Si à un an avant la fin du second et dernier quinquennat de Mathieu Kérékou, les lèvres de la grande majorité des Béninois chantaient presque à l’unisson un même nom de prétendant au trône, 10 ans après, ce n’est point le cas. A 7 mois du premier tour de la présidentielle, la question de la succession au président Boni Yayi reste une nébuleuse. De sorte que les hommes d’affaires ont fini par ravir la vedette aux professionnels de la chose politique. Pis, la présidentielle de 2016 ne sera que la bataille entre deux hommes que l’opinion peut considérer comme les deux plus grands opérateurs économiques nationaux que le ciel ait donné au Bénin : Patrice Talon et Sébastien Ajavon.
Bien malin qui pourra trancher la question de l’occupation du douillet fauteuil de la Marina à partir d’avril 2016. Depuis plusieurs lunes maintenant, l’échiquier politique béninois, malgré l’intelligence de ses acteurs n’a pu laisser transparaitre aussi nettement l’avance d’un des prétendants au trône sur ses autres challengers. Les commentaires allaient bon train sur l’hypothétique prochain Président de la République, même s’il était hasardeux de s’essayer à un nom. Puis, deux journalistes viennent à jouer aux prophètes des nouveaux temps : l’exilé politique Patrice Talon ambitionne de prendre la succession de son ancien allié devenu paria. Depuis cette annonce, nombre d’actes ont été posés dans ce sens. Le retour au bercail de Lionel Talon, puis de l’épouse de l’exilé. Et depuis hier, le compagnon d’infortune, Olivier Boko avec qui Patrice Talon a pris le chemin de l’exil a foulé le sol béninois hier lundi, sa terre natale après plus de deux ans d’exil.
Par ailleurs, on annonce également pour très bientôt la déclaration, depuis Paris, de l’indésirable au Bénin. Il n’y a donc plus de doute sur la candidature du magnat de l’or blanc.
Ajavon ne se laissera pas "enterré vivant'
Question : Le président Ajavon en politique, est-ce que c’est vrai ?
La réponse du président du Conseil national du Patronat du Bénin ne saurait laisser de place à des supputations. L’homme, sans faire de la langue de bois, indique qu’il n’est pas fait pour la politique, écartant du coup l’hypothèse de sa candidature en 2016. Comme en témoigne les mots que lui-même a utilisés : « Ce que j’ai fait toute ma vie, ce sont les affaires. Vous avez vu que je ne veux même pas aller faire de contrat avec l’Etat. Est-ce que quelqu’un qui est formaté comme ça peut aller faire de la politique ? La politique, quand on vous dit qu’ils sont à droite, il faut savoir que peut-être c’est au milieu qu’ils sont en train de passer ou à gauche…» Sébastien Ajavon a servi cette réponse à l’occasion d’une interview il y a plus d’un an soit au lendemain du pardon de Boni Yayi dans le dossier de tentative d’empoisonnement du chef de l’Etat. Il y a quelques semaines seulement, soit en juillet 2015, à l’occasion d’une séance avec des jeunes Béninois, le Pdg de Cjaf Comon reprécise sa pensée. Il a déclaré en effet que lui est un économique et qu’il ne sait pas faire de la politique.
Mais depuis quelques semaines maintenant, la question de la candidature de Patrice Talon est au cœur de tous les débats. Si au sein de l’opinion les avis sont bien partagés, il se laisse également chanter que nombre de leaders politiques ont béni la candidature de Patrice Talon. Plus que Boni Yayi qu’on peut avancer finir après avril 2016, celui que la candidature de Patrice Talon importunera le plus est Sébastien Ajavon, le patron des patrons. Et pour cause !
D’abord, difficile pour moi de dire lequel est plus puissant d’entre les deux. Mais néanmoins, il n’y a point de doute que sur le plan national, ils sont les deux plus grands. Ils se craignent, se redoutent, se respectent, ne s’aiment pas trop, donc s’affrontent.
Ensuite, l’épisode Programme de vérification des importations (Pvi-Ng) qui a conduit M. Talon hors des frontières béninoises. Nos sources indiquent qu’à cette époque de gloire de l’allié de Boni Yayi, le manque à gagner pour le Pdg de Cajaf-Comon pourrait avoisiner 5 milliards. Simplement parce que Atral à Allada était devenu un passage obligé pour la plupart des importateurs. Alors, question dans le camp Ajavon : si Patrice Talon, à la tête du Pvi, nous a créé un manque à gagner de 5 milliards en un an que deviendrons- nous après 5 ans de règne de ce dernier. ‘’ Autant investir des dizaines de milliards pour, à défaut de me faire élire empêcher Talon de gagner la Marina, que de continuer à rester bras croisés ; parce que j’avais déclaré ne pas être politique’’ pourrait se dire le président du patronat béninois.
Echec de la tentative de dissuasion
Les proches de Sébastien Ajavon ont commencé par attirer son attention sur les menaces qui planent sur ses affaires dans son isolement de la chose politique, notamment par rapport aux enjeux de 2016 où Patrice Talon menace de succéder à son bourreau. L’homme d’affaires se réveille de sa torpeur. Nos sources indiquent qu’il a mené quelques consultations au plan national. Puis, il se serait envolé pour l’Hexagone. Sa démarche aurait consisté, dans un tête-à-tête, à dissuader la principale victime de la refondation par rapport à ses ambitions pour la présidentielle en vue. Les mêmes sources indiquent que ce dernier est tellement avancé qu’il n’accepte pas lâcher du lest. Dans quelques jours en effet, la candidature de Patrice talon sera rendue publique….
« Si Patrice Talon que nous avions tous soutenu ici dans ses déboires avec le pouvoir qu’il a fabriqué s’obstine à maintenir sa candidature, Sébastien Ajavon n’aura plus le choix ; encore qu’il a plus d’atout que Patrice Talon. L’image de Sébastien Adjavon passe mieux dans l’opinion publique que celle de Patrice Talon. Il n’a pas de procès avec l’Etat et contrairement à Patrice Talon, sa candidature n’apparaît pas aux yeux des populations comme une revanche à la tension qui prévaut dans le pays… » a confié un des proches du patron des produits congelés au Bénin.
Comme on peut donc le percevoir, Sébastien Ajavon est candidat pour la présidentielle de 2016 si Patrice Talon se maintient dans la course. Ce serait juste une question de survie. Qui accepterait se laisser aller à l’abattoir ? Dans ces conditions, les politiques auront une fois de plus échoué. Puisque, si ces deux éléphants sont dans la course, le prochain président ne pourra venir que de leurs rangs.
A moins que ces deux boss acceptent de dialoguer et de s’entendre sur un minimum afin que l’un se désiste en faveur de l’autre. Patrice Taon et Sébastien Ajavon ensemble pour 2016, le prochain président pourrait provenir de leur camp.
Franck Kpochémè