Deux articles du Code électoral abordent la question du dépôt des dossiers de candidatures. A la surprise générale, ces deux dispositions qui ne sont pas contradictoires, ne disent pas très exactement les mêmes choses quant aux délais de dépôt de candidatures. La Commission électorale nationale autonome a fait son choix et relance le débat sur la décision de la Cour constitutionnelle relative à l’âge requis pour être candidat.
Entre les 44 et 339 de la loi 2013-06 portant Code électoral en République du Bénin, la Commission électorale nationale autonome (Céna) a fait son choix. Celui-ci raccourcit le délai compris entre la date du dépôt des dossiers de candidatures et la date du démarrage de la campagne électorale. En optant pour l’article 339 du Code, le dépôt des dossiers intervient dans la nouvelle année avec la polémique née de la décision de la Cour constitutionnelle, relative à l’adage « année entamée, équivaut à année écoulée ». Ladite décision tend à permettre aux moins de 40 ans révolus à la date de dépôt de candidature, de se présenter à l’élection présidentielle. Par contre, avec l’usage de l’article 44, les candidats à l’élection présidentielle doivent constituer et déposer leurs dossiers le 29 décembre 2015. Le débat n’aurait pas eu lieu, si la décision Dcc 15-156 du 16 juillet 2015 de la Cour constitutionnelle relative à l’âge requis pour être candidat n’avait pas cours. En effet, l’article 44 du Code électoral dispose au premier alinéa que « la déclaration de candidature est déposée, quarante cinq (45) jours avant la date fixée pour le démarrage de la campagne électorale à la Commission électorale nationale autonome (Céna)… » Il relève du premier livre du Code électoral, et est relatif aux règles générales communes à toutes les élections. L’article 339 du même Code stipule : « sous réserve des dispositions de l’article 50 de la Constitution, les dépôts de candidature doivent intervenir quarante-cinq (45) jours au moins avant le premier tour du scrutin… » Il est du ressort du livre 3 du Code électoral qui aborde les règles particulières pour l’élection du président de la République. En conséquence, c’est le livre spécifique qui affine les règles pour l’élection du premier magistrat. A l’analyse des deux dispositions, on se rend compte que les délais de dépôt de dossiers, en tenant compte de la date du scrutin fixée au 28 février 2016, ne sont pas les mêmes. Lorsque l’article 44 du Code est appliqué, le dépôt de candidatures doit intervenir le 29 décembre 2015. Dans ce cas de figure, les effets que produit la décision Dcc15-156 du 16 juillet 2015 sont totalement occultés. Mais, quand on choisit de faire appliquer l’article 339, le dépôt de dossiers de candidatures survient dans la nouvelle année. Cette option autorise-t-elle l’acceptation de candidatures de titulaires âgés de moins de 40 ans révolus à la date du 12 janvier 2016. Seuls le professeur Théodore Holo et ses collègues membres de la Cour pourront répondre à cette question.
Une imprudence préjudiciable
L’alinéa premier de l’article 339 du Code électoral énonce que, « sous réserve des dispositions de l’article 50 de la Constitution, les dépôts de candidatures doivent intervenir quarante-cinq (45) jours au moins avant le premier tour du scrutin… » Il indique le plancher en-dessous duquel il n’est pas possible de formuler sa candidature. Mais, au regard des intentions multiples de candidatures déclarées, il est plutôt prudent pour la Commission électorale nationale autonome (Céna) d’envisager des marges de manœuvres importantes pour le traitement des dossiers. Dans ce cas de figure, elle aurait pu viser l’article 44 du Code électoral. Ainsi, les dossiers de candidatures seront reçus le 29 décembre 2015 et transmis le lendemain à la Cour constitutionnelle. A l’inverse, en exploitant l’opportunité qu’offre l’article 339 du Code sur le dépôt de candidatures, on perd 14 jours sur l’article 44 du Code électoral, qui se présente comme le plafond du délai de dépôt de candidatures, en tenant compte de la date de publication des candidats retenus, fixée au 25 janvier 2016. Dans le chronogramme actuel, la Céna n’a donné que 12 jours à la Cour constitutionnelle pour le traitement des dossiers alors qu’avec l’article 44, elle disposerait de 27 jours pour le faire. On peut craindre que la Haute juridiction soit confrontée à des problèmes de délais pour le traitement des dossiers, en raison du choix de l’article 339 opéré par la Céna. Par expérience, tout le monde sait que les candidats ne sont jamais pressés de constituer et de déposer leurs dossiers à l’entame de cette étape.Ils attendent toujours le dernier jour, et de préférence, entre 21 heures et minuit pour s’agglutiner au siège de la Céna. En conséquence, c’est le 12 janvier 2016, conformément au chronogramme initial de la Céna, que la très grande partie des candidatures sera enregistrée. Et la Cour ne disposera que de 12 jours pour traiter les dossiers.
Jean-Claude Kouagou