Les associations de personnes vivant avec le Vih (Pvv) sont de plus en plus impliquées dans la lutte et dans la mise en œuvre du protocole de la Prévention de la Transmission Mère/Enfant du Vih (Ptme). Ce qui naturellement impacte positivement les actions sur le terrain. Dans cet entretien, Marius Akotchou, ancien président du Rebap+, dit comment le Fonds mondial qui finance à plus de 75% la Ptme au Bénin, pourrait jouer un rôle pour renforcer l’implication des bénéficiaires. Ici, il fait des suggestions pour l’efficacité des ces fonds au profit des bénéficiaires de la Ptme .
Du haut de vos expériences en tant qu’acteur et bénéficiaire dans le domaine du Vih/Sida au Bénin, que dites-vous de l’implication des associations de Pvv dans la lutte ?
Mieux que par la passé, les bénéficiaires ont des représentants au niveau des différentes instances de prise de décisions. Ceux-là vont et ont l’obligation d’aller représenter valablement les bénéficiaires et parler en leur nom. C’est mieux que par le passé où tout se faisait dans le dos des bénéficiaires et parfois contre eux. Ce qui fait que sur le terrain, il y a beaucoup de déboires, de dérapages. Aujourd’hui, on est représenté à tous les niveaux pour qu’on puisse donner nos opinions. Egalement dans le suivi, nous descendons parfois sur les sites pour voir ce qui ne va pas et informer qui de droit pour des décisions à prendre en vue d’une amélioration. Donc de façon générale, l’implication aujourd’hui est une réalité.
Pourtant, sur le terrain on ne vous sent plus comme il y a quelques années. Parce que tout va désormais bien ?
A des moments donnés, il y a certains représentants qui vont faire de la figuration dans les instances. Pour toute lutte, il faut être proactif ; il faut savoir où est-ce qu’on est, où on veut aller et comment y parvenir. Lorsqu’on n’a pas de la passion, de la conviction, de l’engagement pour un travail, on ne le fait pas. Ces derniers temps, en matière de pro-activisme des acteurs et bénéficiaires, il y a un rabais. Il faut avoir l’honnêteté de le dire. Je le dis avec amertume, c’est dommage. Mais au niveau de la coordination du réseau des bénéficiaires, nous sommes maintenant sur le point de vouloir remettre de l’ordre et faire appel à des personnes ressources pour qu’elles puissent nous accompagner pour qu’on redémarre à nouveau et pour être beaucoup plus visible et pratique au niveau des instances.
Pensez-vous que le Fonds mondial pourrait jouer un rôle pour renforcer votre implication ou pour permettre ce redémarrage dont vous parlez ?
C’est normal. Pas plus tard que la semaine dernière, il y avait deux consultants qui étaient sur le terrain dans le cadre de l’appui technique à l’Alliance nationale pour la santé (Ans). Le Fonds mondial est disponible à accompagner les structures d’acteurs et de bénéficiaires pour nous permettre d’avoir l’œil sur ce qui se passe dans la mise en œuvre des activités et avoir un système de veille pour que les utilisateurs de ces fonds ne fassent plus de gâchis.
Alors, vos suggestions pour l’efficacité des ces fonds.
Je me rappelle, il y a cinq, dix ans de cela, il y avait des problèmes récurrents de rupture qui étaient si pervers que cela suscitait des ‘’morts d’hommes’’. Avec l’implication du Fonds mondial qui est venu appuyer les Etats, beaucoup de choses sont en train d’être faites. Ce qui fait qu’on a une meilleure qualité au niveau surtout de la prise en charge. Certes, tout n’est pas encore rose tel qu’on aurait souhaité, mais je pense qu’il faut avoir le courage de reconnaitre et de dire qu’il y a eu des progrès. Lorsqu’on prend par exemple le problème des Arv, ces derniers temps, il y a eu des efforts au niveau du financement. Au niveau du Pnls, récipiendaire du Fonds mondial, il y a un mécanisme qui est mis en place pour la gestion spécifique des Arv. Actuellement sur le terrain, même s’il y a des crises, ce n’est pas dû à des ruptures de molécules de façon systématique. C’est plutôt dû à des problèmes de gestion sur les sites. Cependant, au niveau du suivi biologique, beaucoup de choses restent à revoir. Il faut qu’on puise revoir le plateau technique non seulement au niveau des appareils, mais aussi au niveau de ceux qui doivent les manipuler. Il faudrait qu’il y ait un suivi régulier. Je constate aussi que le Fonds mondial est devenu rigoureux dans la gestion des fonds. C’est heureux. On ne peut pas continuer à jeter l’argent par la fenêtre. Il faudrait que ça soit vraiment de l’argent géré à bon escient.
Mais, allez-vous éternellement fonder tout espoir sur le Fonds mondial ?
Le Fonds mondial ne sera pas là éternellement. Les questions de santé sont des questions de souveraineté comme la défense. L’Etat béninois a l’obligation de faire un effort pour être beaucoup plus dynamique. On ne doit plus penser que le Fonds mondial va toujours continuer à nous financer et dormir sur nos lauriers. Il faut qu’on cherche des financements alternatifs à l’interne et d’autres partenaires aussi qui vont nous accompagner. On a parlé entre temps de système de financement innovant. J’ai cru qu’avec ça, on allait loin, mais hélas ! Or, sous d’autres cieux ça se fait. Pourquoi ne pas imiter les autres ? Les financements aujourd’hui sont rares parce que beaucoup de projets sont venus à terme au même moment dans notre pays. Et nous bénéficiaires, on en souffre.
Victorin Fassinou