Une semaine de prolongation pour maximaliser les chances de gagner la course à la Marina ou une semaine pour définitivement perdre ses illusions ? Devant l’évidence du report du scrutin du 28 février au 6 mars 2016 consacrée par la décision Ep 16-019 du 11 février de la Cour constitutionnelle, il est indéniable qu’il en découlera diverses conséquences pour les candidats à la présidentielle de 2016. Car, si pour quelques candidats logés dans le starting-block, ce décalage d’une semaine peut s’avérer très bénéfique, la plupart des prétendants sont plutôt partagés entre appréhensions et indifférence. Entre conséquences politiques, financières et sociales, le report de l’élection présidentielle au 6 mars prochain fera des heureux et des victimes.
Mais avant l’heure du décompte, sur le terrain, il faut déjà s’attendre à la prolongation de la précampagne. Ainsi, les tractations se poursuivront. Le report déchaînera la course aux alliances et aux déclarations de soutien. En une semaine, des clubs électoraux, mouvements et autres associations de soutien feront leur apparition. Et comme dans une vente aux enchères, des acteurs politiques se feront débaucher. Il en sera ainsi surtout au sein des conseils communaux où plus que jamais, ce sera une rude bataille pour la conquête et le débauchage des élus locaux.
Le nerf de la guerre ou l’éclipse !
Ensuite, sur le plan financier, les candidats et leurs soutiens ressentiront le report du premier tour de la présidentielle. Ainsi, comme dans une jungle, seuls les candidats qui ont vraiment la politique de leurs moyens pourront faire face aux dépenses liées à la poursuite de la précampagne et des tractations. En effet, dans un contexte où l’idéologie n’a pas droit de cité et où le nerf de la guerre prime sur tout, seuls les candidats ayant une large capacité financière pourront continuer de recruter de soutien et même débaucher au détriment des candidats de seconde zone. Ce qui est sûr, avec cette précampagne éprouvante, le temps est un bon allié pour les candidats milliardaires à l’instar de Lionel Zinsou, Patrice Talon et Sébastien Ajavon. Pour les candidats moins nantis comme Pascal Irénée Koupaki, Abdoulaye Bio Tchané, Fernand Amoussou et leurs états majors, les risques d’essoufflement financier et de manque d’énergie pour le sprint final sont très grands.
Enfin, sur le plan social, le report est une menace à la sérénité et à la quiétude des acteurs. A tout moment, la tension prolongée peut dégénérer. Le risque de déchirement est d’autant plus grand qu’à chaque jour qui nous sépare de l’élection, certaines personnalités s’adonnent à des actes liberticides. Déjà, pendant cette période de précampagne, il est à dénoncer le sabotage du siège du candidat Patrice Talon à Natitingou et l’interdiction de meeting par la préfète Salamatou Kora épouse Ponou des départements de l’Alibori-Borgou alors qu’un candidat de la rupture, en l’occurrence Sébastien Ajavon séjournait dans la localité.
Mais tout comme en 2011 où de report en report, les électeurs ne sont allés aux urnes que le 13 mars, les Béninois vont espérer qu’ils n’en arrivent pas à ce scénario. N’empêche qu’il faut déjà s’inquiéter face à ce piteux tableau pour un corps électoral convoqué depuis un an. Trop de faux pas et de fausses notes. A ce rythme, il faut craindre que spécifiquement sur le plan social, les reports n’en arrivent pas un jour à avoir raison du climat de paix qui a souvent caractérisé les élections au Bénin. Bref, ce report ne nous sort pas des incertitudes et en rajoute à la psychose. Car, à jouer avec les nerfs des populations et à force de s’amuser avec le feu, si on n’y prend garde, on finit toujours par se faire brûler.
Angelo DOSSOUMOU