Aggravée depuis 27 mars 2015, avec le retrait de l’agrément à la Fédération béninoise de football (FBF) par le ministère en charge des Sports, la crise qui secoue les acteurs de la grande famille du cuir rond au Bénin est loin de connaître son dénouement. Le processus de réconciliation mis en œuvre par le Comité de normalisation (Conor) installé le 9 novembre 2015 par la Fifa a reçu du plomb dans les ailes, avec l’ordonnance prise vendredi 1er avril dernier par le président par intérim du Tribunal de première instance de Porto-Novo, d’interdire la tenue du Congrès électif de la fédération, où que ce soit sur toute l’étendue du territoire national, jusqu’à nouvel ordre.
Le processus lancé dans l’esprit de réconcilier les acteurs de la famille du football béninois est une œuvre de longue haleine. Une réalité dont le Conor, qui a été investi de cette mission par la Fifa, apprend chaque jour à s’en convaincre. Il faudrait que les acteurs concernés affichent à leur niveau, la volonté d’être réconciliés. Ce qui est loin d’être le cas avec le dernier développement qu’a connu cette crise, vendredi 1er avril dernier, suite à l’ordonnance prise par le président par intérim du Tribunal de première instance de Porto-Novo, interdisant l’organisation du Congrès électif du Comité exécutif de la Fédération jusqu’à nouvel ordre. Si chaque acteur devrait continuer à poser des actes compromettant le processus, ce serait tout le temps l’éternel recommencement.
La tenue des assises sur le football béninois constitue pour le Comité de normalisation (Conor) que préside Me Rafiou Paraïso, une condition sine qua non avant l’organisation du Congrès électif du nouveau Comité exécutif de la FBF. Elle appelle des investissements financiers essentiels et énormes. Ce dont le Conor ne disposait pas et ne pouvait mobiliser tout seul, sans recourir au gouvernement. Il était donc dans l’attente de ces ressources financières, aux fins de convoquer ces assises. Ainsi, comme on a pu s’en rendre compte, elles ont été reportées à plusieurs reprises. Une première fois, elles étaient prévues pour les 12 et 13 mars derniers, puis une deuxième, le 28 mars.
Depuis jeudi 31 mars dernier, n’ayant pas obtenu le financement qu’il espérait, le Conor s’est réuni et avait en toute responsabilité décidé de les repousser et de façon conséquente, le Congrès électif, vu que le délai était très court pour les tenir et rattraper le programme qu’il s’était proposé. Alors, comment croire qu’une décision, soit-elle du Tribunal de première instance de Porto-Novo, puisse être la raison du report du Congrès électif du Comité exécutif de la FBF.
En effet, vendredi 1er avril dernier aux environs de 18heures, le président du Conor, Me Rafiou Paraïso, a reçu un pli adressé à la FBF. Ce pli venait d’un huissier qui a notifié à la FBF représentée en la personne du Conor, une ordonnance qui a été rendue par le président par intérim du Tribunal de première instance de Porto-Novo et qui interdisait l’organisation dudit Congrès électif jusqu’à nouvel ordre sur toute l’étendue du territoire national.
C’est à croire que le juge ne s’est pas souvenu de cet arrêt principe de la Cour suprême. A l’époque, c’était Me Rafiou Paraïso qui était l’avocat du Comité exécutif de la FBF alors dirigée par Moucharafou Anjorin et auquel appartenait Augustin Ahouanvoébla.
Un non évènement
Se fondant sur les textes de la Fifa, de la Caf et de la FBF, cet arrêt a reconnu qu’aucun litige relevant du football ne peut être soumis et ne peut être connu des juridictions étatiques. Rendu le 21 décembre 2012 par la Cour suprême, il avait permis de casser l’arrêt de la Cour d’appel qui reconnaissait l’élection de Victorien Attolou comme président du Comité exécutif de la Fédération. Il avait fait table rase de tout ce qui s’était passé jusque-là.
En effet, par Arrêt n° 2012-09/CJ-CM du 21 décembre 2012, la Chambre judiciaire de la Cour suprême a cassé et déclaré nul en toutes ses dispositions l’Arrêt n° 25/12 rendu le 12 juillet 2012 par la Cour d’appel de Cotonou et a remis « »la cause et les parties dans l’état où elles se trouvaient avant la saisine du Tribunal de première instance de Première classe de Porto-Novo par Victorien Attolou, Sylvain Lawson et Bernard Hounnouvi. Grâce à cet arrêt, le Comité exécutif de Moucharafou Anjorin avait donc été rétabli dans ses droits. Ce qui lui a permis de continuer et de finir son mandat.
Par rapport à la nature de la procédure ayant abouti à la reddition de l’ordonnance, il ne s’agit que d’une procédure « d’un juge à une seule oreille ». Elle est initiée par une partie qui estime qu’il y a une urgence et un péril qu’il faut vaincre. Aussi, saisit-elle le juge par une requête. Après l’avoir écouté, le juge donne la possibilité à l’autre partie de venir vers lui pour que, s’il y a des éléments qui appellent de sa part la possibilité de rétracter l’ordonnance, qu’ils puissent lui être exposés. Si le juge chargé du dossier avait eu à en connaître son fond, il se serait rendu à l’évidence de ce que, ce qu’un juge supérieur de la Cour suprême a décidé et qui constitue désormais une jurisprudence, ne peut être remis en cause par un juge d’une juridiction inférieure. Ce qui a été dit par le juge supérieur s’impose au juge d’instance.
Ailleurs, pour des actes similaires posés par des personnes ayant été ou continuent d’être membres de l’une de ses associations nationales, l’instance faîtière du football mondial s’était vu obligée de les sanctionner.
En effet, il est formellement interdit aux personnes physiques ou morales membres de ses associations nationales affiliées, de porter devant les juridictions étatiques les litiges liées au football. Toute personne qui en a la bonne foi peut être exemptée, mais pas celle qui est avisée et par surplus, est imprégnée de cette interdiction.
La situation née, vendredi 1er avril dernier, avec cette décision de justice rendue par le Tribunal de première instance de Porto-Novo vient en ajouter à la crise, alors que le mandat du Conor appelé à travailler pour son dénouement, arrive à terme le 30 avril prochain. En l’état actuel, la situation autour du football béninois devient davantage confuse. Ce serait l’enlisement total, si elle devrait persister. Du coup, tous les regards seront une nouvelle fois tournés vers la Fifa. Qu’est-ce qu’elle décidera ? commence-t-on déjà par se demander dans la plupart des milieux sportifs. Parlera-t-elle d’immixtion. Et si elle aboutissait à cette conclusion, quelle va être la sanction au moment où les Ecureuils du Bénin nourrissent de sérieuses ambitions pour la qualification à la phase finale de la Can Gabon 2017 ?