Le vendredi dernier, sur la chaine de télévision publique (ORTB), les téléspectateurs ont eu droit à une nouvelle sortie médiatique ministérielle au sujet de la révision de la Constitution. Il s’agit cette fois –ci du ministre des transports, Aké Natondé et du ministre d’Etat chargé de l’enseignement supérieur, François Abiola (Photo).
Le Gouvernement maintient le mercure à son niveau. Il ne descendra pas, mais il doit demeurer et continuer à monter. A la suite de la déclaration du Clergé catholique, d’un groupe d’imams- dissident de la position de l’union islamique du Bénin-, du Président-Maire Nicéphore Dieudonné Soglo…, le Gouvernement est revenu vendredi dernier à la charge. Le projet de révision de la Constitution est opportun. Il est loin d’être opportuniste. Le chef de l’Etat est de bonne foi, peut-on retenir, en résumé, au terme de cet entretien sur la chaine de télévision publique. Dans un langage qui frôle l’arrogance, truffé d’invectives, les deux ministres Aké Natondé et François Abiola ont en effet, laissé les Béninois, ceux qui s’attendaient peut-être à du neuf, sur leur soif. La quintessence du discours révisionniste a été maintenue. Le Gouvernement réaffirme malgré tout, ses intentions révisionnistes.
Pour le ministre d’Etat, François Abiola, la révision « Ce n’est pas pour maintenir quelqu’un au pouvoir ». Le chef de l’Etat « lui-même n’en veut même pas ».
Il rappelle les innovations relatives à l’imprescriptibilité des crimes économiques, la constitutionnalisation de la Commission électorale nationale autonome (CENA) et la création d’une Cour des comptes. Sur cette dernière innovation, il fait remarquer que le Bénin a perdu des financements et que certains partenaires seraient repartis chez eux, tout simplement pour n’avoir pas vu de Cour des comptes au Bénin. Il demande ensuite que ceux qui sont contre ces innovations le disent clairement, et que ceux sont pour mais en contexte la procédure, écrivent à la Cour Constitutionnelle pour se faire entendre. En outre, il a rappelé les soutiens déjà obtenus pas le projet, dont notamment celui des soixante maires de la mouvance présidentielle auquel il appartient. Sur la question du consensus, il affirme que le Gouvernement a joué sa partition et qu’une fois que le projet est envoyé à l’Assemblée nationale, c’est à cette dernière de faire ce qui reste. Et aux interrogations relatives à l’authenticité du projet introduit à l’Assemblée nationale eu égard aux travaux des deux commissions ayant siégé, il donne l’exemple de la commission Balladur en France, pour déclarer que le chef de l’Etat n’est pas obligé de respecter celle-ci.
Pour son collègue des transports, Aké Natondé, la polémique actuelle autour de la révision de la Constitution est liée au KO de 2011. Les opposants au projet cherchent simplement un biais pour salir l’image du Président de la République. Leur objectif : empêcher que tout prétendant éventuel à sa succession et sur qui il portera son choix, ne puisse valablement jouir de son ‘’héritage’’. C’est pourquoi donc, il invite ceux qui sont entrain de marcher contre le projet à ramener la balle à terre, à « Ramener le débat au bon niveau ». Il lance un appel à tous ceux qui écrivent contre le Gouvernement sur le net, pour qu’ils arrêtent cela. Car dit-il, les institutions internationales en tiennent compte pour noter le Bénin. Et quand la notation est mauvaise, les investisseurs et autres partenaires potentiels fuient le pays. A ses dires, si la Constitution n’est pas révisée sous le président Boni Yayi, elle le sera un jour. Dans la foulée, il sort ces mots : « il faut que nos adversaires inventent toujours des choses… » « Ceux qui marchent dans la rue, ils ont géré ce pays… » Et « Vous pensez que nos députés sont des godillots » pour répondre avec cette dernière boutade, à ceux qui pensent que les parlementaires béninois suivent la volonté du chef de l’Etat sans discuter.
Du monologue au bi monologue
Comme si le one man show ministériel était devenu insuffisant pour prouver la bonne foi du Président de la République au sujet de son projet de révision de la Constitution, la stratégie de communication des ministres a connu quelques évolutions. Les ‘’monologues’’ faits récemment par Arifari Bako, ministre des affaires étrangères et Marcel de-Souza, ministre du développement, n’ont apparemment pas eu l’écho recherché.
Ake Natonde et François Abiola sont les premiers choisis pour le changement de la donne. La chaine de télévision publique a servi de laboratoire, et de ce fait, confirme davantage toutes les critiques faites à son encontre. Une caisse de résonnance du pouvoir Yayi, au point où, sur un sujet comme celui de la révision de la Constitution, elle n’a pas encore réussi a organisé un seul débat contradictoire. Et du ‘’monologue’’, que le ministre d’Etat a qualifié malencontreusement de « débat », elle passe au bi monologue. Peut-être d’ici là, l’éventualité de voir tout le Gouvernement monologuer sur un même plateau de télévision pour prouver que la révision de la Constitution n’est pas opportuniste, n’est pas à écarter. Le meilleur reste donc à venir, et le Gouvernement certainement, n’a pas encore dévoilé toute sa stratégie.