Ne laisser personne sur le bord de la route. Tel est le credo des projets d’électrification à base d’énergies renouvelables relevant de la mise en œuvre des Objectifs du millénaire pour le développement (OMD) et des Objectifs de développement durable (ODD). Parmi ces projets figure le Projet valorisation de l’énergie solaire (Proves) destiné à apporter de la lumière aux couches défavorisées des zones non couvertes par le réseau électrique conventionnel. En cours de réalisation, le Proves fait déjà des merveilles dans le rang des marginalisés de Cotonou et d’Abomey-Calavi.
La lumière change en bien la vie des populations marginalisées. Grâce aux lampadaires solaires, diverses artères et rues de Cotonou et d’Abomey-Calavi sortent des ténèbres et la vie des populations riveraines en est améliorée.
Revendeur de matériel électrique à Zongo, Moctar Adamou, tire profit des lampadaires solaires. Il assure qu’avant la pose des lampadaires, il rangeait déjà à 19h ses marchandises pour rentrer. Pendant ce temps, il faisait une recette journalière d’au plus 15 000 F CFA. Mais aujourd’hui, il rentre à 23h avec une recette de 30 000 par jour. «Lampadaire-là, c’est très bon quoi !», témoigne-t-il tout souriant dans son français approximatif avec un accent nigérien. En dehors des retombées économiques de ce projet, les populations en tirent d’autres avantages.
Toujours à Zongo, quartier réputé pour l’insécurité qui y règne, Kadidjatou Doukouré, vendeuse de salade, de riz et de frites, mène son activité sous un lampadaire solaire. «Avant les lampadaires, je me débrouillais avec une petite torche pour servir mes clients et sur la table à manger des clients j’allumais des bougies», se rappelle-t-elle en se disant très heureuse de l’avènement des lampadaires. Son bonheur, c’est qu’elle ne rentre plus à 23h avec des invendus. Sans vouloir révéler de façon précise ses recettes journalières, Kadidjatou confie qu’elle fait de bonnes affaires en rentrant désormais à 1h du matin. Son client Issiaka Saka, surpris à table devant un plat de pâte alimentaire accompagné de pain, confie qu’il mange désormais en toute quiétude. L’obscurité dont profitaient les malfrats dans ce quartier a cédé place à la lumière et la sécurité règne», témoigne-t-il en montrant de la main gauche le lampadaire éclairant sa table.
Les bienfaits des lampadaires sont également magnifiés à Agla, dans la zone aéroport, Godomey magasin, Zogbohouè, Akpakpa-Dodomè, Avotrou, pont de Fifadji, comme dans certains quartiers d’Abomey-Calavi. Les jeunes d’Agla Mosquée ne sont plus envahis par l’ennui du soir. Ils tirent profit des lampadaires solaires pour organiser des jeux dont celui de dame auquel ils s’adonnent jusqu’à une certaine heure avant d’aller au lit.
Quant à Rosalie Sanganlogoun, vendeuse de poissons frits au carrefour Tankpè, elle a fait savoir que ces lampadaires ont fait beaucoup de biens à la localité en général et à chaque résident en particulier. En ce qui la concerne, elle ne dépense plus pour l’achat de pétrole de lampe. «Avant, je prenais un demi-litre de pétrole chaque nuit pour éclairer mon étalage. Mais aujourd’hui, je n’en achète plus. C’est vraiment bon», se réjouit-elle .
De l’énergie pour les marginalisés
L’installation des lampadaires solaires s’inscrit dans le cadre de la mise en œuvre du Projet valorisation de l’énergie solaire (PROVES), explique Fulbert Amoussoga Géro, ministre à la présidence de la République chargé de la Coordination des politiques de mise en œuvre des Objectifs du Millénaire pour le développement (OMD) et des Objectifs de développement durable (ODD). Ce projet, souligne-t-il, fait partie des trois projets du volet énergies renouvelables qui constituent l’objectif numéro 7 des ODD qui porte sur l’environnement et le cadre de vie. C’est le ministère des OMD-ODD qui est en charge du suivi de la mise en œuvre de l’implantation de l’énergie renouvelable. Pour Fulbert Géro Amoussouga, «ce projet permet d’apporter la lumière aux marginalisés». Le credo essentiel de la lutte contre la pauvreté, c’est de « ne laisser personne sur le bord de la route (du développement)», révèle-t-il. Dans ce cadre, l’énergie apparaît comme un des éléments susceptibles de donner du pouvoir aux pauvres. Car, justifie le ministre Géro Amoussouga, avec l’énergie les enfants des pauvres pourront étudier et eux-mêmes pourront mener leurs activités économiques sans difficulté. Le coût du Proves, d’une durée de six ans, est de 50 milliards de FCFA financé sur un prêt de la Banque ouest-africaine de développement(Boad), informe le ministre.
Selon Largum Madougou, directeur de l’efficacité énergétique à l’Agence nationale pour le développement des énergies renouvelables (Anader), l’agence est le maître d’ouvrage du Proves dans le cadre duquel les lampadaires ont été installés. S’agissant de la genèse du projet, il fera savoir qu’il a été initié pour, d’une part, l’installation de 15000 lampadaires solaires sur toute l’étendue du territoire national. Et d’autre part, pour l’installation des mini-centrales solaires. « Au total, 105 mini-centrales solaires dont la puissance varie entre 40 et 50 kilowatts photovoltaïques sont prévues», précise Largum Madougou. Ce projet est mis en œuvre pour contribuer à combler le déficit énergétique dont souffre le Bénin et surtout à fournir de l’énergie aux couches les plus défavorisées. «Cela permet d’augmenter quelque peu le taux d’électrification au Bénin et satisfaire les couches isolées du réseau conventionnel d’énergie électrique», souligne-t-il.
Armelle Assongba, ingénieur au groupement African Solar Energy et Miert international (Asemi) et responsable du Projet de valorisation de l’énergie solaire (Proves), assure que c’est ce groupement qui se charge d’exécuter les travaux à Cotonou et dans le Mono. A Cotonou, poursuit-elle, 2500 lampadaires sont prévus et 1250 pour le Mono-Couffo et les travaux sont en cours. Actuellement, sa structure est à plus de 1600 lampadaires posés dans la seule ville de Cotonou alors que dans le Mono, le chiffre 600 est déjà dépassé. Les quartiers couverts à Cotonou, selon elle, sont Zongo, Akogbato, la zone de l’aéroport, la Place des Martyrs, Misséssin, Avotrou, Yagbé, Zogbohouè, Agla. Elle ne manque pas de mentionner certains commissariats et paroisses catholiques de Cotonou qui ont reçu des lampadaires pour sortir de l’obscurité.
Par rapport à la qualité du matériel, Armelle Assongba a rassuré que les travaux sont sous garantie de cinq ans à compter de la date de leur réception provisoire.?
Alain ALLABI