Construit dans les années 80 grâce à la coopération sino-béninoise, le stade de l’Amitié de Kouhounou a été l’un des grands pôles sportifs de la sous-région. Ce haut lieu sportif a abrité plusieurs événements continentaux et même mondiaux. Aujourd’hui, la récession économique fait qu’il est plus consacré au commerce qu’au sport.
Une réalisation de 10 millions de dollars sur une trentaine d’hectares
Entièrement financé par la République populaire de Chine, le stade de l’Amitié a été inauguré en novembre 1982. Le coût final du projet est de dix millions de dollars. Le stade fait partie d’un complexe sportif qui s’étend sur presque trente et un hectares. L’enceinte où se déroulent les matches de football a une capacité de 35 000 places assises. Elle est utilisée pour les sorties des équipes nationales du Bénin et pour des rencontres du championnat national. Le palais des sports peut abriter les compétitions de handball, volley-ball, basketball et autres disciplines sportives mais aussi les grands spectacles et rencontres religieuses, politiques, sociales. Il y a aussi une grande piscine olympique qui a été réhabilitée il y a peu. Le stade possède une esplanade intérieure et une autre extérieure qui s’étendent jusqu’à la route qui traverse la ville de Cotonou. Il est à 10 minutes, à vol d’oiseau, de l’Aéroport international Cardinal Bernardin Gantin.
Près de quatre cents structures commerciales au Stade de l’Amitié
L’emplacement d’une structure commerciale dans l’enceinte ou aux alentours du stade est lié à des conditions bien précises. « Les responsables de l’infrastructure s’occupent de la vente des espaces et une fois acquis, ils sont à leur tour, revendus ou loués à des prix exorbitants qui peuvent varier entre 75.000F et 400.000 F le mois », révèle la responsable d’une boutique. Approché, un vendeur de portable clarifie davantage : « Moi, je suis en contrat avec le propriétaire de la boutique qui est derrière moi. Je lui paie une rançon à la fin du mois puisque j’occupe la devanture de sa boutique». Un grand patron de bar restaurant bien connu au stade martèle, l’air furieux : « En effet, parmi toutes les constructions faites tout autour du stade de l’amitié, ce ne sont que trois bâtiments qui appartiennent à l’Etat. Tout le reste appartient à des personnes et autorités, ou à certains qui sont en contrat avec l’office de gestion du stade. Ceci étant, les quatre mètres sont loués à 150.000F et les 8 mètres à 300.000F. Or, l’Etat ne perçoit que 60.000F sur un bâtiment. Aujourd’hui, où c’est devenu un centre commercial, ils nous ont imposé un taux qu’on est obligé d’accepter. A prendre ou à laisser. Nous l’avons pris pour faire prospérer les affaires au lieu de rester à la maison à ne rien faire. Plus aucune boutique n’appartient au stade, mais à diverses personnes qui paient, selon leur gré, leurs redevances à l’office de gestion. Toutes les structures ici présentes ont un contrat de bail de 20 ans avec le stade et ce n’est qu’au terme de cette période que les boutiques retourneront à l’Etat. Parfois les responsables des boutiques, bars et maquis attendent des mois ou même une pression venant de l’autorité du stade pour payer leurs dettes. On entend même souvent dire que les gens ne paient plus leurs dus », signale un tenancier de bar qui a requis l’anonymat. Mais, le gérant du maquis CHEZ ADE renchérit : « J’ai choisi m’installer au stade à cause de son espace favorable au stationnement des véhicules et aussi pour avoir plus de clientèle. L’octroi d’une place est conditionné à une demande envoyée précédemment à l’OGSB (Office de Gestion des Stades du Bénin). Une fois la demande acceptée, il s’établit un contrat de bail de 45.000F par mois entre l’OGSB et les clients. L’espace, une fois occupée et réfectionnée, est à son tour loué. Les frais de location peuvent varier d’un endroit à un autre. Mais le mien est à 150.000F, payable auprès des huissiers que les bailleurs engagent».
