Le Pouvoir en place, à travers son projet de révision opportuniste de la Constitution du 11 décembre 1990, ignore qu’il fait courir des risques inutiles au peuple béninois et à sa démocratie. Les conséquences économiques, sociales et politiques d’une telle dérive seront incalculables.
Lors du dernier meeting de la mouvance à Porto-Novo, à propos de la révision de la Constitution, une femme, à qui la parole a été donnée, déclara consciemment ou inconsciemment : « C’est Dieu qui donne le Pouvoir. Yayi Boni est à son deuxième mandat. Qu’il en déplaise à ses détracteurs, il fera encore le troisième mandat. Il restera au Pouvoir, le plus longtemps possible…. ». L’un des sbires du régime en place, Jean-Louis Azé est venu indiquer que les propos de la dame n’engagent pas la mouvance. Pour les spiritualistes, c’est Dieu qui a parlé à travers elle, en ce sens qu’elle a tout dit. Dans les faits, cette femme n’a fait que révéler à la face du monde ce que cache la tentative de révision de la Constitution du 11 décembre 1990.
Toutes les manœuvres politiciennes sont mises en œuvre pour tenter de faire avaler la pilule au peuple béninois. Mais, est-ce que ceux qui sont derrière ce projet sordide sont conscients des risques que court le Bénin en cas de révision de la Constitution dans les conditions actuelles ? Assoiffés du Pouvoir, ils refusent de voir la réalité en face. Tout d’abord, c’est l’image de la démocratie béninoise qui sera plus ternie. Pour l’histoire, au début des années 90, le Bénin a été le tout premier pays africain à s’engager sur la voie du pluralisme politique. Cette option politique fait aujourd’hui la fierté du peuple béninois en Afrique et dans le monde.
Plusieurs observateurs politiques estiment que la démocratie est la seule richesse du Bénin à l’heure actuelle. La preuve est que la communauté internationale investit dans ce pays parce qu’il y a un climat de paix et la stabilité politique. Aujourd’hui, ces valeurs politiques s’étouffent sous le régime du Président Yayi Boni . Les violations des libertés publiques, l’instrumentalisation des médias publics que privés, le culte de la personnalité et autres dérives contraires aux normes du pluralisme politique sont en vogue au Bénin. Et, la situation s’aggrave depuis le déclenchement du débat sur la révision à pas forcés de la révision de la Constitution.
Avenir sombre
Quel sera l’avenir de ce pays en cas de l’aboutissement de ce projet ? Le Bénin sera sans nul doute dans la risée de la communauté internationale, car de plus en plus, elle est hostile aux régimes dictatoriaux. Ainsi, le pays risque de perdre les aides aux Organisations de la Société civile et à l’Etat, accords de prêts, dons et soutiens de diverses manières de l’Occident. Même, le port de Cotonou en fera les frais.
Le secteur privé, déjà anémiée, va disparaître. Quand on sait que le budget national est soutenu à plus de 70% par les apports extérieurs, où le gouvernement trouvera les moyens pour faire face à ses charges régaliennes, c’est-à-dire tout au moins le paiement des salaires des fonctionnaires ? Nulle part. A travers une telle révision de la Constitution, c’est le retour lent mais sûr à la crise socioéconomique des années 80 où le peuple et les travailleurs ont vécu l’enfer sur terre. Que se passera-t-il devant des populations affamées ?
Réactions
Pendant la période révolutionnaire, les Béninois, dépassés par les événements, ont dû prendre les taureaux par les cornes. Ils ont résisté aux arrestations, aux intimidations et à toutes formes de pressions d’où qu’elles viennent. Le Général Mathieu Kérékou a très tôt compris et a choisi la voie pacifique qui a débouché sur la conférence de février 1990. Certains Chefs d’Etat africains qui n’ont pas été à son école, ont terminé mal devant la révolte des masses populaires.
D’ailleurs, l’histoire du monde contemporain a montré et continue de montrer que les dictateurs finissent toujours mal. Les cas des Présidents Tandja du Niger, de Moussa Touré du Mali, de Issé Abré du Cameroun, de Laurent Gbagbo de la Côte d’Ivoire, de Mouammar Kadhafi de la Libye, de Samuel Do du Liberia, de Sanni Abacha du Nigéria, du tout-puissant Moboutou Sésséko de l’ex-Zaïre et consorts sont illustratifs. C’est dire que les artisans de la révision de la Constitution du 11 décembre 1990 doivent tirer leçons de la mauvaise expérience de ces Chefs d’Etat africains qui avaient pris le peuple en otage pendant des années. Comme le dit l’adage : « Aucun pouvoir humain n’est éternel… ».