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Bénin: 8 femmes sur 10 fréquentent les “bokonons“
Publié le mardi 15 septembre 2015  |  Autre presse
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© aCotonou.com par TOP
La fête du vodoun à Grand Popo
Plusieurs adeptes du culte vodoun se sont retrouvés à Grand Popo pour célébrer la fête du vodoun




Une enquête initiée en octobre 2014 en milieu urbain par “NEWS AFRIKA“ révèle que ce sont les femmes béninoises de 23 à 45 ans qui majoritairement fréquentent les charlatans (“bokonons“ en langue locale fon) et sont de nos jours, devenues indépendantes des pratiques occultes, constituant par la force des choses, l’agrégat des visiteuses fidèles des couvents, des lieux de sacrifices et autres maisons de consultation.

Par Anicet TIDJO

Diverses raisons ont suscité la fréquentation du “bokonon ou bowato“ chez les différentes femmes rencontrées. Outre les initiées qui l’ont hérité en famille, beaucoup de femmes béninoises à la quête de la guérison, suite à une maladie, un envoutement ou autres besoins sociaux, s’adonnent aujourd’hui à des pratiques occultes. D’autres y sont allées pour la première fois par suivisme et/ou par curiosité, soit pour une consultation, mais y sont restées jusque-là.

Les milieux urbains à Porto-Novo et à Cotonou ont été appropriés pour cette enquête afin de cerner la tendance puisqu’il est estimé que les milieux ruraux sont déjà l’apanage de la tradition et qu’il y régnerait le fétichisme à outrance. Les occasions par lesquelles, chacune d’elles s’est approprié le “bo“ (diminutif fon de l’expression yaruba, “eboaarigun“ désignant couverture matérielle et morale puis restauration du succès, selon le Prof Apovo Jean-Marie, boologue) comme sauveur, sont diverses, mais sont presque les mêmes choses.

Le prof Apovo, créateur de la “boologie“ en 1995 au bord de la Seine à Paris indique d’ailleurs que “la croyance au Bo a continué à avoir une grande extension et à être conçue comme un ensemble de forces psychologiques qui dans son mode d’action présente un caractère magique. Il est le canal, le vecteur par lequel se communique la puissance d’un individu, d’une ethnie, d’un clan ou d’une race“.

La plupart des femmes rencontrées dans l’administration indiquent avoir fait le “Glo“, une sorte de “bo“ ou gris-gris qui désigne la protection. Des professionnelles de sexes et certaines marchandes, dans une atmosphère concurrentielle, avouent avoir fait le “Ylo“ (porte chance et attirance de la clientèle). D’autres grandes commerçantes rencontrées à “Dantokpa“ à Cotonou et “Ouando“ à Porto-Novo révèlent avoir fait en plus du “Glo“ et du “Ylo“, le “Flidjè“ (Retour à l’envoyeur) et le “bodida“ qui incarne l’attaque ou l’offensif.

La trentenaire Martine, une des grandes vendeuses de pagnes à “Dantopka“ fait savoir qu’elle a jusqu’à quatre “bokonons“ dans différentes régions du Bénin et que leurs pratiques diffèrent. “On essaie tout parce qu’on ne connait pas le degré maximum du “bo“ ; si on connaissait le plus puissant des “bokonons“, c’est à lui seul on se serait confiée, a-t-elle soutenu, confiant investir l’an, au moins 1 200 000 F CFA dans les sacrifices traditionnels et autres pratiques dérivées du “bo“.

À la rencontre d’un octogénaire, ancien cheminot à la retraite et aujourd’hui prêtre du “Fà“, a-t-on par ailleurs appris que les femmes font d’autre chose, mystérieuse comme le “Gbotémi“ pour obtenir leur suprématie sur l’homme afin de gouverner le foyer en lieu et place de l’époux et bien d’autres astuces pour se couvrir en cas d’infidélité.

À la question de savoir si ses clientes sont manipulées ou obligées à les fréquenter, le vieux rétorque négatif et précise qu’elles sont “naturellement insatiables“ et sont donc sur le chemin au quotidien. “Elles nous entretiennent matériellement que financièrement ; elles misent gros contrairement à ces quelques hommes qui nous visitent“, a ajouté le “bokonon“.

À l’en croire, il leur procure beaucoup de solutions et c’est la raison pour laquelle, il est connu d’elles. “Beaucoup sont venus chez moi par l’entremise de leur ami ; des mères amènent aussi leurs filles ; je n’ai pas besoin d’aller faire une publicité sur une télé ou radio“, a-t-il souligné.

Les deux femmes sur dix qui ne s’adonnent pas aux pratiques occultes au Bénin sont majoritairement celles de la tranche d’âge de 18 à 22 ans moins matures dont leurs attentions n’ont pas encore été attirées sur ce fait. Il y a aussi quelques femmes de la catégorie d’âge 23-45 ans qui n’ont jamais fréquenté un “bokonon“ simplement parce qu’elles n’ont pas eu l’occasion. “Je serai volontaire si la résolution d’un problème doit m’amener chez un féticheur“, déclare Ruth, une jeune dame employée dans un gsm de la place. Yolande, une institutrice fait savoir pour sa part que c’est Dieu qui pourvoit les solutions aux problèmes et soutient ne rien à avoir avec le fétichisme dans vie.

Toutes les femmes approchées reconnaissent en la pratique du “bo“, une efficacité et une promptitude contrairement aux pratiques religieuses dont celles du christianisme céleste font l’exception. Elles avouent porter leur croyance sur ça par la “volonté de Dieu, le père céleste“. Selon Paul Hazoumè dans “Pacte de sang au Dahomey“, le “gris-gris (bo) est un symbole que la foi rend efficace dans l’esprit des africains“. Pour le “boologue“ Apovo, le bo n’est rien sans la permission de Dieu et la foi en bo est paradoxalement la foi en Dieu“. La “bo“, fait social par excellence, gagne considérablement les cœurs en l’occurrence féminins au Bénin, un Etat laïque.

TAC
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