Toute la classe politique commence par s’interroger par rapport à ce que Boni Yayi veut pour la présidentielle de 2016. Qui veut-il choisir pour lui succéder ? Une interrogation légitime qui mérite réponse.
Dans l’entourage du chef de l’Etat, tout le monde sait que le vice-premier ministre, François Abiola, veut être candidat à la prochaine présidentielle. A tort ou à raison, on évoque aussi le nom du ministre d’Etat chargé de l’économie et des finances, Komi Koutché. Alors qu’il y a déjà des candidatures officiellement déclarées au sein de la mouvance présidentielle. On peut citer déjà Chabi Sika Karimou, Soumanou Toléba qui se sont déjà affichés. Tout cela montre que jusque-là, il n’y a pas une volonté manifeste affichée de Yayi de mettre la troupe ensemble pour dégager une personne. Chacun commence par y aller comme bon lui semble. Mais l’élément fondamental de cette hésitation, c’est l’échec du projet de révision de la Constitution. Apparemment, ce n’est pas cette tournure qui avait été envisagée. Finalement, comme un spectateur heureux, on a l’impression que Yayi regarde les siens s’agiter : je veux être candidat à ci, je veux être candidat à çà. Si bien qu’on a l’impression que tout çà ressemble à un grand désordre, une vraie cacophonie au sein de la famille politique de Yayi réunie dans l’alliance des Forces cauris pour un Bénin émergent (Fcbe). Mais en réalité, c’est que Yayi n’a pas encore trouvé la personne qui lui convient, celui-là capable d’être appelé son dauphin. Dans son entourage proche, on se demande qui promouvoir ? Certains parmi ses proches disent que l’élément principal de cette hésitation est qu’il ne veut pas que le pouvoir descente au sud. Comme l’avait fait son prédécesseur. Et voilà que là-bas, Yayi a du mal à trouver l’oiseau rare ! En temps normal, ils pourraient s’appuyer sur Sacca Lafia, Robert Gbian, Abdoulaye Bio Tchané…Ils ont la carapace de prendre la relève. Seulement, il n’est plus en odeur de sainteté avec ceux-là. Le sort de Barthélémy Kassa, semble-t-il, est déjà scellé par l’affaire du Ppea II. Difficile de s’appuyer sur un ancien ministre cité dans telle affaire. Une situation embarrassante et compliquée pour Yayi, ajouté à l’échec de sa gouvernance.
Si bien qu’aujourd’hui, cela permet aux anciens leaders politiques de revenir en force. Il s’agit de Me Adrien Houngbédji, Séfou Fagbohoun, Bruno Amoussou et Nicéphore Dieudonné Soglo. En 2016, c’est désormais clair que ceux-là auront forcément leur mot à dire. Il était dit que Yayi les a définitivement enterrés. Mais la réalité démontre le contraire. Les issues des dernières élections législatives, communales et locales, sont là pour en témoigner. Le premier, Me Adrien Houngbédji, est revenu plus que jamais en force. Il est devenu la 2è personnalité de l’Etat avec un Parti du renouveau démocratique (Prd) plus que jamais soudé. Puisque le Prd s’affiche comme le premier parti politique du pays avec, à lui seul et sans alliance, ses dix députés à l’Assemblée nationale. Le Prd s’est aussi imposé lors des communales en raflant la mise dans l’Ouémé et un peu ailleurs. Le deuxième, Séfou Fagbohoun, a montré lors des deux dernières élections que c’est l’Union fait la Nation à laquelle appartient son Madep qui a le Plateau, à part une partie de Sakété. L’UN, principalement le Madep, a eu le gros lot dans le Plateau. Par rapport à 2016, Fagbohoun aura incontestablement son mot à dire. C’est indéniable.
Cacophonie dans la mouvance
Quand on en vient à Nicéphore Dieudonné Soglo, c’est vrai qu’il n’est plus le maire de Cotonou. Mais lors des deux dernières élections, législatives et communales, son charisme et celui de son épouse ont donné le résultat qu’on connait. L’Alliance Rb-Rp a donné des députés et est sortie première au niveau des communales à Cotonou. La preuve, le fils a succédé au père à la mairie. Autrement, Soglo reste Soglo. Il en est de même pour Bruno Amoussou. Lui aussi, avec l’Union fait la nation, a raflé presque tout dans le Couffo. Ces anciens leaders, comme on le constate, montent en puissance. Et en politique, plus une force monte, plus l’autre à tendance à chuter. Aujourd’hui, les Forces cauris pour un Bénin émergent (Fcbe) chutent et cela va entraîner la montée en puissance des anciens leaders réunis au sein de l’opposition au régime en place. Yayi va dribbler tout le monde jusqu’à à la dernière minute, et les élections auront lieu sans qu’il ne se décide. Il constatera comme ses compatriotes le gagnant. Ayant compris cela, beaucoup des siens ont décidé de prendre leur destin en main. Conclusion : Yayi ne contrôle plus ses hommes. Dans le même temps, il peine à trouver parmi eux l’oiseau rare pour que se réalise l’«après nous, c’est nous». Un slogan vide au regard des événements actuels.
Jean-Marie Sèdolo