Docteur Ludovic GUEDJE est le Directeur de la Formation et des Appuis Techniques (DFAT) en service à l’Autorité de régulation des marchés publics (ARMP). Invité dans un entretien télévisé intitulé « Les minutes des marchés publics» sur Canal 3-Bénin, il a éclairé l’opinion publique sur les garanties qu’exige la loi au Bénin des soumissionnaires aux marchés publics.
Canal3- Bénin : Avant tout propos, dites-nous, quelles sont les garanties exigées au Bénin en matière de marchés publics ?
Docteur GUEDJE : La loi n°2009-02 du 07 août 2009 portant code des marchés publics et des délégations de service public en République du Bénin prévoit cinq types de garanties dont une garantie de droit commun (garantie contre les vices cachés, garantie décennale, etc.) et quatre garanties spécifiques:
- la garantie de l’offre ou de soumission ;
- la garantie de bonne exécution ;
- la garantie de restitution d’avance ;
- la retenue de garantie ou de parfait achèvement .
Quels problèmes posent, aujourd’hui, ces différents types de garanties ?
Comme vous le constatez, seule la garantie de l’offre ou de soumission intervient au cours de la passation des marchés publics.
Les autres garanties ne jouent que durant les phases de l’exécution, à la réception et après cette dernière phase.
Compte tenu du temps dont nous disposons, nous allons commencer par nous intéresser au problème de la gestion de la garantie de l’offre ou de soumission, aujourd’hui.
Tout d’abord, il faut noter que cette garantie est un cautionnement exigé d’une banque ou d’une institution financière agréée et dont l’autorité contractante est bénéficiaire.
Avant d’accorder cette garantie ou de se porter caution pour verser au bénéficiaire le montant prévu, le soumissionnaire doit verser à la banque soit la totalité du montant de la garantie ainsi que les frais afférents à ce service offert par la banque, soit le soumissionnaire s’endette auprès de cette banque, auquel cas, ce coût est majoré. Il en résulte donc un appauvrissement du soumissionnaire. Mais, ce dernier pourra compenser cet appauvrissement si entre temps, il gagnait le marché au terme de la procédure.
C’est pour cette raison que le législateur a limité la durée de cette garantie à quatre vingt-dix (90) jours et ce délai ne peut être prorogé que de quarante-cinq (45) jours au maximum en cas de nécessité.
De même, le législateur a prévu un mécanisme d’allègement de cette charge des soumissionnaires en imposant aux Autorités Contractantes l’obligation de notifier à tous les soumissionnaires l’attribution du marché (ceux ayant vu leurs offres rejetées comme celui dont l’offre a été retenue). Le but visé est d’anticiper la suspension de la durée de validité normale de cette garantie au profit des soumissionnaires dont les offres ont été rejetées.
Le non respect de cette exigence légale par les Autorités Contractantes causerait donc un dommage aux soumissionnaires visés.
En ce qui concerne le soumissionnaire dont l’offre a été retenue, il est tenu de maintenir cette garantie jusqu’à l’approbation du marché. Le législateur est intervenu également à ce niveau, en imposant un délai de quinze (15) jours au maximum à l’autorité compétente pour approuver le marché, de manière à maintenir toute la procédure dans un délai de quatre vingt-dix à cent trente-cinq (135) jours au plus lorsqu’il y a une prorogation en cas de nécessité.
Quelles sont les conséquences quand une autorité contractante gère mal les garanties ?
En dehors de l’atteinte à la performance et la transparence que cette mauvaise gestion des garanties porte au système de passation des marchés publics, on peut également relever :
- tout d’abord le préjudice ou dommage pécuniaire causé aux soumissionnaires et qui peut leur permettre de mettre en œuvre la responsabilité de l’Autorité Contractante donc de l’Etat ;
- ensuite, lorsque par la faute de l’Autorité Contractante, l’on se retrouve au-delà de la durée de validité de cette garantie de l’offre et de soumission, normalement, le soumissionnaire/attributaire n’est plus lié par ses propositions et offres alors que le marché est encore en cours de signature et d’approbation. Cette situation est la plus complexe dans la mesure où l’Autorité Contractante ne pourra raisonnablement poursuivre cette procédure sans courir le risque d’accorder un avenant éventuel au titulaire pour tenir compte des variations éventuelles des coûts, soit, c’est l’ouvrage ou l’équipement qui pourrait ne pas être conforme à ce qui était prévu. Dans tous les cas, l’Autorité Contractante se retrouvera en difficulté, ce qui n’est pas souhaitable.
Quelles précautions les autorités contractantes doivent prendre pour que la mauvaise gestion des garanties ne mette pas l’Etat et ses démembrements en difficulté dans une procédure de passation de marchés publics ?
En termes de précautions, nous recommandons vivement le respect des dispositions du code des marchés publics, surtout celles relatives à la notification de l’attribution et celles relatives à l’approbation dans les délais impartis.
Avez-vous quelque chose à ajouter pour finir cet entretien ?
Comme mot de fin, il est recommandé aux potentiels candidats et soumissionnaires de respecter les conditions de validité des différentes garanties, notamment celles de la garantie de l’offre ou de soumission. Lorsqu’au terme de la procédure, l’un d’entre eux devient attributaire, qu’il doit veiller à la validité de sa garantie de soumission jusqu’à l’approbation du marché, pour ne pas courir le risque de l’annulation de la procédure faute de garantie valide.
Quant aux Autorités Contractantes, il est important qu’elles respectent rigoureusement la réglementation en vigueur, notamment, les règles relatives à la notification de l’attribution des marchés conformément aux dispositions de l’article 85 alinéa 1er du Code des marchés publics, compte tenu de son importance dans la gestion des garanties.