Porteur de croissance, le secteur privé au Bénin vit plusieurs difficultés qu’entretient, malheureusement de par ses pratiques, l’Administration publique. Ces pratiques qui s’énumèrent ainsi qu’il suit, sont à l’antipode de la volonté affichée au plus haut niveau et contrastent avec la politique nationale de développement.
Le secteur privé est en proie à d’énormes difficultés actuellement ; difficultés qui résident dans les rapports qu’il entretient avec celui public. Or, les deux devraient travailler en synergie, à la promotion de l’économie nationale. Mais il n’en est pas ainsi depuis longtemps. En quoi se justifie notre prédicat ?
Voyons ! Tout d’abord, il faut aller aux conditions de création des entreprises privées.
Trop de conditions pour installer la petite entreprise
Les conditions à remplir par un privé pour créer une entreprise sont soumises aux tracasseries administratives d’où il faut obtenir tel ou tel autre papier. Outre les statuts, le registre de commerce et l’IFU, il faut compter avec les dessous de table pour faire décider tel agent à signer une pièce jointe. Le système pour faire aboutir un dossier attend toujours d’être huilé suffisamment. Le circuit labyrinthique est plus compliqué qu’aller vers Dieu. Sur le parcours attendent des ventripotents aux esprits singulièrement endollardés, de véritables vampires. La corruption aidant, le postulant en sort presque anémié financièrement, titubant sur des quilles. Ce qui frappe à première vue, c’est l’apparente disponibilité affichée par tous et partout : « nous, on va t’aider à vite t’installer ». Erreur ! si vous vous confiez à ces oiseaux enchanteurs.
Et lorsque vous parvenez à franchir votre corps défendant la barrière, la même Administration vous attend au carrefour des impôts et diverses taxes.
La grande pression fiscale
La première charge à laquelle on vous astreint est le payement après trois mois d’installation, de la cotisation patronale à verser obligatoirement à la Caisse nationale de sécurité sociale. Parce que l’immatriculation là-bas est soumise à un payement défini au prorata des déclarations d’embauche (s). L’affiliation à cette caisse est obligatoire. L’absence d’une attestation justifiant votre cotisation à jour est déclarée éliminatoire pour toute soumission de dossier. Cette attestation est valide pour trois mois.
Outre cela, il y a l’attestation de non faillite qui intervient mensuellement alors que l’exercice est annuel. Ce n’est qu’au bout d’un exercice qu’on peut déclarer ou constater qu’une unité de production est en faillite ou non. Mais au Bénin, le souci permanent de renflouer la caisse de l’Etat amène à l’exiger à chaque échéance ou opportunité. Il faut pour un entrepreneur courir à chaque instant pour avoir ces pièces à jour, c’est-à-dire valides.
Le calvaire ne s’arrêtant pas là, il faut maintenant faire face à une autre attestation, très importante, elle. Il s’agit de l’Attestation fiscale, autrefois annuelle, mais cette fois-ci trimestrielle.
L’obtention de ce bout de papier moyennant payement de plusieurs taxes n’est pas des plus aisées. Un bout de papier compartimenté, fait courir et entrepreneur, et comptable via une agence d’expertise qui, elle aussi, n’est pas favorisée dans le fonctionnement du système. En temps normal, lorsqu’un dossier est introduit dans ce circuit, il faut attendre deux voire trois mois avant d’être soulagé quand l’attestation avait une durée annuelle. Aujourd’hui, le délai de délivrance ne semble pas modifié malgré que sa validité ne couvre que trois mois, désormais. C’est-à-dire que l’attestation est trimestrielle mais les tracasseries pour l’obtenir demeurent. C’est ainsi qu’il arrive même que des entreprises perdent des marchés à cause de la lenteur mise dans l’établissement de cette attestation et surtout à cause de la non célérité dans la procédure administrative. Les gens ont toujours l’impression d’être en train d’élaborer un document annuel alors que le délai de validité est désormais réduit à trois mois au lieu d’un an.
Pire, c’est l’augmentation de la patente par ces temps de crise généralisée qui vient alourdir inutilement les charges des entreprises privées. Rien ne justifie cette donne anachronique.
Et lorsque votre corps défendant, vous parvenez quand même à être déclaré adjudicataire, vous entrez dans un autre système plus sévère, avec des exigences hors proportions : c’est à prendre ou à laisser. La corruption ambiante vous astreint à tout donner et à ne rien prévoir ni pour la réalisation correcte du marché, ni pour votre entreprise ; « Nous travaillons pour les autres », se plaint un chef d’entreprise qui regrette d’avoir fait le « mauvais » choix de création d’entreprise.
En clair, rien n’est facile sous le soleil béninois. Tout semble compliqué pour ceux qui s’aventurent dans le privé. Et pourtant.
L’entrepreneur, face à ces difficultés, devient incapable de faire face à ses charges. Il n’arrive parfois pas à honorer à ses engagements vis-à-vis de ses employés.
C’est ce qui fait qu’aujourd’hui, beaucoup préfèrent aller se réfugier dans le secteur public. Là au moins, même sans travail, on gagne ; la fin du mois est assurée. C’est un paradoxe que de vouloir développer un secteur qu’on charge avec des mesures prohibitives. (Dossier à suivre…)