Mgr Pietro Parolin, nouveau bras droit du Pape, rappelle que cette tradition dans l’Église catholique ne relève pas d’un dogme.
Ce n’est pas la première fois qu’un homme d’Église évoque une évolution possible du célibat des prêtres. Mais l’interview donnée en ce sens dans le quotidien vénézuélien El Universal par Mgr Pietro Parolin, qui quitte sa fonction de nonce apostolique dans son pays pour devenir, le 15 octobre, Secrétaire d’État du Saint-Siège, donc numéro deux du pape François, fait sensation.
Il ne dit pourtant rien de révolutionnaire, et reste d’une grande prudence. Mais il reconnaît que le débat du célibat des prêtres pourrait être ouvert dans le cadre du nouveau pontificat. Comme il l’a été, du reste, dans l’enceinte du pré-conclave en mars dernier entre cardinaux, alors qu’ils traçaient la feuille de route du pape qu’ils allaient élire. Le manque de prêtres commence en effet à toucher les pays les plus catholiques comme l’Espagne et l’Italie, ce qui ramène sans cesse cette question sur le tapis.
Répondant aux questions du journaliste, le futur Secrétaire d’État, 58 ans - il va remplacer le cardinal Tarcisio Bertone, 78 ans, Italien comme lui - commence par préciser que « l’Église ne peut jamais changer au point de s’adapter complètement au monde ». Il insiste ensuite sur la notion de « continuité » parce que, observe-t-il, « on a parfois l’impression que le Pape va tout révolutionner et qu’il est en train de tout changer. » Or, avance-t-il, « l’Église a une constitution, une structure, un contenu lié à la foi, et personne ne peut changer cela ».
Quant à la question du célibat des prêtres, il confirme que « ce n’est pas un dogme et que cela peut être discuté car cela appartient à la tradition de l’Église ». Il rappelle que cette mesure a été appliquée progressivement dans l’Église « au cours du premier millénaire » et qu’elle a été « renforcée » lors du Concile de Trente (1545-1547). Il pense donc que le « travail de l’Église » qui a conduit à établir cette mesure « doit être pris en compte » et que « l’on ne peut pas simplement dire que cela appartient au passé ».
« Un grand défi pour le Pape »
Ceci étant posé, il reconnait que cette question est un « grand défi pour le Pape parce qu’il est en charge du ministère de l’unité de l’Église et que toutes ses décisions doivent être prises en pensant à l’unité de l’Église et non pour la diviser. Nous pouvons toutefois parler, réfléchir, approfondir ces sujets qui ne sont pas définitifs et nous pouvons penser à certaines modifications, mais toujours en prenant en considération l’unité, et la volonté de Dieu. Cela ne se fait pas en fonction de ce que je voudrais mais selon ce que Dieu veut pour son Église. »
Mgr Parolin ne s’étend pas sur ce qu’il entend par « certaines modifications » mais il conclut : « Dieu parle de multiples façons. Nous devons être attentifs à cette voix qui nous guide sur les questions et sur les solutions. Quand nous prenons une décision, nous devons tenir compte de ces critères tout en étant ouverts à l’esprit du temps. »
Le cardinal brésilien Claudio Hummes avait fait sensation en 2006 dans des circonstances comparables. Il venait d’être nommé à Rome par Benoît XVI, Préfet de la Congrégation pour le Clergé - compétente sur le statut des prêtres. Lors d’une interview en quittant le Brésil, il avait lancé la même idée d’une évolution sur le célibat des prêtres. Mais ce fut sans suite. Il corrigea d’ailleurs le tir presque aussitôt. Les temps changent pourtant car dès son élection, le pape François a publiquement manifesté à plusieurs reprises sa vieille amitié pour ce cardinal brésilien…
Il y a donc anguille sous roche. Jamais Mgr Parolin n’aurait pris un tel risque sans un feu vert au plus haut niveau. Mais, sur le fond, comme sur la forme, il ne fait que redire ce que tous les théologiens répètent : rien n’interdit à l’Église de revoir la question du célibat des prêtres, mais rien ne l’oblige non plus à changer cette « discipline ». Le débat est en tout cas publiquement relancé. Et au plus haut niveau.