L’homme d’affaires Patrice Talon conteste les accusations portées contre lui lors des séances extraordinaires du Conseil des ministres des 23 et 25 octobre 2015. Dans une interview accordée à la presse jeudi 05 novembre 2015, il a battu en brèche les reproches avec documents à l’appui. Lire quelques extraits de son propos.
Affaire détournement de 12 milliards dans la filière coton
« Au cours de la campagne 2011-2012 citée, l’Aic qui regroupe l’ensemble des structures faîtières des producteurs, les sociétés d’intrants du coton ainsi que les sociétés d’égrenage du coton, organise l’appel d’offres pour la sélection des distributeurs sous le contrôle de l’Etat… Et 6 sociétés ont été retenues… Le prix le moins disant de cession des engrais aux producteurs a également été retenu. Et ce prix s’impose à tous les distributeurs agréés de la campagne. Où intervient la subvention? Si le prix de cession, le plus bas issu de l’appel d’offres est de 1000 F/tonne d’engrais, l’Etat estimant que le coût de 1000 F n’est pas incitatif pour que les cotonculteurs achètent les quantités recommandées, décide d’apporter une aide aux producteurs à hauteur 200, 300 ou 500 F Cfa. Cela constitue donc la subvention qu’apporte l’Etat pour l’acquisition des engrais. Pour la campagne concernée, le prix des engrais d’environ 400 F Cfa vendus à crédit, l’Etat s’est engagé à apporter une subvention d’environ 177 F Cfa. Le dispositif prévoit que les distributeurs importent les engrais sur fonds propres, c’est-à-dire qu’ils mobilisent les financements nécessaires auprès des banques, importent les intrants et les livrent aux producteurs à crédit. Et ces derniers remboursent les distributeurs après la récolte à l’occasion de la commercialisation de leur production. Au moment où ils vendent leur production aux sociétés d’égrenage, les crédits sont prélevés et reversés aux distributeurs. Durant la campagne 2011-2012, les quantités d’engrais consommées par les producteurs associées aux prix de la subvention pour lesquels l’Etat s’est engagé, donnaient environ 11 milliards de subventions. Ce qui veut dire qu’après que les producteurs aient payé le prix à leur charge, l’Etat a l’obligation de compléter la part de subvention pour laquelle, il s’est engagé à apporter son concours aux producteurs. Lors de cette campagne, les 11 milliards ont fait l’objet de décision prise en Conseil des ministres qui assure les distributeurs et les banques que l’Etat, cette année également, s’est engagé à payer ce montant. Cela était de nature à rassurer tout le monde d’autant que cela est devenu une tradition. Les producteurs ont payé leurs crédits, les banques et les distributeurs d’intrants concernés s’attendaient à ce que l’Etat rembourse ces 11 milliards de subvention. Grande a été notre surprise, la surprise des acteurs de la filière coton, quand nous découvrons à la télévision un matin que le Directeur du Trésor est limogé pour avoir payé à Patrice Talon seul, la somme de 12 milliards au titre des subventions. D’abord le moindre centime n’a pas encore été payé, la subvention due n’est pas destinée à Patrice Talon. Elle est destinée à l’ensemble des distributeurs d’intrants et principalement aux banques auprès desquelles, les distributeurs d’intrants ont pris des financements… Suite à la pression des distributeurs. In fine, l’Etat a fini par reconnaître sa dette. Un document a été établi… L’Etat s’était engagé à payer 8,2 milliards indiquant que le solde, environ 4 milliards soit payé après un contrôle détaillé des montants effectivement dus.»
Affaire 200 milliards de la Sonapra
« En 1994, la production cotonnière a atteint 300 mille tonnes de coton graine dépassant la capacité des usines installées à l’époque et qui étaient la propriété exclusive de la Sonapra. Les perspectives de production on conduit le gouvernement d’alors, celui du président Soglo à décider de l’implantation de cinq nouvelles usines au Bénin... Le gouvernement a décidé de construire deux usines par ses propres moyens et a souhaité que le secteur privé à cette occasion rentre dans le secteur d’égrenage du coton. Et cette décision a conduit l’Etat à la sélection des opérateurs privés intéressées. C’est ainsi que la société Ccb, Icb et Socode ont été agréées pour procéder à cet investissement sur financement propre. Mais dans ce processus, l’Etat estime que la Sonapra est son bras opérationnel en la matière et a décidé qu’elle dispose de 35% du capital de toutes les sociétés privées devant intervenir. La Sonapra a libéré sa part de capital et les sociétés ont mobilisé environ 12 milliards F Cfa ; et les usines ont été construites en moins d’une année. Ces usines ont démarré leurs activités au cours de la campagne de 1994-1995. En 1996, on a changé de président. Et M. Talon a été vu comme un proche et un soutien du président Soglo. Et chasse aux sorcières, M. Talon a fait les frais des représailles. Un certain expert Atayi a été mandaté pour produire des éléments devant permettre de châtier M. Talon. C’est ainsi que ce monsieur a fait un rapport dans lequel il a affirmé que les usines Ccb et Socode ont été financées exclusivement par les ressources de la Sonapra… A l’époque, les dirigeants de la Sonapra ont contesté et ont montré que la société n’a jamais financé ces usines… J’ai déposé une plainte contre M. Atayi. Et il a été condamné en correctionnelle à six mois d’emprisonnement avec sursis… pour dénonciation calomnieuse… En 2001, le président en exercice souhaitait avoir un autre mandat. Les faucons du régime ont estimé que M. Talon ne manquera pas de contribuer au retour du président Soglo. Et il fallait lui coller quelque chose. Et le fameux dossier de financement des usines par la Sonapra a été déterré à nouveau. Les mêmes accusations ont été ressorties et on a ajouté que le fait des privées aient été introduites dans le secteur de l’égrenage par la construction d’usines au détriment de la Sonapra qui aurait pu construire ces trois usines, a généré un manque à gagner de 172 milliards F Cfa pour la Sonapra. C’était tellement ridicule… Cette affaire a été transmise au Tribunal et le juge n’a eu d’autres choix que de prononcer un non-lieu… La décision a fini par acquérir le statut de décision définitive… C’est étonnant qu’en 2015, le gouvernement rappelle cette histoire comme si les choses se sont effacées de la mémoire de tous»
Transcription : AS