Boni Yayi s’est lancé à corps perdu dans la promotion de son dauphin venu de France. Le conseil des ministres de ce 21 novembre aura servi à baliser le terrain. Deux millions de lampes solaires sont prévues pour être distribuées dans les ménages pauvres et surtout dans les collèges et lycées. 3000 km de routes seront rénovés, 12000 enseignants recrutés pour prendre service à partir du 04 janvier prochain, les frais de scolarité sont supprimés pour les filles de la seconde à la terminale. Bientôt, on pourra décréter la gratuité des zémidjans dans nos grandes villes…
Les promesses pleuvent de toutes parts et les travailleurs se frottent les mains. Les avantages promis aux enseignants du primaire et du secondaire sont de nature à faire pâlir d’envie les autres corps de la fonction publique. Tout compte fait, la grève est terminée et Boni Yayi est convaincu que ces actions, mises en œuvre avant les élections qui s’annoncent, vont propulser Lionel Zinsou. Mieux, pour renforcer son image, le Chef de l’Etat s’est mis en tête de faire l’aller-retour vers le marché Dantokpa près d’une dizaine de fois depuis l’incendie. 3,5 milliards sont nécessaires pour reconstruire les boutiques détruites, et l’Etat a déjà trouvé les fonds pour les travaux qui ont démarré comme sur des chapeaux de roue un peu comme s’ils étaient disponibles depuis longtemps et n’attendaient plus que les feux saccagent une portion du marché pour être déployés. Quelle promptitude !!!
Tout ceci tente de tromper les gens simples d’esprits qui verront le nouveau messie venu de France comme l’homme providentiel, le messie devant venir d’Occident pour « sauver » le pays. Pauvreté et ignorance, corruption et bas niveau de jugement font le reste. Bientôt, les mécanismes d’une campagne électorale aux frais de l’Etat se mettront en branle. Le premier ministre, jouant ex-qualité mais en réalité en tant que candidat, s’est déjà lancé dans une précampagne exubérante. Personne ne lui aurait rien reproché si ce n’était aux frais et sous le couvert de l’Etat.
Toute la machine administrative et médiatique est désormais mise en branle à son profit, pendant que les autres candidats doivent constater que les impôts du citoyen servent à financer leur adversaire, le candidat du régime. Faut-il demander à Lionel Zinsou de démissionner pour éviter la confusion des genres ?
On me rétorquera qu’en 1991, Nicéphore Soglo étant premier ministre, personne ne lui avait demandé de démissionner pour être candidat à l’élection présidentielle d’alors. Et que par conséquent, Lionel Zinsou peut bien rester en poste. Soit. Mais il peut tout au moins respecter l’article 62 du code électoral qui stipule : « Les dons et libéralités ou les faveurs administratives faits à un individu, à une commune ou à une collectivité… sont interdits six mois avant tout scrutin et jusqu’à son terme ». Alors question : que fera le premier ministre lorsque les deux millions de lampes solaires prévues seront amenées, lorsqu’on sait qu’il est l’initiateur du projet dont il a même lancé la phase pilote la semaine écoulée ?
Ce qui se passera est simple. Il faudrait des violations massives de la loi électorale doublées d’un manque criard d’éthique politique pour que la candidature de Lionel Zinsou puisse prospérer et déboucher sur une éventuelle victoire. La fièvre des promesses qui s’est emparée de l’exécutif, montre quelles méthodes seront utilisées.
En toute logique, on devrait accuser les faiblesses de la constitution ou même de la loi électorale. Ces deux textes n’ont pas pu empêcher que l’exécutif utilise ses pouvoirs au profit de ses candidats. On se rappelle très bien qu’en avril et juin derniers, les promesses kilométriques du Chef de l’Etat, ont fait rigoler les populations, tout autant qu’elles ont attristé les patriotes. De sorte qu’il faut une bonne dose d’éthique et de morale pour ne pas tomber dans les pulsions électoralistes infantiles et démagogiques qui s’emparent de ceux qui nous gouvernent, à la veille des scrutins.
Bien sûr, la question qui se pose est de savoir si Lionel Zinsou est capable de prendre de la hauteur pour ne pas se faire construire une route de sable, là où il aura besoin de bitume et de pierre. Mais à voir la façon dont il a été crapahuté dans la course pour 2016, il y a de quoi se poser des questions sur son propre degré de patriotisme, d’éthique et de morale.
Par Olivier ALLOCHEME