« Comme le Guépard, nos forces de sécurité et de défense sont appelées à traquer ces hors la loi ( Peul) jusqu’à leur dernier retranchement ». Cette assertion d’un ministre de la République est de nature à activer les humiliations et autres exactions dont la communauté Peule est victime. Une situation qui risque d’entraîner un conflit inter-ethnique dans notre pays si on n’y prend garde. C’est ce qui a poussé un membre de cette communauté à adresser une lettre ouverte au Chef de l’Etat dont ous publions ici l’intégralité.
Monsieur le Président de la République,
Chef de l’Etat,
Chef du Gouvernement
Je voudrais attirer votre attention sur des faits qui, si on n’y prend garde peuvent entrainer un conflit inter-ethniques.
Monsieur le Président de la République
Il y a quelques jours, suite à un incendie qui a décimé un village dans la commune de OUINHI, un ministre de la République parlant des transhumants, a dit publiquement devant une population en furie, donc vulnérable et facilement influençable : « Comme le Guépard, nos forces de sécurité et de défense sont appelées à traquer ces hors la loi jusqu’à leur dernier retranchement ». Ces propos ont été relayés par la presse béninoise et disponible sur le site du gouvernement :
http://www.gouv.bj/content/lutte-co...).
Monsieur le Président de la République,
Depuis plusieurs années, c’est une véritable chasse à l’homme qui est livrée aux éleveurs Peuls et cela du fait de la presse et maintenant les autorités au plus haut niveau s’en mêlent.
Quand on arrête et présente des braqueurs, on ne donne pas leur ethnie, mais on dit que ce sont des Béninois, des Nigérians sauf si c’est des Peuls.
De ce fait, les propos du Ministre sont la goutte d’eau de plus qui pourrait faire déborder le vase d’autant plus que le physique et les traits des Peuls permettent de les identifier facilement.
C’est une véritable chasse à l’homme qui est lancée et qui met notre pays sur une véritable pente glissante et qui implique directement nos forces de sécurité sensées assurer la sécurité de tous les béninois. Car, rappelons-le les transhumants dont il est question sont des citoyens béninois comme tout autre. Ainsi, lorsqu’un conflit naît, le bon sens voudrait qu’une enquête soit menée de façon impartiale et que les responsabilités soient situées avant toute déclaration.
La communauté Peule au Bénin est déjà victime de nombreuses humiliations et brimades par les populations et les forces de l’ordre à cause de la mauvaise publicité qui leur est faite par certains médias et certaines autorités.
Pourtant, la communauté Peule, présente dans la plupart des pays africains et dont la langue est la troisième langue la plus parlée en Afrique (après le Swahili et le Haoussa) est connue pour sa noblesse, sa loyauté et ses valeurs et ne saurait être sauvage comme on veut le faire croire au Bénin.
Il y a certes des brebis galeuses comme dans toute communauté humaine et chaque individu peut agir d’une façon ou d’une autre selon les circonstances qui lui sont imposées et ce fait ne devrait en aucune manière être l’occasion de qualifier toute une communauté de « hors la loi ».
C’est pour cela, il serait souhaitable :
Qu’une enquête indépendante soit menée afin de trouver les auteurs et de les punir conformément aux lois en vigueur ;
Qu’on encadre l’activité de transhumance en informant suffisamment les différents acteurs sur la nécessité de respecter les couloirs prévus à cet effet s’ils existent toujours ;
Que la presse évite de relayer les propos bruts des populations et de lier les malfrats à leur ethnie d’origine afin d’éviter d’alimenter les conflits inter-ethniques ;
Monsieur le Président de la République,
En prenant les dispositions nécessaires pour éviter que cette situation perdure et ne dégénère en conflits inter-ethniques comme ce fut le cas au Burundi, au Rwanda, …, vous aurez contribué à ramener la quiétude et la sérénité au sein de la communauté Peule au Bénin.
Je vous prie de croire, Monsieur le Président de la République, en ma profonde considération.