Nathaniel Bah, ancien député Rb : "Quand je pense au Général Kérékou, je pense à l’école nouvelle…"
« Ce que je retiens du président Mathieu Kérékou s’inscrit en deux phases. Le bon et le mauvais côté. Quand on parle en bien de quelqu’un, c’est dans la mesure où le bon côté l’emporte sur le mauvais. Quand je pense au Général Mathieu Kérékou, je pense à l’école nouvelle qui a été décriée et que j’ai connue avant Kérékou, parce que mon père fut directeur d’école. L’essentiel de ce que l’école nouvelle nous a apporté était appliqué dans l’école de mon père parce qu’il y avait, l’élevage, le champ. Et à la fin de chaque année, c’était la fête des moissons et la récolte était abondante dans la mesure où les parents d’élèves pouvaient en emporter à la maison, et les élèves étaient brillants. Sous Kérékou, j’ai retrouvé cet aspect de l’éducation au Bénin et mes enfants ont été pour la plupart à l’école nouvelle avant de continuer à l’extérieur. Une fois qu’ils ont continué à l’extérieur, ils étaient de brillants étudiants. C’est la preuve directe de ce que j’ai reçu et mes enfants ne sont pas des enfants tarés. Ils ont brillé dans d’autres systèmes ».
Jijoho Padonou, ancien ministre : « j’ai vu Kérékou pleurer… »
« Il s’agit d’un homme rare. Les grands hommes apparaissent au peuple une fois tous les 25 ans. Le Général Mathieu Kérékou est apparu au peuple béninois. Il y a eu du bon comme du mauvais avec lui. Certainement, il ne faut pas occulter le mauvais côté de Mathieu Kérékou. Mais moi, personnellement, je ne peux pas noircir l’homme.
Il m’a nommé ministre en 1996 alors que j’étais contre lui. A l’époque, le ministre du développement rural était venu présenter en Conseil des Ministres, un dossier relatif au développement agricole. C’est là qu’il s’est rappelé que pendant la période révolutionnaire, l’Etat béninois a investi des millions de Fcfa pour envoyer des gens se faire former au Ghana en vue de revenir développer la culture du cacao au Bénin. Il s’est rappelé que c’est dans les régions de Takon et de Yoko dans l’actuelle Commune de Sakété que cette culture devrait être développée. Immédiatement, il a mis sur pied une commission spéciale pour aller vérifier ce que le projet de cacao est devenu. Cette commission était composée du ministre du développement rural avec d’autres ministres. Cela m’a intéressé et il m’a demandé de les accompagner sur le terrain. Nous sommes allés à Takon et à Yoko. Nous n’avons pas vu un seul plant de cacao. Le Général Mathieu Kérékou est resté au Palais, croyant qu’il y a du cacao dans les régions de Takon et de Yoko. Il reste dans son rôle et les cadres montent des projets dont ils lui parlent. Il les accepte et on les finance. Après, on ne trouve rien du tout. Ce jour-là, j’ai vu Kérékou pleurer parce qu’il n’en croyait pas à ses yeux. Quand il est revenu au pouvoir en 1996 après les 5 ans de Nicéphore Soglo, c’était pour continuer de développer la filière cacao qu’il pensait avoir démarrée ».
Michel Missikpodé, ancien député Prd : « C’est grâce à son humilité que le Bénin a pu organiser la conférence nationale… » }
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« Le Général Mathieu Kérékou a été pour le pays un vrai père de la Nation. Il est vrai qu’il a pris le pouvoir le 26 octobre 1972 par les armes. Il a fait le temps qu’il a fait au pouvoir avec une bonne appréciation de son régime au début de sa gestion du pays en 1972 puis ensuite un désaveu de la part d’une frange de la classe politique et des populations de son système de gouvernance, mais l’homme a su relever la tête pour plaire à tout le monde. S’il n’était pas aimé au temps du Parti de la révolution populaire du Bénin (Prpb), c’est parce qu’il y avait autour de lui, des gens qui n’avaient pas la même vision que lui. C’est justement ce désaveu de son régime qui a poussé les bailleurs de fonds à lui fermer le bouchon du nerf de la guerre ; toute chose nécessaire pour diriger un pays en toute tranquillité. Comme je le disais tantôt, l’homme a su relever la tête puisque c’est grâce à son humilité que le Bénin a pu organiser la conférence des forces vives de la Nation en février 1990 ; conférence grâce à laquelle l’on parle aujourd’hui de démocratie au Bénin. C’est d’ailleurs lors de cette conférence nationale au Plm Alédjo que mes compatriotes qui ne le connaissaient pas assez se sont rendu compte qu’il était effectivement un homme qui aime son pays ».
