Le Premier ministre béninois, candidat du régime au pouvoir à l’élection présidentielle du 28 février 2016, n’était, honnêtement parlant, qu’un célèbre inconnu dans sa seconde patrie, le Bénin, lorsqu’il fut nommé à ce poste il ya quelques mois. Son nom, à l’instar de son visage, laissait littéralement indifférents les Béninois ; d’où la kyrielle de commentaires, à son passif, qui fusèrent des quatre coins du pays, même de la part de certains de ses compatriotes censés se réjouir d’avoir, dans les arcanes du pouvoir français, un Béninois de cette trempe.
Car l’homme, dans l’Hexagone, est plus connu pour ses mille et unes compétences. Il serait même un cadre célébrissime et par conséquent prisé à maints égards, dont la France peut se vanter, et vanter les mérites de gestionnaire, contrairement à ce que peut penser de lui le Béninois lambda. C’est un homme éminemment controversé qui prit donc les rênes de la Primature béninoise, au moment où les Béninois s’y attendaient le moins, et c’est à bonne raison que les réserves notées çà et là se firent jour, tant la surprise était grande.
Un Premier ministre béninois, mais à l’allure franchement plus ‘’toubabesque’’ que nègre, prenait ainsi pied dans le landerneau politique béninois. Petit à petit, ses compatriotes béninois devaient apprendre à le connaître. Puis l’homme, nonobstant son côté un tantinet discret pour les responsabilités à lui confiées, de se faire découvrir de fil en aiguille pour, aujourd’hui, devenir le point à la fois d’attraction et de curiosité de tout le Bénin. La raison : son plébiscite par les Forces cauris pour un Bénin émergent (FCBE) comme le candidat de cette alliance politique, au titre des joutes électorales prochaines.
Aussi l’inconnu devient-il dorénavant un homme connu, dont le nom vogue actuellement de contrée en contrée au Bénin, et qui s’apprête à mener, en tandem avec le président sortant, Boni Yayi, une campagne électorale dont les prémisses annoncent la vigueur, et des déballages à haute intensité de polémique ; et ce, d’autant que la polémique consécutive à sa candidature enfle et persiste, dans un Bénin où, à dire vrai, l’on s’attendait peu à un tel scénario, côté mouvance présidentielle. Mais les dés sont pipés. Lionel Zinsou vient bousculer les principes établis au Bénin depuis un quart de siècle, et l’inconnu, maintenant connu, peut se targuer de compter, d’ores et déjà, des adeptes de sa chapelle dans la perspective de la présidentielle de 2016 qui frappe fortement à la porte. Seulement, et quelle que soit la force de ses arguments, l’homme connu des Béninois pour lequel passe le Premier ministre de Boni Yayi aujourd’hui, reste, au plan strictement politique au Bénin, un inconnu.
C’est ce challenge qui l’attend, et qu’il doit s’ingénier à affronter, non sans difficulté. Car, chez nous, il existe bien un adage populaire qui dit littéralement : « On ne se réveille pas tardivement pour exiger de partager trois, trois ». Entendez, « un partage à part égale avec ceux qui étaient déjà en éveil ». Aussi son « déficit de connaissance » du pays et de ses réalités profondes est-il brandi par ses pourfendeurs, qui pensent qu’il pourra diriger le Bénin certes, mais pas avant l’année 2021, donc l’échéance d’après 2016. Qui dit mieux !
Sébastien DOSSA