La commune d’Adjarra est passée maître en matière de la fabrication des tam-tams. En témoigne les nombreux tam-tams qu’on retrouve ça et là dans le marché d’Adjarra et sur les grandes artères de cette commune du département de l’Ouémé.
Marc KOSSOU
Quartier Aholouko, il sonnait environs 8 heures quand Augustin Kpodozan ouvre son atelier de fabrication de tam-tams. Comme lui, ils sont nombreux à exercer ce métier dans la commune d’Adjarra. Comme les Hountondji d’Abomey sont les forgerons du roi, la famille Kpodozan est spécialisée dans la fabrication des tam-tams. A en croire le vieux Augustin Kpodozan, âgé de la soixantaine, cet art se transmet dans sa famille de génération en génération. « C’est mon feu père qui m’a appris ce métier et depuis bientôt 40 ans je l’exerce amplement » nous a-t-il confié. A son âge, il devrait être retraité s’il était à la fonction publique. Mais malgré cela, il est toujours en fonction. La fabrication du tam-tam commence par la sélection des troncs d’arbre. Depuis les anciens, au moins du temps du grand-père d’Augustin, il fallait parcourir quelques kilomètres pour gagner un bas-fond ou un marigot dans le village et y couper des arbres puis mettre les troncs en billes. Aujourd’hui encore, il va quelques fois en chercher en personne ou en achète. Ses favoris : l’arbre dénommé Afanlin et un autre dénommé Whètin (ou Samba). Mais il ne suffit pas de voir cet arbre pour se décider à le prendre. Augustin jauge sa circonférence et inventorie la régularité du tronc. Ce rituel est capital pour lui qui sait que son travail s’exporte et que sa réputation est en jeu. Il faut, explique-t-il, « veiller à la qualité du bois car chaque tam-tam a sa particularité et il faut le fabriquer en fonction des rythmes et sonorités auxquels il est destiné». Et si la qualité du bois préoccupe tant, c’est que si le choix est mal fait, le tam-tam pourrait ne pas durer, le bois étant dévoré par les termites. « Le même risque guette tout tam-tam dont le bois a été coupé pendant la période de pleine lune, ou par quelqu’un qui, dans les 48h précédant l’abattage de l’arbre qui y servira, aura entretenu des rapports sexuels », enseigne Augustin. Or, assure-t-il, si le bois est coupé dans les conditions requises, le tam-tam peut durer longtemps, très longtemps. Augustin souligne d’ailleurs qu’il y en a encore dans la famille de plus âgé que lui-même ! «Tout au plus le cuir pourrait se dilater avec le temps, mais on le refait» précise-t-il. A l’en croire, on ne peut pas parler des tam-tams en ignorant sa famille. En ce qui concerne la rentabilité de ce métier, Augustin pense que la fabrication du tam-tam nourrit son homme. « J’ai payé la formation de mes fils tout en exerçant ce métier ». En effet, le plus petit des tam-tams est à 5.000f Cfa selon les dires du sexagénaire. Quant à la clientèle, elle est diverse et variée. « La plupart de nos clients sont les adeptes du vodoun et des artistes traditionnels. Mais certains particuliers qui aiment la musique ou les instruments musicaux viennent payer chez nous » a-t-il déclaré. Vraisemblablement, chaque localité du Bénin est spécialisée dans un domaine donné.