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Affaire Dangnivo: Trois jours pour établir la vérité judiciaire ?
Publié le mardi 27 octobre 2015  |  La Nation
Prestation
© aCotonou.com par TOP
Prestation de serments de 14 nouveaux avocats
Jeudi 21 Novembre 2013, Palais de Justice, Cotonou : 14 nouveaux avocats prêtent serment dans le cadre de la rentrée solennelle du Barreau Béninois






La session spéciale de la cour d’assises de la Cour d’appel de Cotonou, qui s’ouvre ce jour mardi 27 octobre est censé s’achever le jeudi 29 octobre prochain. Soit trois jours pour juger le sieur Codjo Kossi Alofa et son compère Donatien Amoussou, poursuivis respectivement pour assassinat et complicité d’assassinat, crimes qu’ils auraient commis sur la personne de Pierre Urbain Dangnivo. Lequel, disparu depuis le 17 août 2010, est donné pour mort.

Va-t-on enfin savoir ce qu’il est réellement advenu de Pierre Urbain Dangnivo, cadre du ministère de l'Economie et des Finances ? Est-il vraiment mort comme indiqué par un rapport d’expertise légiste dont se prévaut le gouvernement? Est-il toujours en vie comme le laissent entendre certaines sources non officielles? Qu'est ce que Codjo Kossi Alofa et Donatien Amoussou en savent-ils de cette affaire ? Les débats, attendus au cours de la session spéciale de la cour d’assises de la Cour d'appel de Cotonou qui démarre aujourd’hui donneront-ils lieux à des déballages ? Des dénonciations ? Des révélations ?

Alerte

En effet, c’est le 17 août 2010 que survint la disparition du sieur Pierre Urbain Dangnivo. Parti du service ce jour-là, il n’est jusque-là pas rentré chez lui où l’attendaient et l’attendent peut-être encore les siens. Au bout de quelques jours et en raison de l’atmosphère surchauffée eu égard à la présidentielle de 2011 qui s’annonçait dans un climat de défiance entre pouvoir et opposition, cette disparition devient une affaire d’Etat. Les politiques (pouvoir et opposition) s’accusent à mots à peine voilés d’avoir fomenté la disparition du cadre du ministère des Finances, encarté au Parti social démocrate (PSD) et responsable local de l’Union fait la Nation. Supputations, insinuations vont bon train. L’homme réapparaîtra-t-il enfin? Cette affaire, qui empeste le ciel trouble de la présidentielle finira-t-elle par révéler ses secrets? L’Opposition exige du pouvoir de retrouver le citoyen Pierre Urbain Dangnivo. Dos au mur, le pouvoir sait qu’il est surveillé, soupçonné. Il s’emploie alors à retrouver l’intéressé.
Au cour du week-end du 25 au 26 septembre 2010, la rumeur affole tous les milieux, politiques surtout. Le corps sans vie du sieur Dangnivo aurait été au cœur de tractations diverses. Le lundi 27 septembre au matin, certains journaux annoncent que le corps de Dangnivo a été retrouvé enterré et allait être exhumé dans la journée. Dans l’après-midi, cette information va prendre de la consistance. La chaîne de télévision privée Canal 3 Bénin, diffuse en bande annonce que le corps a été localisé à Womey dans la commune d’Abomey-Calavi et allait être exhumé… Au ministère de la Justice, on annonce une conférence de presse du procureur de la République près le tribunal de première instance de Cotonou, juste après l’exhumation… Peu après 17h, c’est le branle-bas de combat. Le secteur identifié à Womey est bouclé. Le pays est en état d’alerte. La rumeur du matin annonçait-elle l’information du soir? En tout cas, un corps a bien été exhumé. Etait-ce celui de Pierre Urbain Dangnivo?