Abraham Zinzindohoué, ancien ministre : « le Général a été pardonné… »
« Qu’on l’aime ou qu’on ne l’aime pas, le Général Kérékou est une personnalité qui a marqué notre pays. J’étais en Europe quand il est décédé. Le Général président si je peux le caractériser, c’est de l’ombre à la lumière. Si le prix Nobel était décerné à des personnes qui ne sont pas des personnes vivantes, je militerais pour qu’en duo, le Général président et Mgr De souza puissent être éligibles au Nobel de la paix. Il y a des compatriotes qui ne sont pas d’accord sur cette analyse et qui estiment qu’ils détiennent des séquelles du temps du régime marxiste léninisme. C’est pour cela que j’ai dis de l’ombre à la lumière. Le Général président à la conférence nationale a demandé pardon au peuple pour ce qu’il a fait. Mais les gens n’ont pas oublié. Le pardon, ne veut pas dire oubli. De mon point de vue, le Général a été pardonné. En ce qui concerne son come-back, j’étais président de la Cour suprême et j’ai pu exercer le pouvoir pendant le premier mandat de son retour. Concernant l’homme, je peux dire qu’il est le chef qui est à l’écoute, qui a la réparti, qui a l’humour. Il est un chef d’Etat aimant son pays ».
Colonel Akanni : « C’est un homme de paix qui a su gérer son pays avec maturité… »
« Ce que je retiens du Général Mathieu Kérékou est énorme. J’ai eu l’occasion de le connaître et de travailler avec lui. C’est d’ailleurs un honneur pour moi. Sa mort est un événement triste et douloureux pour ceux qui l’ont connu et qui l’ont côtoyé. Personnellement, je suis meurtri. C’est un homme de paix qui a su gérer ce pays avec maturité. Si aujourd’hui, nous avons continué avec la démocratie et nous sommes dans une stabilité, il faut reconnaître qu’il y a joué un grand rôle. D’un système à un autre, de la révolution à la démocratie et au pluralisme, tout a été créé par lui dans une grande stabilité. Il a utilisé toute cette maturité pour accompagner la démocratie béninoise. Je crois que toutes ces années de démocratie, c’est à lui qu’on le doit. Si je dois parler du Général Mathieu Kérékou, on n’en finira pas. C’est pour moi la route infinie de la victoire. J’ai travaillé avec lui et je pu dire, qu’il sait se mettre à l’écoute des autres. Quand bien même il a sa solution, il essaie d’écouter votre avis. J’étais beaucoup proche de lui et il me donnait assez de conseils. Il était comme un père pour moi. Si aujourd’hui, je suis colonel, il y a contribué. Pour moi, c’est un grand homme. C’est pour vous dire que ce n’est pas facile d’accepter sa mort, je suis vraiment meurtri. Il a pu nous garantir la paix. On lui doit tout ».
Félix Iroko, Historien à l’Uac, Biographe du Gl : « Il a évité le jusqu’auboutisme… »
« Ce qui m’a beaucoup étonné, ce sont les éloges adressés à quelqu’un qui a été blâmé, critiqué, vilipendé. Quelqu’un qui a été au cœur de beaucoup de controverses de polémiques. Aujourd’hui, je constate que des gens, je ne sais pas s’il faut dire qu’ils ont changé d’avis mais avec le recul, ils ont dû finalement se rendre compte qu’il est un grand homme aussi bien en 1991 qu’en 2006. Au moment où il devait partir et qu’il donnait l’impression de ne pas le vouloir. Il a évité le jusqu’auboutisme. C’est un militaire mais profondément épris de paix en tant que militaire. Et ces comportements, sont aujourd’hui mis en relief par ce qui se passe autour de nous en Afrique. Beaucoup de chefs d’Etat en exercice ne veulent pas partir et ils parlent de réviser la Constitution, ils parlent de référendum. Lui, il aurait pu en parler en 91 par exemple. Car, il avait toute l’armée derrière lui, comme en 2006, il aurait pu procéder par une épreuve de force et pourtant très sagement, en dépit des conseils de certaines personnes proches de lui, il a décidé de partir. Je pense que nous aurons l’occasion de souligner cet aspect qui me semble fondamental. En dehors de ça, on dit que Caméléon, c’est son surnom, c’est ci, c’est ça. Moi, je me nomme Félix Iroko. Mais Félix, c’est mon prénom, Iroko, c’est mon nom. Mathieu Kérékou Caméléon, Caméléon n’est pas son surnom, c’est son vrai nom authentique. C’est le seul nom qu’il a eu à sa naissance et le nom est d’origine Wama. Mais on peut dire Caméléon tout simplement. C’est lui-même le caméléon. Et c’est après qu’il a été baptisé qu’il a pris le prénom Mathieu. Dans la culture Wama, les gens ont coutume de donner des noms d’animaux aux enfants. Ça là, ce n’est pas une exception, il y a des cas aussi comme cela au Congo. Lui-même, c’est Tcha Caméléon, et sa mère Yokossi qui veut dire lièvre. C’est son nom à la naissance et c’est le seul qu’il avait à sa naissance, c’est après qu’il a été prénommé Mathieu ».
