Sa réaction était attendue après que son parti a décidé à la grande surprise de s'aligner derrière Lionel Zinsou pour l'élection présidentielle du 28 février 2016. Adrien Houngbédji, président de l'Assemblée nationale et du Parti du renouveau démocratique (Prd) - le plus grand parti d'opposition au pouvoir de Boni Yayi depuis 2006 - s'est justifié ce jeudi 28 janvier dans un entretien télévisé. Face à deux journalistes de la télévision nationale, Adrien Houngbédji s'est expliqué en évoquant comme raison principale, la résolution de son parti à ne plus être opposant.
Il rappelle que le Prd anime la vie politique du Bénin depuis 25 ans dont 23 dans l'opposition. Adrien Houngbédji a échoué à se faire élire président à toutes les cinq élections présidentielles depuis 1991. Le président du Prd concède alors que son parti n'a pas les moyens de conquérir seul la magistrature suprême. Il choisit alors de s'allier avec un "candidat le mieux placé" en 2016. Mais alors pourquoi choisir Lionel Zinsou, le candidat de la coalition Forces cauris pour un Bénin (Fcbe) que le Prd a combattu ? Depuis l'annonce de la formation de l'alliance, le Prd et son président font l'objet de vives critiques dans l'opinion. Adrien Houngbédji ne s'en offusque pas. Il reste égal à lui-même dans son opposition à Boni Yayi - dont il conteste la légitimité : "En 2011, c'est nous qui avons gagné. Jusqu'à ma mort je le dirai, c'est nous qui avons gagné", a martelé plusieurs fois le sérieux adversaire de Boni Yayi depuis 2006. Cependant l'homme assume son choix de soutenir le candidat Lionel Zinsou porté par le chef de l'Etat sortant :
"Nous avons créé le parti pour pouvoir arriver à assumer les responsabilités au sommet de l'Etat. Nous n'avons pas réussi (...). Le Président Yayi Boni s'en va (...). Est-ce que nous allons continuer notre opposition vis-à-vis de celui qui va arriver après ? Notre opposition s'arrête à Yayi Boni. Ce qui arrive après Yayi Boni, ça regarde Lionel Zinsou".
Une alliance du Prd avec le Fcbe est pourtant inimaginable tant tout ou presque oppose ces deux formations politiques. Seul l'avenir semble intéresser Adrien Houngbédji :
"Nous ne sommes contre personne, mais nous voulons participer à la gestion du pouvoir d'Etat en 2016. Pour nous celui, qui a les meilleures chances, c'est celui qui est soutenu par Fcbe, qui est la première force politique du pays".
En se mettant ensemble avec les Fcbe, le Prd tourne dos à la coalition de l'opposition qui a porté Adrien Houngbédji à la tête de l'Assemblée nationale dans la nuit du 20 mai 2015. Cette coalition n'existe plus, a fait observer le président du Prd. L'"Union fait la Nation" qui en était un membre important a échoué à désigner en son sein un candidat unique. Houngbédji refuse alors d'être accusé de trahison. Les autres candidats qui auraient pu prétendre au soutien du Prd fort de 10 députés au parlement en prennent aussi pour leur grade. Adrien Houngbédji les évalue et affirme comme un devin qu'ils n'ont pas de chance d'être élus :
"Nous ne représentons que 20 % de l'électorat et pour arriver à être président, il faut avoir 50 %. M. Talon ne représente pas ça, M. Ajavon ne représente pas ça, M. Koupaki ne représente pas ça. Alors nous nous ne voulons pas gaspiller nos voix à voter pour des gens qui n'ont pas des chances d'être élus".
Adrien Houngbédji se méfie particulièrement de Patrice Talon et Sébastien Ajavon, deux puissants hommes d'affaires en course à la présidentielle. Pour lui, leur candidature soulève des craintes :
"Ce que nous craignons tout simplement, c'est la confusion des genres avec le désordre que cela amène (...) Nous ne voulons pas que le chef de l'Etat soit un commerçant parce que s'il est un commerçant, ça va créer du désordre (...), il n'y aura plus de la bonne gouvernance, il y aura de la corruption généralisée".
Le Parti du renouveau démocratique tient sont conseil national ce samedi 30 janvier à Porto-Novo. C'est ce conseil national qui doit "entériner" le choix de Lionel Zinsou décidé par la direction exécutive du parti avant que le Premier ministre ne reçoive l'onction officielle du Prd.