Le Chef de l’Etat a sacrifié à la tradition en s’adressant à ses compatriotes le vendredi 31 juillet 2015, veille de la célébration du 55è anniversaire de l’indépendance du Bénin. Dans son message, Boni Yayi a loué la bonne vitalité de la démocratie béninoise. Il ne s’est pas empêché de citer les hommages de certains présidents occidentaux au Bénin. Ces hommages, Yayi devrait-il se les approprier aussi ?
C’est bien beau de s’approprier les lauriers venus des présidents français et américain à la démocratie béninoise. En visite dernièrement au Bénin, François Hollande a salué la bonne vitalité de la démocratie béninoise. «J’ai décidé de venir au Bénin parce que vous êtes aussi une référence sur le continent, pour le rythme de la démocratie, la régularité dans la tenue des élections. Si je suis ici, c’est aussi pour montrer qu’il y a des exemples à donner», a souligné le président français. Quelques jours, devant l’Assemblée de l’Union africaine, Barack Obama a cité le Bénin parmi les pays dans lesquels la démocratie favorise l’alternance grâce au respect des dispositions de la constitution nationale. Pour le Chef de l’Etat béninois, c’est un honneur. Autant en profiter lorsqu’aucune autre alternative n’est plus possible : «Notre pays fait l’effort de figurer parmi ceux dont la pratique démocratique est citée en exemple sur le continent africain. A cet effet, il me plaît de souligner, malgré les difficultés, l’importance de l’organisation régulière d’élections libres, transparentes et crédibles et l’acceptation de l’alternance par tous les acteurs politiques. C’est pourquoi, en dépit de quelques difficultés, je me réjouis du succès des scrutins de cette année 2015 qui ont conduit au renouvellement des Députés à l’Assemblée nationale et des élus des conseils municipaux, communaux et locaux. Ces échéances répondent aux aspirations légitimes de notre Peuple. Elles renforcent aussi la confiance de nos partenaires en nos institutions. Je n’en veux pour preuve que les appréciations de hauts responsables de Puissances démocratiques comme le Président François Hollande lors de sa récente et historique visite dans notre pays et le Président Barack Obama dans le discours qu’il a prononcé, il y a quelques jours au siège de l’Union Africaine à Addis-Abeba. Je renouvelle ici mon total engagement et celui de mon Gouvernement pour la tenue à bonne date et la réussite de la prochaine élection présidentielle dont le premier tour est prévu pour le dimanche 28 février 2016. J’invite toutes les institutions et structures concernées à jouer chacune sa partition pour assurer à ce scrutin le succès que notre Peuple en attend. (…) Les consultations électorales sont souvent l’occasion de compétitions passionnées par les animateurs de la classe politique; cela traduit la vitalité de notre démocratie. Mais nous devons constamment garder à l’esprit que la Nation béninoise, pour laquelle nos aïeux se sont sacrifiés, est une et indivisible et que rien de beau, rien de grand ne se réalise dans la division. Le dialogue demeure la condition nécessaire et indispensable à la construction du Bénin prospère dont nous rêvons tous. Il est un facteur majeur de préservation de notre identité légendaire de pays de paix. Du reste, ce qui nous rassemble est plus fort que ce qui nous divise parce que rien ne nous oppose en réalité…», a souligné Boni Yayi dans son message du 31 juillet dernier.
Seulement, on se demande toujours ce qui serait advenu si le projet de révision de la Constitution avait prospéré à l’Assemblée nationale ! Cela devrait-il permettre à Yayi de demeurer ou non au pouvoir en 2016 ? Officiellement, le pouvoir en place se défend d’une révision opportuniste de la constitution. En face, les adversaires politiques soutiennent le contraire. Aujourd’hui, ce débat semble être clos. L’opposition ayant pris le pouvoir au parlement. Cependant, Yayi a-t-il définitivement renoncé à toucher la loi fondamentale ? Veut-il effectivement réviser la constitution pour prolonger son séjour à la Marina ? De quelle marge de manœuvre dispose-t-il encore si c’était ses intentions. Ce qui est sûr, ce débat a fortement ébranlé l’unité nationale. La démocratie béninoise a failli prendre un sérieux coup. Mais des luttes contre de supposées velléités révisionnistes du pouvoir maintiennent encore la vitalité de la démocratie béninoise. Apparemment, la révision de la constitution, opportuniste ou pas, ne devrait plus être du temps de Yayi. Au grand dam ou pas de ce dernier.
Jean-Marie Sèdolo