Au départ, il m’a dit que moi, je ne me nomme pas Kérékou, c’est Tchrékou et comme c’est difficile à prononcer pour certaines personnes, j’ai décidé de transformer ça en Kérékou, ce qu’il m’a dit lui-même. Il a transformé le nom lui-même. Et c’est Tchrékou Tchabi, c’est le nom de son grand père maternel dans une société
Noël Chadaré, Sg-Cosi-Bénin « Nous devons la Conférence nationale et les acquis démocratiques au Président Kérékou »
Je dois noter qu’il y a deux phases qui ont régi le parcours du Général Mathieu Kérékou à la tête de notre pays. Il y a une phase sombre marquée par la révolution. Il y avait donc un monstre à trois têtes et il fallait mettre fin à ce théâtre politique qui n’avançait guère notre pays. A son arrivée au pouvoir en 1972, le début n’était pas mauvais. Mais quelques années après, le pays a sombré dans la dictature. Ce qu’on a connu comme arrestation, tortures et assassinats ont laissé une mauvaise marque pour le Bénin. On peut donc dire que cette phase n’a pas été très bonne pour notre pays.
La deuxième phase, c’est-à-dire, celle qui a rapport à la conférence nationale, au renouveau démocratique, était très positive. il a été reconverti en démocrate. On a constaté que pendant cette phase, il a joué la carte de démocratie. Il a d’abord perdu les élections en février 1991 face à Nicéphore Soglo, il est revenu et a fait deux autres mandats. Toujours est-il que nous devons la Conférence nationale et les acquis démocratiques à l’ancien dictateur reconverti en démocrate, le Président Kérékou. Et le Père de la démocratie béninoise est un patriote. Parce qu’il a présenté deux visages au peuple béninois. Le premier où le peuple a souffert, le deuxième où il a démontré toute sa sympathie, son amour et son courage. Il a pris les décisions les plus bonnes et dont le Bénin tire profit à ce jour. Tenez, en ce qui concerne l’organisation de la Conférence nationale des forces vives, son entourage l’a fortement déconseillé. Mais il est resté ferme sur sa décision. Il s’est sacrifié pour que le Bénin en sorte grandi. On l’a vu faire ses deux mandats. Bien que des manœuvres aient été orchestrées pour le maintenir au pouvoir, il s’est opposé et est parti en bon démocrate. En résumé, lorsqu’on mesure ces deux phases, on voit que la phase qui marque le parcours positif de l’homme l’emporte sur celle qui a écorché l’image du Bénin dans les années 1972.
