« Je ne veux pas être candidat dans la dissension ». Le premier ministre a lâché le morceau. Invité avant-hier sur le plateau de la télévision nationale, Lionel Zinsou n’a pas caché ses intentions de briguer la magistrature suprême. C’est une évidence qu’il souhaite succéder à Boni Yayi. Ce dernier ayant réussi à le convaincre de quitter l’Hexagone où il passe le clair de son temps pour servir à ses côtés. C’est ainsi que dans la soirée du jeudi 18 juin dernier, il faisait officiellement son entrée dans la sphère du pouvoir en qualité de premier ministre. A l’époque, beaucoup avaient vu dans cette nomination surprise, des signes d’une ambition cachée. En effet, le président de Pai Partners, le plus grand fonds d’investissement français ne pouvait pas quitter aussi facilement ses prestigieuses fonctions s’il n’était pas mû par des intérêts. Petit à petit, l’homme a commencé à lever le doute sur ses intentions. Lundi dernier, il a fini par jeter le masque.
Le prétexte du débat
« Paix et unité : la plus-value en période électorale », c’est le thème qui a servi de prétexte au premier des ministres qui a cru devoir s’adresser enfin aux Béninois à moins de quatre mois de la présidentielle. Ce débat télévisé a été surtout l’occasion pour cette perle rare dénichée par Boni Yayi d’ouvrir la boîte de Pandore. Les observateurs de la vie politique nationale savaient déjà que ce serait un exploit si la coalition au pouvoir, les Forces cauris pour un Bénin émergent (Fcbe), engage le combat de la présidentielle en rangs serrés. Les guerres de leadership consécutives aux ambitions tenaces affichées par quelques têtes de pont de ce regroupement ont fini par le fragiliser. Et le mutisme de Boni Yayi qui se fait désirer quant à la désignation d’un « dauphin » vicie davantage l’atmosphère.
Nul doute que Lionel Zinsou caresse le rêve secret d’être désigné comme le porte-étendard des Fcbe. C’est peut-être cette promesse qui l’a motivé à faire ses valises pour le Bénin. Ne voulant certainement pas que la situation lui échappe, il opte pour le consensus. Morceaux choisis. « Je ne serai pas dans la division… Je suis arrivé pour faire mon travail, je n’ai rien demandé, je ne suis pas candidat pour diviser les gens ». En faisant de telles déclarations, le premier ministre confirme à l’opinion l’intensité de la guerre de clochers qui menace sérieusement la cohésion au sein des Fcbe.
La guerre de clochers
En effet, jusqu’à un passé récent, les deux protagonistes les plus en vue étaient Komi Koutché, le ministre d’Etat, chargé de l’économie et des finances et son aîné François Abiola, vice-premier ministre en charge de l’enseignement supérieur. Si le premier, qui n’aura 40 ans révolus qu’en septembre 2016 alors que l’élection est prévue pour le premier trimestre de la même année, s’est mis en selle grâce à la décision controversée de la Cour constitutionnelle qui énonce qu’une année entamée est considérée comme une année consommée, le second convoitait par contre le fauteuil présidentiel depuis un bon moment. A ces deux se sont ajoutés tout dernièrement Nassirou Arifari Bako qui sort ses muscles et naturellement Lionel Zinsou qui veut bien remporter la mise.
Ce dernier prend à contrepied ses concurrents en mettant sur la place publique ce qui n’était en réalité qu’un secret de polichinelle. Reste à savoir s’il parviendra à réaliser le consensus autour de sa personne.
Moïse DOSSOUMOU