« La limitation des naissances est normale mais l’avortement est un homicide strictement interdit par l’Eglise », dixit le curé Yves Hounliho
Que propose l’Eglise catholique pour le besoin de limitation et d’espacement des naissances des ménages et pour le désir des femmes à interrompre une grossesse ? La problématique a été soumise au père Yves Hounliho, curé de la paroisse Saint Moïse de Bohicon, le mercredi 18 novembre 2015, par une équipe de professionnels des médias.
Nouvelle Expression : Pourquoi tout au long de cette année 2015, l’Eglise catholique n’a fait que parler de « Famille » et a même abordé la problématique au cours d’un synode ?
Père Yves Hounliho : La nécessité de tenir ce synode est partie de la grande préoccupation qu’a l’Eglise, ces derniers temps, au sujet des familles. Parce que, de plus en plus, bon nombre de familles est désunie du fait de la discrimination, de la mésentente, du désir de l’homme de disposer d’une autonomie de procréation et de vivre en union libre.
Aujourd’hui, en matière de procréation, c’est l’homme qui décide du nombre d’enfants qu’il va avoir. C’est lui qui désigne le sexe et le genre de son partenaire au point de choisir qu’un homme peut épouser un autre homme et une femme peut en épouser une autre femme. Le paradoxe, dans ces prétendus ménages, ils expriment le besoin de disposer ce qu’ont les couples naturels ou réguliers : s’appeler père et mère et avoir des enfants alors qu’ils ont réalisé une union contre nature.
Ainsi, l’homme se donne une autonomie très exagérée et déplacée. Et les conséquences sont visibles : la famille est devenue plus artificielle que naturelle. Or, à la création, Dieu a voulu que l’homme se marie avec son sexe opposé. En clair, l’homme doit vivre avec la femme et vice versa. Ce sont ces situations enregistrées, çà et là, qui font qu’aujourd’hui, la grande préoccupation de l’Eglise porte sur la famille.
Dans votre développement, vous semblez ne pas épouser l’idée selon laquelle l’homme choisisse le nombre d’enfants qu’il veut avoir. Quel regard portez-vous sur la limitation des naissances ?
La limitation des naissances est normale, en ce sens que ne fait pas d’enfant qui veut. Car, si je n’ai pas encore une situation et je décide d’avoir des enfants, qui va s‘en charger ? En Eglise, nous parlons de « paternité responsable ». Pour l’Eglise donc, c’est la responsabilité qui compte en matière de procréation. Autrement dit, des personnes déjà responsables, qui ont leur gagne pain, peuvent s’entendre pour décider du nombre d’enfants à avoir. Dans ce cas, ce que recommande l’Eglise est l’interruption des naissances par des moyens naturels. Ce n’est donc pas la limitation des naissances qui est interdite par l’Eglise mais les procédés utilisés qui sont déconseillés. Seule, est admise la méthode naturelle.
Dans l’expression de notre foi africaine, nous n’avons plus le sens de la providence. Nous devons donc beaucoup nous baser sur les actions de la providence.
Cela paraît contradictoire de parler en même temps de « parenté responsable » et de l’attitude à compter sur la providence …
Il ne s’agit pas là d’une contradiction mais d’une complémentarité. C’est pour vous dire, que ce n’est pas une règle de vouloir, coûte que coûte, limiter les naissances en comptant sur notre rationalité humaine. Il faut savoir laisser de la place à la providence …
Que dit la doctrine sociale de l’Eglise relative à une femme enceinte qui saigne et dont la grossesse nécessite une interruption ?
Vous posez un problème de bioéthique au sujet de la vie humaine. Si l’unique solution est l’interruption de la grossesse, les médecins parlent d’avortement thérapeutique. L’idéal aurait été que l’on trouve une réponse qui sauve à la fois la vie de l’enfant et de la mère. Mais, si tel n’est pas le cas et qu’une vie doit céder à une autre, l’avis des médecins l’emporte.
La position des médecins l’emporterait-elle aussi au cas où un époux autoriserait sa femme à interrompre une grossesse pour leur bien-être ?
Ici, nous sommes en présence d’un cas d’avortement provoqué où la vie de la mère ne se trouve pas en danger. C’est un homicide strictement interdit par l’Eglise. Car, on foule là aux pieds la loi de Dieu qui recommande de ne pas tuer. En effet, l’enfant avorté est déjà à l’image de Dieu.
Que dirait l’Eglise d’une loi qui légalise l’avortement au Bénin ?
L’avortement ne peut pas participer au bien-être de la famille, et cette loi ne sera jamais reconnue et adoptée par l’Eglise. Pour le bien-être de la famille, aucun recours ne sera fait à l’avortement parce qu’on n’ignore pas ses conséquences négatives. De plus, déjà qu’il n’y a pas de lois, des milliers de cas nous sont rapportés en tant que pasteur. L’autoriser, serait donc ouvrir la vanne. En ce moment, ce sera la dignité humaine qui sera piétinée. Et je me répète, l’enfant avorté est déjà à l’image de Dieu. Le germe est déjà un être inviolable qui a des droits. Aussi, son intégrité et sa dignité doivent-elles être respectées.
Au-delà des enseignements de l’Eglise, que fait-elle concrètement pour prévenir les milliers de cas d’avortement qui vous sont rapportés ?
Disons que la force de la Parole est l’instrument de base. La première arme de combat de l’Eglise. Et la Parole de Dieu, c’est Jésus-Christ lui-même. C’est lui qui mène donc le combat. L’enseignement est alors primordial !
Somme toute, outre l’enseignement, les actions que mène l’Eglise sont nombreuses. Des séances d’informations et de formations en matière de régulation de naissance sont organisées et portent sur comment pratiquer la méthode naturelle préconisée par l’Eglise. Ces séances d’informations et de formations se déroulent dans les diocèses, au niveau des doyennés, sur les paroisses et dans les centres médicaux et institutions à dénomination religieuse. Des interventions curatives sont également initiées pour prendre en charge les cas d’avortement déjà consommés. Il faut simplement retenir que pour prévenir et guérir, par de diverses manières, l’Eglise est toujours présente.