Le commerce prend actuellement le dessus
Faire le tour de l‘infrastructure permet de remarquer qu’il y a plus d’activités commerciales que sportives. Le commerce domine le sport dans le centre construit pour accueillir les activités sportives. Il y a près de quatre cents structures commerciales qui se composent, entre autres des buvettes, maquis, restaurants, super marchés, banques, etc… pendant que toute l’enceinte ne comporte pas plus d’une dizaine d’aires de jeux où se pratiquent diverses disciplines, dont le football, le basketball, le handball, le tennis, la natation, le volley-ball, etc… Tous les jours, il y règne une ambiance folle à l’image de la « Rue Princesse » à Abidjan en Côte d’Ivoire. Sur les espaces prévus pour la pratique du sport, ce sont les responsables commerciaux qui mènent des activités de vente. Tout le long de la ceinture du stade, on peut compter une quarantaine de buvette, bars et restaurants.
Le sport ne préoccupe plus les autorités de l’OGSB
« Les fédérations sportives ne paient pas leurs dettes ». C’est ce que ne cessent de chanter les responsables de l’OGSB. Pour palier ce déficit, le stade de l’Amitié accepte les contrats avec les tenanciers de bars, buvettes et restaurants. Pour se défendre, les responsables de cette infrastructure sportive expliquent qu’il faut payer l’électricité, l’eau et entretenir l’environnement. Les disciplines sportives n’organisent pas d’activités. Et quand elles le font, c’est souvent mal fait ou bien le public sportif ne s’y intéresse pas. Le sport roi ne cesse de rencontrer des problèmes, au jour le jour, au point où l’enceinte réservée au football est plus occupée par les oiseaux, les amoureux et les vacanciers. L’un des plus gros partenaires du stade de l’Amitié, aujourd’hui, est une confession religieuse. Selon les informations reçues, chaque année, les fidèles viennent soit du Bénin ou de toute l’Afrique pour leur séminaire. Le contrat est signé souvent un an à l’avance. Quand ils sont sur les lieux, ils interdisent toutes activités dans leurs environs immédiats et même les rencontres sportives.
Les autorités du Mjsl interpelées
Le plus dramatique est que l’état du stade est inquiétant. « Plus aucune compétition des sports de main ne peut avoir lieu à l’intérieur du Palais des sports puisque le plancher est déjà en train d’être rongé par les termites. Le stade de l’Amitié est une infrastructure vieille d’une trentaine d’années qui héberge aussi une usine de fabrication de glaces installée sous les gradins du terrain de football et qui peut exploser à la moindre étincelle ou au moindre court-circuit. Or, le stade n’est doté d’aucun système d’évacuation. Des arriérés de loyers sont payés avec des réductions de la part des tenanciers de bars. Ce qui renverse totalement la logique comptable et financière puis fausse les plans comptables. Tous ceux qui sont aux alentours du terrain sont sous un contrat de bail avec les responsables du stade. Dans le même temps où des loyers restent impayés depuis près de 6 ans, des contrats sont signés à des fins commerciales. Les aires de jeu sont louées pour différentes manifestations religieuses et festives. Les stands sortent de terre partout sur le domaine du Stade. Ce qui amène à s’interroger sur la destination des fonds que génèrent les baux. Le paradoxe est que la caisse du stade est impuissante puisque le personnel entre difficilement en possession de ses revenus mensuels. On se demande même si certains bars ou boutiques n’ont pas plus de revenus que le stade. Le stade ne détient presque pas de matériels roulants. Quel est alors le rôle des fédérations face aux maux dont souffre le plus grand stade du Bénin ? Pourquoi l’Inspection générale du ministère des sports reste indifférente à cette situation ?
Réalisés par Rastel DAN et Valdès d’ALMEIDA (Stag.)