Dieudonné Lokossou, Sg-Csa : « Le Général Mathieu Kérékou a été un grand homme d’état »
Le Général Mathieu Kérékou a été un grand homme d’état. Il a fait beaucoup de choses pour notre pays, des choses positives et aussi négatives. Il a mis fin à l’instabilité politique que notre pays a connu aux premières heures de notre indépendance avec des coups d’Etat. Le 26 octobre 1972, dès l’avènement des Jeunes militaires révolutionnaires (Jmr) et avec une équipe de 12 personnes, le pays a été bien géré. Pour un pays dont les ressources sont limitées, on ne peut que le remercier. Il a aussi fait beaucoup de choses sur le plan de la création d’emplois. Les étudiants qui revenaient de l’extérieur étaient répartis dans des ministères ou des sociétés qu’il a créées. Le chômage n’était pas aussi criant comme on le voit aujourd’hui. Mais, c’est dès que les civils ont récupéré le mouvement que les déboires ont commencé. Donc, à cette époque, on a changé le 30 novembre, le drapeau et l’appellation de notre pays. La violation des droits de l’homme, la violation des libertés syndicales, de la liberté d’expression, les sévisses corporels, les camps de concentration qu’on a créés par-ci et par là ont terni l’image de notre pays. Mais le Président s’est rattrapé à travers la Conférence nationale et notre pays a été, sur le plan démocratique, réhabilité. Avec beaucoup de courage, il s’est rattrapé et le peuple l’a encore plébiscité pour 10 ans et il a pris sa retraite. Je garde de lui le souvenir d’un bon patriote et tout ce qu’il a fait de positif l’emporte sur le négatif. Donc, il a été l’un des meilleurs Présidents de l’Afrique. Autrement dit, notre démocratie a été imitée par d’autres pays qui n’ont pas réussi.
Pascal Todjinou, Sg-Cgtb : « L’histoire retiendra que cet homme nous a légué un héritage intarissable »
Le Général Mathieu Kérékou est un homme qui a connu trois phases dans sa vie. Primo, c’est un militant hors pair qui a été garde du corps d’éminentes personnalités dans ce pays. Secundo, il a été Président d’une République populaire qui a broyé plusieurs personnes sur son chemin. Tertio, c’est un homme qui a amené la démocratie au Bénin. Tous ceux qui sont en train de dire qu’il faut peindre l’histoire du Général Mathieu Kérékou en noir, n’avaient ni la possibilité de parler, ni d’accéder à la presse. Dans l’appréciation, il faut prendre le bien. Quand on pèse, on constate que le bien est largement supérieur au mal qu’il a fait. Je ne leur demande pas d’oublier le mauvais côté, mais il s’agit ici d’étudier le côté positif de la personne. Et c’est cela qui fonde aujourd’hui des réactions positives, surtout ceux qui ont été maltraités par son régime. Moi-même, j’ai passé des nuits dans la brousse, j’ai été séquestré au Camp Guézo. Aujourd’hui, je crois que c’est à Mathieu Kérékou que nous devons la démocratie. En 1990, cet homme a fait du bien au Bénin, parce que les autres sont encore là. Moi, je n’étais pas syndicaliste dans les années 1990-1992, mais j’ai connu le Président Mathieu Kérékou quand j’étais responsable provincial dans le Grand Mono. Et je sais comment il a rabroué le tout puissant Azonyiho à Hillacondji. L’histoire retiendra que cet homme nous a légué un héritage intarissable. L’histoire retiendra son nom qu’on le veuille ou pas. Ceux qui veulent le peindre en noir ont leur raison.
Je ne dis pas que tout ce que Kérékou a fait est bien. J’insiste là-dessus. Parce que du temps de la Révolution, les hommes et les femmes qui l’ont entouré, ont été victime de torture physique et beaucoup sont morts. Certains sont même grabataires quelque part. Ainsi va la vie. Mais au-delà de tout cela, l’homme nous a permis de parler et d’exprimer nos sentiments, de dire ce que nous pensons, de nous réunir et de contester même l’autorité de l’Etat. Et cela est très important.
Me Adrien Houngbédji, Président de l’Assemblée Nationale : « C’est sûrement le plus grand homme de la période post coloniale »
« J’ai appris cet après-midi la disparition du Président Kérékou. C’est un grand homme d’Etat, c’est sûrement le plus grand homme de la période post coloniale, c’est une perte pour le Bénin. Tous les Béninois compatissent à la douleur de la veuve, de ses enfants et petits-fils. Je leur présente mes condoléances. Je voudrais ajouter à cela que le président Mathieu Kérékou a été dans ma longue carrière politique un homme qui m’a beaucoup marqué. J’ai été son premier Ministre et Président de l’Assemblée Nationale pendant qu’il était Président de la République. C’est un homme très humble. C’était un grand politique, un grand serviteur de l’Etat qui était à l’écoute de ses collaborateurs à tous les niveaux. Il mettait les uns et les autres à l’aise lorsqu’il s’agissait de trancher les problèmes qui sont dans l’intérêt de l’Etat. Je voulais ajouter à cela qu’il a fait un grand progrès pour avoir réussi cette conversion sans précédent de passage d’un régime de parti unique à un régime de multipartisme. Il fut un grand homme pour avoir accepté les décisions de la conférence nationale. Il fut encore un grand homme lorsque revenu au pouvoir en 1996, il a été respectueux de l’Etat béninois, respectueux des libertés des uns et des autres. Il a été un acteur déterminant du climat de paix qui a régné au Bénin pendant les dix années où il a assuré les fonctions de Chef de l’Etat dans le Bénin démocratique. C’est une grande figure de notre société aujourd’hui, au Bénin et dans toute la sous-région. Par conséquent, nous devons saluer cette perte, la perte d’un grand démocrate, la perte d’un grand homme d’Etat, et la perte d’un homme de paix.