Contestations

Ce soir-là, la zone grouille de monde. Après l’exhumation, un avocat présent sur les lieux, indiquait que rien ne permettait de dire s’il s’agissait du corps de Pierre Urbain Dangnivo. Selon cet avocat, en effet, le corps était déjà en putréfaction, avec les os des jambes apparents. Selon lui toujours, même le frère du disparu, à la vue du corps, ne l’avait pas reconnu et avait plutôt laissé entendre que son frère était plus grand que le corps exhumé, de même qu’il était plus corpulent selon d’autres parents. Sa sœur, Baï Dangnivo Koty, était totalement défaite. «J’ai vu un corps d’homme mais rien ne me permet d’affirmer que c’est celui de mon frère», lâchait un autre proche de la famille. Un fonctionnaire du ministère de la Justice, ayant assisté à la séance, n’était pas plus avancé. En tout cas, rien, à vue d’œil, ne permettait de dire s’il s’agissait bien du corps de Pierre Urbain Dangnivo, attestaient plusieurs autres sources proches du dossier.
Quant au ministre de la Justice, Grégoire Akofodji, présent sur les lieux, il assurait que c’est depuis la veille, dimanche, que ses services ont été mis sur une «excellente piste» qu’ils ont suivie pour aboutir à ce charlatan (Codjo Kossi Alofa) qui fait maintenant office de suspect numéro un, qui serait la dernière personne à avoir parlé avec le disparu, et qui aurait avoué l’avoir tué, l'avoir prélevé certains de ses organes, l’avoir emballé dans un linceul blanc avant de l’enfouir dans le sol. On n’était donc pas plus avancé même si d’après le ministre Grégoire Akofodji, «le charlatan a formellement déclaré qu’il est le meurtrier de Dangnivo». Sans doute informé de cette évolution du dossier, le président de la République, Boni Yayi, en séjour dans le Nord du pays, est rentré à Cotonou. Il reçoit aussitôt l’ambassadeur de France au Bénin, Hervé Besancenot, à qui il formule une demande d’aide technique pour identifier le corps et déterminer les circonstances de la mort de l’intéressé! Un Conseil des ministres, tenu le 29 septembre, nuance les assurances du ministre de la Justice mais dénonce ceux qui exploitent les faits à des fins politiciennes.
Dès le 30 septembre, les avocats de la famille réagissent pour relever les incohérences dans l’attitude du gouvernement. La famille, elle, veut bien croire que son fils est toujours en vie. C’est par un communiqué du 1er octobre qu’elle le fait savoir.
Ce même 1er octobre 2010 toujours, toute la journée durant, la route Cotonou-Lokossa a été coupée en deux au niveau du marché de Sè, localité natale de Pierre Urbain Dangnivo. Les populations de la localité avaient choisi ce mode de revendication pour se faire entendre des autorités et réclamer le retour de leur fils.
Bien plus tard, soit le 5 mars 2011, pendant la campagne électorale pour la présidentielle, à Lokossa, on apprendra de la bouche du chef de l’Etat, candidat à sa succession, qu’un expert allemand commis est reparti chez lui avec un doigt coupé du corps de Womey. Un doigt qui aurait permis de corroborer la thèse officielle selon laquelle le corps de Womey est bien celui de Pierre Urbain Dangnivo. Mais une thèse qui ne satisfait ni la famille, ni les avocats engagés sur le dossier. Tous dénoncent la méthode du gouvernement.


Enfin la vérité ?

Si certains doutent toujours de la thèse officielle, tous espèrent, en tout cas, que la vérité sera finalement établie. Le suspect numéro un, d’après la thèse officielle, devrait bien avoir ses mobiles. Quels seraient-ils ? La recherche du gain, parce qu’on lui aurait promis une forte somme comme annoncé un moment ? Un cruel crime gratuit, commis sur la personne d’un client qui serait allé le consulter, comme cela a été aussi distillé. En clair un simple fait divers qui tourne au drame national ? Rien n’est moins sûr. Autant que le sieur Alofa ne semblait pas disposé à assumer les faits, lui qui s’est évadé de la prison de haute sécurité d’Akpro-Missérété le 03 février 2015 avant d’être retrouvé quelques semaines plus tard au Togo.
Voici donc venu le moment de situer l’opinion. Codjo Kossi Alofa collaborera-t-il à l’œuvre de justice pour la manifestation de la justice ? Cinq ans après les faits, la famille du disparu et l’opinion espèrent sans doute enfin que le voile soit levé sur ce qu’il s’est réellement passé ce 17 août 2010. Trois jours y suffiront-ils ? L’expérience et la dextérité des juges, autant que la bonne collaboration des accusés, devraient y aider. Vivement…

Wilfried Léandre HOUNGBEDJI
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