Alors que le Bénin s’apprête à élire un nouveau président en février prochain, des activistes de plusieurs bords politiques et des organisations syndicales, à l’initiative de l’ancien président de la république, Nicéphore Soglo, se sont retrouvés dans la salle Missio allemande du Chant d’oiseau de Cotonou pour analyser la situation politique que traverse le Bénin. La question de la candidature du premier ministre Lionel Zinsou a été passée au peigne fin.
L’inquiétude se lisait sur les visages. Présidents et membres de partis politiques, anciens ministres et candidats à la présidentielle prochaine ont pris part à cette rencontre historique. Au centre des débats, la candidature du premier ministre Lionel Zinsou comme porte-flambeau des FCBE à la présidentielle de 2016. Un choix imposé par le chef de l’Etat, le président Boni Yayi, et qui ne fait pas l’unanimité au sein de la classe politique. On dénonce une autre forme de colonisation du Bénin par le biais d’un binational (un Franco-Béninois) qui connaît à peine le pays qu’il veut diriger. A l’ouverture de cette grande rencontre, Nicéphore Soglo n’a pas manqué d’afficher son désarroi au sujet de cette situation qui impulsera un autre tournant à la vie politique béninoise. « C’est à nous de choisir qui doit nous gouverner. La période du néocolonialisme est terminée », a-t-il déclaré. Sur sa lancée, il a rappelé à l’assistance qu’il est temps, pour le Bénin, de jouer son rôle dans la bataille économique et sociopolitique que mène le continent, en comptant sur ses propres forces. « Notre pays est dans une mauvaise situation, et personne ne doit se substituer à l’autre », a-t-il rappelé. En vue de sauvegarder la constitution, Nicéphore Soglo a convié les acteurs à s’investir dans les échanges devant aboutir à des suggestions pour permettre au nouveau président de respecter les clauses définies pour le développement de la nation. Prenant ensuite la parole, les présidents de partis ont dénoncé le parachutage de Lionel Zinsou avant d’inviter les autorités françaises à prendre leurs responsabilités face à cette situation. Cette rencontre a aussi permis aux acteurs politiques de se prononcer sur plusieurs autres situations telle que la campagne électorale qui, pour certains partis, a démarré depuis plusieurs mois avec pour recours financiers les moyens de l’Etat, la périlleuse situation économique que traverse le Bénin et qui n’épargne pas les autres nations, et aussi, la vie des partis politiques et de leurs militants en perte de confiance, de patriotisme et qui se laissent dominer par l’argent.
Ils ont dit
Mathurin Nago, ancien président de l’Assemblée nationale
« La France doit faire un communiqué officiel pour dire qu’elle n’est mêlée ni de loin ni de près à la candidature importée du français Lionel Zinsou »
« Le Bénin a un peuple de génie au regard des nombreuses contingences et difficultés. Pour exemple, nous avions été confrontés à la dictature par la révision de la constitution et après plusieurs échanges, nous avons eu le dessus. L’élection présidentielle qui avance est d’abord une victoire puisqu’elle respecte la constitution. Mais, l’événement qui risque de se produire est la présentation d’un certain candidat. Ce n’est pas un problème de peau qui se pose mais plutôt un problème politique et de concertation entre les deux pays. La France et le Bénin sont des pays frères qui doivent coopérer, et il n’est pas souhaitable que les dirigeants béninois, quels que soient leurs postes, prennent des risques du genre. En faisant la promotion de Lionel Zinsou, on a même entendu certains dire qu’il doit passer, car c’est la France qui en a décidé ainsi. Si tel n’est pas le cas, j’invite les autorités françaises à dénoncer ces déclarations et à prendre leurs responsabilités. La France est appelée à faire un communiqué officiel tant à l’international qu’au Bénin pour dire au peuple béninois qu’elle n’est mêlée ni de loin ni de près à cette machination qu’est la candidature importée de Lionel Zinsou à l’élection présidentielle de février prochain. Je plaide pour que les autorités françaises se prononcent afin que les relations entre le Bénin et la France redeviennent ce qu’elles étaient, car, j’ai peur que le peuple se lève comme un seul homme pour combattre cette candidature ».
Dieudonné Lokossou, secrétaire général de la CSA-Bénin
« Si Zinsou passe, on bloque le pays et personne ne travaillera »
« La candidature de Lionel Zinsou ne m’étonne pas. S’il passait, on bloque le pays et plus personne ne travaillera. Les partis politiques ont failli à leur mission, et le régime en place a divisé les différents groupes qui existaient »..
Richard Sènou, ancien ministre de Boni Yayi
«Boni Yayi prépare un autre K.O au premier tour de l’élection présidentielle de 2016, ce qui n’arrivera pas »
« C’est une rencontre de l’action et du destin. Personne n’en veut à un homme mais personne ne peut se pencher sur notre politique actuelle. Boni Yayi prépare un autre K.O au premier tour de l’élection présidentielle de 2016, et s’il n’y a pas de fraude, je crois que cela n’arrivera pas. Nous devons le dénoncer pour décourager ce qui va se passer en février prochain. La candidature que nous combattons n’est pas contre une personne mais contre un système »..
Rastel DAN (Coll.)