Amos Elégbé, ancien ministre de la culture sous Kérékou et a conseiller politique de Boni Yayi : « Ce qui frappe en cet homme, c’est son courage, sa patience légendaire et son sens élevé du devoir »
C’est avec amertume que j’apprends le décès du général Mathieu Kérékou que j’appelle affectueusement mon deuxième papa. Effectivement, il s’appelait lui-même ainsi. Il disait quand mon papa est décédé qu’il est mon deuxième papa. Bref, ce qui frappe en cet homme, c’est son courage, sa patience légendaire et son sens élevé du devoir. Mathieu Kérékou est un patriote convaincu, il l’a prouvé à maintes occasions. Et surtout, c’est un homme de paix et très sobre. Vous le savez bien, il adore l’humour. Kérékou est un baobab qui s’en va, comme l’a dit le président Boni Yayi tout à l’heure en annonçant son décès. Donc, c’est avec une grande douleur que je perds, que la nation béninoise perd celui-là qui, pendant vingt-huit ans, a marqué son histoire, et qui a marqué toute une génération de ce pays depuis 1961. Nous aurons l’occasion de tracer l’histoire du général. Mais pour ne pas être long, je présente vraiment mes condoléances à toute sa famille, sa femme et ses enfants. Je prie que Dieu veille sur eux. Qu’ils ne pensent pas que le général est parti et qu’ils sont désœuvrés, Dieu est là. Enfin, Kérékou est une énigme et nous aurons l’occasion de le dire. Merci général pour tout ce que tu as fait pour cette nation et que Dieu t’accompagne.
Ce qu’il faut retenir de cet homme, c’est son courage, un militaire qui a pris le pouvoir et qui a eu le courage de conduire ce pays à la paix, à l’unité nationale qu’il a défendue corps et âme. Un homme qui a été toujours curieux. Le général Kérékou, qui l’eût cru ? Je crois que tous ceux qui l’ont croisé et le connaissent savent que c’est un homme des sciences. Et quand je le dis, ce n’est pas parce qu’il est mort, puisque je l’ai dit avant. Ce que la postérité doit retenir de cet homme, c’est qu’il a construit sa nation, il a marqué l’Afrique et il a marqué le monde. Les archives le prouveront. Et nous aurons l’occasion d’en parler.
Houssou Guèdè : « C’est un homme qui est différent de beaucoup de Béninois »
Je rends hommage à l’homme pour tout ce qu’il a fait pour le Bénin. Pour ceux qui le connaissent bien, c’est un homme détaché, qui est différent de beaucoup de Béninois. Grâce à lui, nous avons une nation. Du nord au sud, de l’est à l’ouest, nous nous sommes sentis appartenir à une nation. Au cours d’officier, on devrait envoyer 30 personnes. Ce n’est pas ce à quoi nous assistons aujourd’hui. On a pris cinq dans chaque département pour qu’on ne fasse pas la différence entre enfants de pauvres ou de riches. C’est comme ça qu’on s’est retrouvé tous élèves officiers. Depuis que nous sommes sortis de l’école chacun de nous se sent appartenir à une seule nation. C’est très important. Tout ce que je peux dire de cet homme, c’est qu’il est un homme exceptionnel dont l’histoire se souviendra.
