Naguère le rideau tomba sur le workshop organisé par l’Association béninoise de droit constitutionnel et portant amélioration des politiques gouvernementales. Les échanges qui ont eu lieu à cette occasion sont à la mesure d’un face- à- face politicaillerie versus politique vertueuse dont l’arbitre ne pouvait, en tout état de cause, n’être rien d’autre qu’une nouvelle prise de conscience de la gestion de la chose publique.
Oser dénoncer et appeler un chat un chat
Autant le préciser d’entrée de jeu, comme en situation de combat, ce que renferment, respectivement, les deux notions que nous opposons sur le ring de la politique. Politicaillerie dérive du substantif politique augmenté du suffixe péjoratif aillerie ; signifiant, alors, basse pratique politique menée par un politicard en désignation d’un politicien faisant de la politique pour seule raison d’intérêt personnel en ne s’embarrassant d’aucune autre considération. Dès lors politicaillerie renvoie à politique pour le profit, les passe-droits, et le mensonge. En revanche, la politique vertueuse figure le pouvoir animé par la vérité et la transparence qui sont des dimensions déterminantes de l’éthique. Elles permettent, en outre, de conduire un peuple vers la civilisation de la discipline, un travail productif, de l’abondance et de la solidarité.
Dans un pays qui, plus est, est le nôtre, où les valeurs citoyennes ont déserté le forum et foutu le camp, où les non-valeurs se sont substituées à elles et où le quotidien s’en est, fort malencontreusement, accommodé, il est bien hasardeux de ramer à contre-courant et de dénoncer les turpitudes qui gangrènent nos comportements vis-à-vis de la chose publique, sans être perçu comme un extra-terrestre ne comprenant rien à la politique ; tellement celle-ci a été galvaudée, malmenée et flétrie, vidée de tout son sens traditionnel et ramenée à une conception mercantile qui nous est , hélas, propre, au Bénin. Et de cela, il est impérieux que les citoyens, jeunes et élites, notamment, en aient pleine conscience pour ne point se leurrer sur ce qu’elle est en réalité. La politique saine vise le bonheur du plus grand nombre possible de citoyens ; mais, au lieu de cela, nos acteurs politiques font ce qui leur chante n’ayant de dessein que leur avenir politique, balayant et rasant tout ce qui se met en travers de leur chemin.
Dans ce cadre, nous sommes particulièrement satisfait qu’au cours du Workshop, des sommités aient,à travers leurs différentes communications,eu la bravoure de dénoncer les écueils, notamment d’ordre humain, que rencontre, dans notre pays, la conduite d’une politique vertueuse. Quelles idées ont-elles donc exprimées, qui aient retenu notre attention, eu égard au développement que nous faisons? Elles ont dénoncé le manque de sincérité de nos acteurs politiques, leur manque d’honnêteté ; le manque de loyauté envers le Chef de l’Etat. Elles ont exprimé l’idée de la nécessité des réformes, mais en commençant par celle des esprits, car la vie spirituelle est celle de l’homme vrai.
Comment ces sommités ont-elles étayé leurs idées ? Par des propos, on ne peut plus francs ; j’aurais pu les qualifier de révolutionnaires, parce que tout cela m’a paru une première, contrastant et jurant avec ce dont les politiciens et les autorités gouvernementales, elles-mêmes, se sont accoutumés à nous rebattre les oreilles. Elles ont dit, à visage découvert et à peu de chose près, ceci : « La question est de savoir ce que nous voulons faire avec le peuple ; continuer une politique vicieuse ou faire une politique vertueuse ». « Les politiciens sont des hypocrites ; ils ne disent pas lavérité au peuple et ils se mentent entre eux; même leurs idées sont empreintes de calculs pernicieux ; et ils sont à l’aise dans cet exercice ».
« Nos politiciens cherchent le pouvoir pour aller prendre leur part du gâteau, arrêtons de blaguer le peuple ». « L’Etat n’est plus un moyen de servir l’intérêt général ». « Nos pratiques politiques ne sont pas conformes à la devise de notre pays ». Ces sommités ont dit aussi que « très peu de gens disent la vérité au Chef de l’Etat » à lui, chargé de prendre les grandes décisions qui engagent l’Etat, tout entier. Elles ont également dit : « c’est les hommes qu’il faut réformer d’abord, ce ne sont pas les institutions, d’autant que l’on constate, bien souvent, qu’une fois nommés à la tête de ces entités, ils retournent leur veste, sans vergogne aucune ». La réforme des institutions dans laquelle l’on veut enfermer l’électorat ne peut donc être, à elle seule et sans celle des esprits, la panacée à l’autonomie et à l’indépendance recherchées, des institutions étatiques. Voilà un tableau peu reluisant du panorama politique, qui interpelle toute conscience citoyenne. Notre conscience est vacillante ; elle est tueuse des valeurs républicaines et des aspirations au bien-être.
