« Nous avons rencontré ce matin à notre demande le Président Mathurin Coffi Nago au nom du Groupe parlementaire Union fait la Nation pour échanger avec lui sur des préoccupations que nous avions. Vous n’êtes pas sans savoir que notre pays est un pays qui a opté pour un système démocratique multi-partisan dans lequel nous avons adopté une Constitution qui consacre des pouvoirs et des contre-pouvoirs.
Cela suppose que les institutions du pouvoir agissent et les institutions de contre-pouvoirs contrôlent ce que fait le pouvoir. Depuis quelques temps, nous avons noté que ces institutions de contre-pouvoir se sont regroupées dans une sorte de réunion des Présidents des institutions de la République. Cela ne nous gêne en rien que les institutions ou leurs Présidents se concertent. Mais cela a commencé par prendre une allure qui, à nos yeux, pourrait étouffer la démocratie, pourrait gommer le nécessaire contrôle entre les institutions.
A la dernière rencontre des présidents des institutions de la République, nous avons eu droit à un commentaire fait par le Président Théodore Holo qui viole fondamentalement l’obligation de réserve que doivent observer ces Présidents d’institutions de contre-pouvoir prévues par la Constitution du 11 décembre 1990. Au-delà de ce que ce commentaire viole l’obligation de réserve, il viole aussi la loi organique de la Cour Constitutionnelle. Les avis émis par le Président Holo en ce qui concerne le projet de loi transmis à l’Assemblée Nationale sur la révision de la Constitution ne sont pas de nature à rassurer les Béninois. Ce n’est pas de son devoir de dire que la disposition de ce projet de loi relativement à l’imprescriptibilité des crimes économiques est une avancée.
En effet, il est interdit au Président et aux membres de la Cour Constitutionnelle de donner des consultations, de donner des avis sur des questions qui doivent faire objet de discussion devant de la Haute Juridiction. Plus grave, le Président Holo a émis cet avis comme une position de l’ensemble des Présidents des institutions de la République. Cela veut dire que le Président de l’Assemblée Nationale estime aussi que c’est une avancée. Or le Président de l’Assemblée Nationale ne peut pas émettre un avis qui soit son avis personnel parce qu’il n’est pas là en tant que Mathurin Nago, il est là en tant que Président de l’Assemblée nationale. Ce qui a été dit par le Président Holo et soutenu tacitement par le Président Nago est perçu au niveau du Groupe parlementaire Union fait la Nation comme une violation de la Constitution. Et c’est ça que nous sommes allés dire au Président Nago de vive voix devant certains membres du Bureau de l’Assemblée Nationale. Nous avons donc suggéré au Président de l’Assemblée Nationale d’éviter à l’avenir de compromettre notre système démocratique en participant à des choses comme-çà.
Que cette réunion aille s’occuper des questions d’institutions ou des questions administratives, cela ne pose aucun problème. Mais qu’on en vienne à émettre des positions, qu’on en vienne par exemple à une situation où le Président de la Cour Constitutionnelle, après avoir jugé la Constitution, nous fasse l’apologie du régime en montrant que depuis 2006 sa situation personnelle s’est améliorée et que donc cela signifie qu’il y a une bonne redistribution des ressources dans le pays, je pense que c’était une barrière qu’il ne fallait pas franchir. Et c’est le fait que cette réunion se tienne qui donne lieu à ce genre de choses. Au total, nous sommes venus pour dire au Président de l’Assemblée Nationale de faire en sorte que les préceptes, les fondements de notre démocratie soient préservés et que progressivement, on ne glisse pas dans un monolithisme institutionnel », a clarifié le Président Eric Houndété.