Benoît Dègla : « Il est l’initiateur de séries de conférences nationale à travers l’Afrique »
Le général Kérékou vient de nous quitter. Ce grand homme a marqué d’une empreinte particulière l’histoire de notre pays. 27 ans de pouvoir, ce n’est pas peu. Mais quand on se réfère à son parcours de militaire révolutionnaire, qui est devenu un homme de paix, qui a su déjouer tous les pronostics, qui a su s’imposer aux pressions de tous genres pour respecter rigoureusement la Constitution de notre pays et préserver la paix. Je crois qu’il nous a légué un héritage que nous ne devons jamais oublier ou bafouer. Il est l’initiateur de série de conférences nationale à travers l’Afrique. Et je crois que de tous ceux là qui ont voulu faire comme lui, il est le seul qui demeure un exemple dans tous les cœurs. C’est avec fierté que lorsqu’on entend parler du général Mathieu Kérékou, on bombe le torse. Parce que c’est un Béninois.
Barthélémy Kassa « …nous avons été formés par le général Mathieu Kérékou »
Vous constatez l’état de deuil dans lequel nous sommes plongés. Je pense que le peuple béninois devrait être dans le même état. Pour la plupart des dirigeants actuels de notre pays, tous, nous avons été formés par le général Mathieu Kérékou. A des moments donnés, on se dit le bon vieux temps, c’est le temps que Kérékou a forgé. C’est le temps qu’il a passé à marquer l’esprit de tous les Béninois. Savoir qu’un tel personnage n’est plus, je pense que c’est difficile à supporter. Il est important, vu tout ce qu’il a fait pour notre pays, de pouvoir le garder en mémoire. Tous les dirigeants à divers niveaux doivent pouvoir s’inspirer de la méthode de gouvernance du pays qu’il a su mettre en pratique. Il faut dire qu’on n’a pas encore fini de comprendre Kérékou, à chaque fois on découvre. Et nous allons encore mieux le découvrir à travers les archives certaines de ses actions et interventions. Je voudrais présenter toutes mes condoléances à la famille Kérékou et à toute la population béninoise.
Ousmane Batoko : « Il a été le président de tous les Béninois »
Je retiens de cet homme, un homme de paix, de vertu, de l’est à l’ouest, du nord au Sud. Il a été le président de tous les Béninois. Mathieu Kérékou a été l’homme de la conférence nationale. Il a su diriger avec beaucoup de sang froid cette conférence nationale. Il nous a sauvé en son temps et a su mener le Bénin à bon port. J’ai eu cet honneur d’appartenir au comité d’organisation de cette conférence nationale, et nous avons vécu toutes les étapes de cette conférence inédite. Aussi, il faut le dire, le général Mathieu Kérékou a été l’homme de la stabilité, une stabilité encore liée à sa longévité. Une stabilité dont le Bénin a longtemps bénéficié et dont nous continuons de bénéficier à travers les différents régimes qui se sont succédé. C’est un héritage que cet homme de paix nous a légué et que nous devons gérer au mieux. Donc, nous pouvons retenir de cet homme de façon générale, l’artisan national, homme d’unité, un homme exceptionnel. Enfin, ce que je voudrais que la postérité retienne de Mathieu Kérékou, c’est sa capacité à s’adapter au changement. Tout s’explique par son patronyme de caméléon. Egalement son amour pour le pays. L’histoire de notre pays, depuis la colonisation jusqu’à l’heure où je vous parle, retiendra que c’est un homme qui a tout donné à son pays. Peu sont ceux-là qui ont marqué l’histoire du Bénin et qui ont aimé le Bénin comme cet homme-là. Voilà à chaud ce que je peux dire de cet homme, le général Mathieu Kérékou, afin que les générations futures sachent qu’il a été réellement un homme exceptionnel.
