Au fur et à mesure que la présidentielle du 28 février prochain destinée à désigner le successeur de Boni Yayi approche, les activités politiques s’intensifient sur le terrain. Mardi 5 janvier, c’était Nicéphore Soglo, ancien président de la République, assisté de plusieurs personnalités dont Albert Tévoédjrè, Mathurin Nago, a organisé une concertation pour dire non au pouvoir de l’argent et à la recolonisation. La rencontre tenue au «Chant d’oiseau» a, entre autres, connu la présence de nombreux acteurs de la vie sociopolitique du Bénin.
« Quand il y a des problèmes dans une maison, il faut se retrouver pour se parler». Ainsi s’exprimait l’ancien président de la République Nicéphore Soglo, initiateur de la rencontre, pour la situer dans son contexte.
Nicéphore Soglo a déclaré avec un ton grave que «depuis la conférence des forces vives de février 1990, nous n’avons jamais eu le sentiment que notre pays pourrait courir un tel danger». Ce constat est fait, a-t-il précisé, par beaucoup de personnalités du pays et même de l’extérieur dont des chefs d’Etat qui l’interpellent. La preuve, c’est que depuis quelque temps, le Bénin s’est retrouvé «dans une mauvaise situation sur tous les plans». Au niveau économique, il a noté que le pays ne donne pas une bonne image à cause de certains scandales financiers. L’autre grave problème, a-t-il poursuivi, c’est le relâchement de la moralité. A l’en croire, «un responsable a l’obligation de donner le bon exemple». Mais le constat est tout le contraire. Sur le plan politique, surtout à l’approche de la présidentielle de février prochain, des dérives notoires sont enregistrées. A ce propos, il a dénoncé la circulation de l’argent, la ‘’recolonisation’’. «La maturité politique du Bénin l’autorise à choisir lui-même son président. Nous ne sommes plus en période coloniale», a-t-il dit avec vigueur avant de se dire nostalgique du temps des Apithy, Maga et Ahomadégbé. Aujourd’hui, ceux qui sont sensés animer la vie politique sont mis entre parenthèses et l’on constate d’autres acteurs.
Saisir Ban Ki Moon
Ces constats ne sont pas démentis par le professeur Albert Tévoédjrè pour qui «l’homme de consensus qu’est Nicéphore Soglo a bien des raisons de s’indigner de la situation». Selon lui, le pays est devenu comme sans boussole et la prochaine élection présidentielle lui apparaît comme une période de tous les dangers pour la jeune démocratie béninoise qui continue de chercher ses marques. Pour lui, cette échéance doit être l’occasion de «nous affirmer pour ne pas opérer un recul, synonyme de reniement de soi». Face à une certaine candidature, a-t-il laissé entendre, «tout se passe comme si on invente pour nous une forme de dévolution du pouvoir en imposant un candidat officiel».
«Cher président Nicéphore Soglo, je suis à votre disposition pour que nous écrivions officiellement à Ban Ki Moon et à toutes institutions compétentes en Afrique et sur le plan mondial pour que l’usage illégal des institutions, du personnel, des moyens de transport et des biens de l’Etat soit proscrit», s’est indigné Albert Tévoèdjrè.
Au-delà des deux, beaucoup d’autres personnalités sont intervenues pour faire les mêmes constats. Mieux, elles ont fait des suggestions à la France. Mathurin Nago, ancien président de l’Assemblée nationale, a souligné qu’il ne s’agit pas d’une question de peau mais d’un problème politique. Aussi a-t-il demandé aux autorités françaises de se désolidariser de la promotion d’une certaine candidature si leur pays était réellement impliqué. Elles doivent le faire à travers, a-t-il indiqué, un communiqué largement diffusé dans divers médias. L’avenir des relations entre le Bénin et la France en dépend, selon lui. A la suite de ses propos, d’autres interventions sont allées dans le même sens et dénoncé en plus la façon dont l’argent a tendance à prendre le pas sur les débats d’idées dans la perspective de la présidentielle de février prochain.
La rencontre devait accoucher d’un rapport comportant les résolutions retenues pour conjurer le mal afin qu’après l’élection se déroule dans de bonnes conditions?
Alain ALLABI