Invité de Rfi Afrique hier, lundi 7 décembre 2015, le Premier ministre béninois a bien évidemment évoqué la présidentielle de l’année prochaine au Bénin et les potentiels candidats dont Patrice Talon. Cet homme d’affaires que certains de ses compatriotes trouvent qu’il ne devrait pas s’engager dans la politique. Lionel Zinsou s’est aussi rangé du côté de ceux-là. Il fait du pur «yayisme» depuis l’annonce de sa candidature.
L’exclusion de certains béninois du débat politique, des effets d’annonce…Le Premier ministre béninois fait déjà du «yayisme» dans la perspective de 2016. En six mois de collaboration, Lionel Zinsou aura épousé le système Yayi à bien des égards. Il l’a prouvé hier au micro de la Radio France internationale. «L’homme d’affaires Patrice Talon a été accusé des crimes les plus graves par le président Boni Yayi. Pensez-vous, comme certains au palais présidentiel, qu’il est un candidat de la division ?», a demandé l’interviewer de l’invité de Rfi Afrique.
La réponse de Lionel Zinsou a été claire : «Je pense que c’est très, très important de jeter les vengeances à la rivière. Je pense que d’abord on n’est pas candidat contre un président dont le mandat s’achève. On est candidat contre d’autres candidats. Je pense qu’il faut éviter les clivages et les conflits d’intérêts. Quand on est un homme d’affaires impliqué dans les affaires et que ces affaires sont très centrales dans la vie du pays, il va falloir se dépouiller de quelques ambitions d’affaires pour éviter les conflits d’intérêts», a-t-il dit. Faisant ainsi croire que Talon veut prendre le pouvoir pour se venger. Là, Lionel Zinsou ne fait pas autre chose que Boni Yayi. On sait bien que la candidature de Patrice Talon est très mal acceptée par le régime en place. A l’annonce de celle-ci, beaucoup de soutiens de Yayi sont montés au créneau pour tenter de faire croire qu’un homme d’affaires au pouvoir, ce n’était pas bien pour le pays. Le coup d’essai anti-Talon a visiblement fait flop. Les Béninois continuent de susciter la candidature de Talon. Des mobilisations s’observent toujours autour de sa personne. Alors, le Chef de l’Etat lui-même a pris le relais. A Parakou, le dimanche 30 août 2015, le président Boni Yayi s’est prononcé sur cette candidature : «Que ce soit des opérateurs économiques qui régentent les politiciens, qui régentent nos institutions politiques, cela veut dire qu’on- les hommes politiques- a échoué totalement (…) L’assainissement de l’environnement des affaires suppose que nous voulons redonner la clé de la prospérité au secteur privé. Le secteur privé doit animer le secteur productif et il ne doit pas faire la politique. Sinon, il y aura connivence et conflit d’intérêt», avait souligné le président de la République. De certains de ses proches, il serait très remonté contre son ancien-ami. Alors, l’anti-Talon est en train de grandir dans le rang du pouvoir en place. Puisque Lionel Zinsou y voit aussi un mauvais présage pour le Bénin. En plus, celui qui dit ne pas venir au Bénin pour prendre le pouvoir semble avoir déjà un projet de société pour son pays. Ceci en quelques jours.
A moins qu’il n’était pas sincère. L’autre fois, il en a parlé à La Matinale de France Inter à Paris. Hier, c’est au micro de Rfi Afrique que Lionel Zinsou a égrené certaines grandes lignes de son projet de société. Il parle d’un projet au profit des «zem» pour les sortir de la précarité et, du projet «Lumière pour tous». Les Béninois, en dix ans, ont été habitués aux effets d’annonce du régime en place. Très souvent, ils ont été déçus. Le plus récent, c’est l’achèvement de la construction du siège de l’Assemblée nationale pour le 30 novembre dernier. Sur place, on a bien l’impression que les travaux ne sont pas prêts de s’achever d’ici à quelques mois. Selon certaines indiscrétions, la maison de la culture dont la pose de première pierre a été faite depuis quelques mois serait une farce. Lionel Zinsou est en train déjà d’emprunter ce raccourci. De la France où il séjourne depuis quelques jours, il le fait à travers les médias.
Jean-Marie Sèdolo