesse le plus souvent. Nos actions dans le centre sont préventives. Nous faisons des séances de sensibilisation dans les écoles, mais ce n’est pas suffisant. Il faudra changer les mentalités.
Et quelles sont vos actions dans le cadre de la prise en charge sociale des grossesses précoces à Glazoué?
J’ai pris service dans ce centre le 20 octobre 2014 et depuis ma prise de service, je n’ai fait que tisser ma nouvelle corde au bout de l’ancienne, étant donné que plusieurs personnes sont restées à la tête de cette structure avant moi.
Les cas de grossesses précoces sont inscrits parmi les violences faites aux femmes et aux filles. Pour gérer ces cas, nous disposons d’un service pour s’en charger spécialement. Il s’agit du service d’écoute et de conseil qui dispose d’un agent formé pour prodiguer des conseils aux victimes. Etant filles, elles ne sont pas encore en âge de rejoindre un homme. La majorité d’entre elles n’a pas encore toute la compétence qu’il faut pour garder un foyer. Nos actions concourent à les amener à traverser la situation qu’elles vivent afin qu’elles n’avortent pas, l’avortement étant interdit. Donc nous menons des actions pour les aider à traverser la période de la grossesse et à assumer la maternité malgré leur âge de minorité. Et lorsque le nouveau-né atteint un niveau où on peut le laisser à la maison, la maman reprend les classes, ou son apprentissage afin de s’assurer un avenir. Et c’est d’ailleurs la volonté des parents quand ils viennent vers nous.
Qu’en est-il des auteurs de ces grossesses précoces ?
Les cas de grossesses précoces viennent régulièrement et la couche la plus touchée est celle des élèves. Quand ces cas se présentent à nous, ce sont les parents déçus, qui viennent porter plainte. Les enfants étant adolescentes, ils ne mesurent pas la conséquence de leur acte. Donc nous cherchons ensemble à connaître l’identité de l’auteur de la grossesse et nous lui envoyons une invitation. Lorsque l’identité de l’auteur est déclinée, ce dernier répond à notre invitation, parfois seul, ou accompagné de ses parents, s’il est mineur. Ensuite, nous lui posons des questions pour savoir s’il reconnaît ce dont on l’accuse. Il arrive que l’intéressé accepte être l’auteur de la grossesse, mais parfois il nie et c’est suite à plusieurs tentatives et même avec l’aide des forces de sécurité qu’il finit par accepter, et nous l’amenons dès lors à faire face aux responsabilités, en se faisant aider par ses parents s’il est mineur aussi.
Comment expliquez-vous le fait que la majorité des victimes de grossesses précoces soit des filles scolarisées ?
Nous sommes dans un milieu rural, et la mentalité diffère de celle du milieu urbain. Dans les milieux ruraux, avoir un enfant est une richesse. Il est un héritier, un remplaçant après la mort. Ajouté à cela, il y a l’inexistence de dialogue entre parents et enfants et, la pauvreté qui perdure y contribue. L’autre facteur c’est le suivisme. Parce qu’elle a vu l’autre fille faire un enfant, sa copine ou sa camarade mineure voudra faire comme elle. C’est le raisonnement des populations en milieu rural. C’est donc le milieu qui est favorable à cela.
Est-ce qu’il arrive que des plaintes aboutissent à l’emprisonnement de l’auteur ?
Des cas peuvent aboutir à l’emprisonnement de l’auteur. Mais ce sont des cas rares. Si malgré les efforts qui sont menés pour le racheter, il pense que c’est trop lui demander que de le mettre devant ses responsabilités, alors il subit la rigueur de la loi. Car, il existe une loi qui punit ces délits.
Quelles sont les difficultés que vous rencontrez dans l’exercice de cette tâche ?
L’une des difficultés sévères est le manque de moyens financiers. Nous avons un problème de personnels. Les ressources humaines ne suffisent pas du tout. Aussi le matériel roulant et technique fait-il défaut.
Avez-vous des doléances à formuler pour une amélioration des conditions de travail ?
Je demande à ce que les partenaires nous viennent en appui en ressources financières, matérielles et humaines. Que l’Etat central fasse des recrutements pour qu’il y ait plus de personnels. Un centre de promotion ne peut pas être géré par deux agents.
Maryse ASSOGBADJO