Nouvelle Conscience au cœur du débat politique.
J’avoue que, face au petit écran, relayant les discussions au cours du Workshop, je me croyais dans un atelier sur la Nouvelle Conscience d’Irénée Koupaki qui, d’essence civique, a été ainsi, par la force des choses, indirectement invitée dans le débat politique puisqu’il s’agissait, fondamentalement, d’une remise en cause de nos pratiques politiques. Et, je ne pensais pas si bien dire, lorsque devançant les propos tenus au cours du workshop, j’écrivais dans un récent article, au nom de Nouvelle Conscience, les mots suivants que je m’excuse de réitérer ici ; persuadé que je suis, cependant, que la répétition est pédagogique. « Nos acteurs politiques se confortent dans l’idée, totalement erronée, que faire la politique, c’est savoir monter des calculs machiavéliques, faire des crocs-en-jambes et autres entourloupettes ; prendre des attitudes féroces pour déstabiliser celui ou le groupe d’en face, en sachant bien que leur tour viendra de subir les mêmes stratagèmes et qu’ils devront s’y préparer dans l’ombre, en embuscade et astucieusement.
A force de jouer à ce chassé-croisé dénué de tout intérêt pour le peuple, ils en ont fait une méthode sinon une stratégie et ont fini par se faire à l’idée que c’est cela la vraie politique. Ainsi va notre République ».
La Nouvelle Conscience, voilà ce qu’elle est ; juste une remise en cause systématique et profonde des choses ; elle tire simplement sa source de l’effectivement vécu constitutif de l’expérience. Lorsque les choses sont toutes simples, nous nous plaisons à leur injecter une bonne dose de complications aux fins d’embrouiller la vérité, avec le dessein inavoué de la détruire en même temps que son promoteur ; faisant, de ce fait, d’une pierre deux coups.
D’aucuns, demi-lettrés certainement, continuent de propager l’idée dans les cercles crédules, que les gens ont faim et que ce n’est certainement pas Nouvelle Conscience qu’ils vont manger. Peut-être devraient-ils finir par comprendre que la Nouvelle Conscience que prône Koupaki n’a jamais prétendu être nourricière par elle-même, et que celui-ci n’a pas encore dévoilé son programme de société qui exposera ce qu’il compte faire pour améliorer le bien-être des citoyens. L’on ne le dira jamais assez, Nouvelle Conscience est une remise en cause de ce que nous avons fait depuis plus d’un demi-siècle, afin de prendre un nouveau départ ; déterminer de nouvelles politiques pour que, justement, les gens puissent manger à leur faim. Lorsque l’on a échoué, l’on se remet en cause ; et lorsque l’on continue de dépendre de l’assistance étrangère que l’on appelle pudiquement coopération, c’est que l’on a échoué sur toute la ligne. Travailler pour que notre pays devienne moins dépendant de l’aide ou qu’il soit reconnu pour la bonne gestion de cette dernière est le pari de Nouvelle Conscience
Dans l’histoire politique des nations, la remise en cause s’est avérée nécessaire et inévitable pour tout peuple qui a voulu faire un bond en avant dans son développement. La France a connu le siècle des Lumières. Ce fut un vaste mouvement intellectuel initié par de grands philosophes, ayant visé à combattre l’obscurantisme et les ténèbres de l’ignorance. La Nouvelle Conscience poursuit le même objectif. Les Etats-Unis ont connu le New deal ; la Chine, sa révolution culturelle ; les japonais, l’ère Meiji ; la Russie, sa Perestroïka et sa Glasnost. Et, pourquoi donc les Béninois, eux aussi, ne pourraient-ils leur emboîter le pas et entrer dans l’histoire ?
NOUVELLE CONSCIENCE A L’EPREUVE DE L’ELECTION PRESIDENTIELLE
Je sais bien, et il ne serait pas honnête de s’en cacher, que le promoteur de la Nouvelle Conscience sera candidat à la Magistrature Suprême et que l’on pourrait, légitimement, préjuger et redouter qu’il se serve de sa Nouvelle Conscience comme argument principal de campagne. Alors, autant détruire cette philosophie par anticipation quand bien même elle n’est pas partisane, quand bien même elle est de nature citoyenne. Qu’à cela ne tienne et ce serait de bonne guerre, maintenant que les élections sont imminentes et que dans toute campagne électorale, toutes les idées concourant au bien-être des citoyens sont les bienvenues. Bien sûr que lorsque viendra le moment, Koupaki saura intégrer sa philosophie à ses thèmes de campagne ; cela me paraît logique et aller de soi.
En tout état de cause, Nouvelle Conscience n’est pas le programme de société de PIK; elle sera, néanmoins, le principe directeur qui devrait l’inspirer : à savoir la remise en cause de l’existant, précurseur d’une idéologie en bonne et due forme qui sera portée par le langage de l’expérience et, partant, celui de la bonne gouvernance.
Ambassadeur Candide Ahouansou