Les Béninois ont pris date en ce qui concerne les grands enjeux de la démocratie. En témoigne certaines coïncidences des deux dernières décennies et dont Mgr Isidore de Souza et la Cour Constitutionnelle en sont des piliers fondamentaux. En effet, ce n’est pas pour la première fois que la Cour Constitutionnelle rend une décision sur les résultats du premier tour de l’élection présidentielle un 13 mars. Déjà en 1996, par sa décision El-P 01-043 du 13 mars 1996, Conceptia Ouinsou proclamait qualifiés Mathieu Kérékou et Nicéphore Soglo pour le second tour de la présidentielle de 1996. Vingt ans après, c’est le tour de Théodore Holo de rendre ce dimanche 13 mars la sentence du premier tour de la présidentielle de 2016. Des résultats provisoires qui propulsent Lionel Zinsou et Patrice Talon au second tour.
Une autre coïncidence qu’il faudra aussi mettre en exergue, c’est la célébration ce 13 mars du 17e anniversaire du décès de Mgr Isidore de Souza, ancien Président du Haut Conseil de la République. Il s’agit d’une institution qui a laissé place à la Cour Constitutionnelle. Ce n’était pourtant pas programmé d’avance que les Béninois devraient avoir les résultats du scrutin du 6 mars ce dimanche. Les populations s’attendaient plutôt à avoir la proclamation des résultats par la Cour depuis le vendredi. Certains ont presque veillé la nuit du samedi pour cela. Mais il faudra attendre le 13 mars, pour voir la Cour Constitutionnelle confirmer les tendances proclamées par la Commission électorale nationale autonome. Alors, il s’agit d’un drôle de hasard qui a tout son sens dans une présidentielle pleine de suspicions et d’enjeux.
Le Prélat n’est jamais loin
Nul n’ignore le rôle qu’a joué Mgr Isidore de Souza dans l’avènement de la démocratie au Bénin. Le prélat a l’art de la consultation, de la négociation, et de diplomatie utile qui en a été pour beaucoup pour une sortie de crise en 1990. Et même après sa mort, l’ombre de Mgr de Souza plane encore sur la démocratie béninoise. On se rappelle en 2011, alors que l’on redoutait des scènes de violences du fait du cafouillage dans l’organisation des élections et de l’indisponibilité des cartes d’électeurs, la présidentielle a été apaisée. Là encore, elle se déroulait le 13 mars lors du 12e anniversaire du décès du prélat, après un report d’une semaine. Ainsi, le Poète Birago Diop aura raison de croire que les morts ne sont jamais morts et qu’ « ils sont dans l’ombre qui s’éclaire et dans l’ombre qui s’épaissit ». De là-haut, une fois encore Mgr Isidore de Souza semblait prier sans cesse : « Plaise au ciel, qu’aucun bain de sang, ne nous éclabousse et ne nous emporte dans ses flots ».
Fulbert ADJIMEHOSSOU (Coll.)