A la Société nationale de la commercialisation des produits pétroliers (Sonacop), l’inspection démarre déjà avec des difficultés. Selon les premières informations qui nous sont parvenues, des personnes proches de l’inspection générale du ministère du commerce hier soir, les conditions ne sont pas bonnes pour un travail bien fait dans les délais prévus. Il se pose un problème d’accès à l’information et aux documents de cette société d’Etat.
Au terme de nos échanges hier avec un cadre proche de l’équipe d’inspection dépêchée par l’Inspection générale du ministère, on retient que les responsables suspendus ne sont pas en mesure de fournir certains renseignements à eux demandés, faute d’accès à leurs bureaux respectifs. Les informations que recherche l’Igm ne peuvent pas être fournies réellement tant que Irenée Agossa et ses trois collègues suspendus n’accèdent pas à leurs bureaux. Cette situation constitue un blocage pour le contrôle voulu par l’autorité. Alors, l’Igm devra travailler sans tenir compte des éventuelles informations à recueillir au niveau de ces quatre responsables suspendus et dont les bureaux sont mis sous scellé.
Par ailleurs, on apprend que l’Inspection générale du Ministère a reçu une feuille de route qui lui demande de vérifier la gestion de la Sonacop depuis 2013 à 2016. Or, l’équipe en place et suspendue récemment a été installée vers fin 2014 et n’est comptable que de la gestion de l’année 2015 et des quelques mois déjà parcourus dans l’année en cours. C’est d’ailleurs cette équipe qui a pourvu aux postes de commissaires aux comptes de cette société.
L’Igm n’aura d’autres choix que de travailler avec les commissaires aux comptes et des agents de cette société (mais sans pouvoir accéder à certains documents importants). Autre possibilité, le Ministre Lazare Sèhouéto pourrait autoriser l’huissier de justice à enlever les scellés pour permettre aux intéressés d’aller dans leurs bureaux répondre aux questions à eux posées.
Le Bénin menacé par une grande pénurie
A la direction générale de la Sonacop, cette suspension des principaux responsables produit déjà ses effets et la suite risque d’être mauvaise pour les usagers de la Sonacop si rien n’est fait au plus vite. Les stocks existants finissent déjà. Ceux qui sont en attente au port de Cotonou sont bloqués car la douane attend le paiement des frais de dédouanement avant toute sortie. Au même moment, Ecobank, partenaire financier de la Sonacop, hésite déjà à poursuivre sa collaboration, faute de répondant direct. Pendant ce temps, au Nigéria, le carburant frelaté est annoncé pour connaître une flambée prochainement. Selon des informations qui ont circulé hier, l’Etat fédéral pourrait cesser de subventionner ce produit. Si cette décision est prise, sans doute, la conséquence se fera sentir sur le Bénin. Hier déjà, le prix du litre à Cotonou est passé de 325 Fcfa à 400 Fcfa dans la journée. Cela risque d’être compliqué dans les jours à venir. La population comme elle sait le faire se tournera vers les stations-services. Et bonjour, les longues files d’attente. La Sonacop est la seule société disposant d’un grand réseau de distribution au Bénin. Les privés en ont les moyens, mais sont découragés par la concurrence des acteurs du « kpayo ». Du coup, le manque de produit à la Sonacop risque d’entrainer une grave crise dans le pays.
Qui veut induire Sèhouéto en erreur ?
La suspension est de droit. Mais le ministre aurait pu éviter de mettre à l’écart tous les principaux responsables, surtout ceux qui sont impliqués dans l’approvisionnement et la distribution des produits et qui sont en contact direct avec des partenaires stratégiques de la société. Lazare Sèhouéto avait aussi la possibilité de limoger simplement Irénée Agossa, sans toucher les autres collaborateurs. L’autorité aurait aussi pu éviter de mettre les bureaux sous scellés et peut-être que les responsables suspendus pourraient se rendre au bureau (sous surveillance bien sûr) et répondre aux questions de l’Igm. La Sonacop, aujourd’hui, ne peut plus être facilement pillée par ses dirigeants ; puisqu’ils ne sont plus au contact direct avec l’argent. C’est un comité de trésorerie qui gère depuis quelques années. Et donc, on aurait pu faciliter la tâche à l’Igm en se patientant un peu dans les prises de décision. Au sein de l’administration de cette société, il y a une guerre de leadership qui règne depuis longtemps. Certaines personnes veulent la place de leurs collègues et induisent souvent les autorités de tutelle en erreur à travers de fausses informations. Des cadres rêvent d’occuper certains postes de responsabilité et n’hésitent pas à faire croire à qui de droit que son collègue gère mal. Lazare Sèhouéto n’est pas à sa première expérience au Gouvernement pour tomber dans des pièges du genre.
N’importe comment, le régime Talon a l’obligation de trouver les moyens de relever cette maison et sanctionner les auteurs de sa chute. A suivre…
Félicien Fangnon