Padonou Jidjoho : « …C’étaitt un homme d’Etat hors du commun »
C’était un homme d’Etat hors du commun. Homme d’Etat parce que c’était
un gestionnaire de communauté humaine. Je dis ça parce que pendant la période révolutionnaire, ce monsieur est resté au milieu d’un certain nombre de cadres qu’il a pu diriger, et qui voulaient certainement manipuler ce pays comme ils le voulaient. Il a fait ce qu’il pouvait. C’est un homme d’Etat parce que au moment où il a senti que son régime, le régime marxiste n’allait plus, il a eu le courage de tout arrête et de dire qu’il va revoir ce qui n’allait pas. Après, il est revenu et il a fait dix ans. Il m’a offert l’occasion de rester à ses côtés pendant 6 mois et de savoir ce que c’est qu’un poste ministériel. Et c’est en ce moment que j’ai découvert que c’est un bon père de famille qui a dirigé le Bénin comme il le pouvait, avec les cadres qu’il avait. Je dois dire que s’il y a des reproches à faire, c’est plutôt aux cadres qui l’entouraient. Je lui rends un hommage vibrant et je dis à toute sa famille toutes mes condoléances. De cet homme, je vais demander aux jeunes de retenir d’abord l’esprit d’ouverture. C’est parce que Kérékou le voulait que nous sommes restés là. Deuxièmement, la tolérance des autres et troisièmement l’humilité…
Professeur Albert Tévoèdjrè : « Nous devons véritablement nous mobiliser pour que les années qui viennent, nous soyons habités par le bon sens de Kérékou »
Mathieu Kérékou, l’art de savoir s’adapter ; l’art de reconnaître
qu’on peut se tromper, l’avouer et de demander pardon et permettre au changement de s’installer. C’est ce qui a été fait. Nous aurions pu
être une nouvelle Guinée. Nous aurions pu être un pays de tragédie
meurtrière. Cela n’a pas été le cas. Donc, quelles que soient les erreurs
qu’il a pu commettre ou que les gouvernements de Kérékou ont pu
commettre, il a tenté de refuser la corruption quand il a dénoncé les
cadres pourris, (…) Tout ceci nous permet aujourd’hui de nous remettre en cause et de tirer des leçons. Voilà l’homme qui part et nous laisse à réfléchir. Nous devons véritablement nous mobiliser pour que les années qui viennent, nous soyons habités par le bon sens de Kérékou, sa rationalité, sa volonté de servir le pays, sa discipline (…) C’est autant de souvenirs que je garde de lui pour dire que j’ai eu beaucoup de bonheur à travailler avec lui et à promouvoir sous son régime, une notion qui m’est très chère à savoir : la nécessité de conquérir ensemble le minimum social commun… »
Général François Kouyami « Mathieu Kérékou est né sous une bonne étoile »
J’ai reçu l’information autour de 17h 15mn. Je me suis recueilli pour recommander son âme à la divine miséricorde. Nous ne sommes pas des gens parfaits. C’est vrai, le président Mathieu Kérékou a beaucoup souffert. Il a dû expier beaucoup de ses fautes. Ce qui lui reste, c’est ça que j’ai demandé au créateur, de lui faire vivre sa miséricorde. Le général Mathieu Kérékou et moi avions travaillé ensemble pendant de longues années. C’est donc à bon droit que sa disparition doit provoquer en moi un choc. Nous avons connu de très bons moments de collaboration. Nous avons traversé aussi ensemble beaucoup d’épreuves. C’est les bons moments que je garde. Je pense que le général Mathieu Kérékou avait une affection paternelle pour moi. C’est vrai, il n’y a pas trop de différence d’âge entre nous, mais il m’estimait énormément. Malgré les contradictions, malgré les oppositions, il m’a confié de très hauts postes de responsabilité. Et j’ai appris qu’à certains moments, il a eu à défendre ma cause, plusieurs fois. Je lui en suis très reconnaissant. Je lui ai d’ailleurs dit cela. Nous avons repris à nous voir, contrairement à ce que les gens pensent. On rigole, on évoque les vieux souvenirs. Je me réjouis que je me sois réconcilié avec lui avant qu’il ne parte. Notre dernière rencontre remonte à l’élection présidentielle de 2011. Puis après, sa santé s’est dégradée. Il semble qu’on ne permettait plus à tout le monde d’aller le voir. J’ai respecté ce principe de la famille. Mais je prenais de ses nouvelles de temps en temps. Je lui en donnais des miennes aussi. J’ai l’habitude de dire que le général Mathieu Kérékou est né sous une bonne étoile. Il n’est pas mauvais, fondamentalement. Mais la politique est passée par là. Les contraintes politiques ont eu à jouer à certains moments. Mais je retiens de lui qu’il a été un bon chef. Si on met le positif et le négatif sur la même balance, je pense que le positif dépasse de très loin le négatif. Je pense que le peuple béninois doit lui rendre un hommage mérité. S’il avait eu la possibilité de faire tout ce qu’il avait pensé, notre pays ne serait pas aujourd’hui dans cette situation. Mais nul n’est éternel. Il a joué sa partition et mérite aujourd’hui un bon repos éternel. Il faut que le peuple béninois lui en soit reconnaissant.
La rédaction