31 ans déjà que l’Etat Béninois incite les populations au reboisement à travers la Journée nationale de l’Arbre. L’innovation béninoise semble connaitre du succès. Du moins, si on s’en tient au nombre de plants mis en terre : plus de 140 millions de plants pour 150.000 hectares reboisés. Cependant, ces performances sont loin de combler le vide laissé par la déforestation engendrée par les pratiques agricoles, la carbonisation du bois. Les menaces de désertification planent sur une partie du territoire national.
Une chose est de réussir à mettre en terre des milliers de plants. L’autre plus importante est d’arriver à les entretenir pour leur survie. Et c’est là le nœud du problème. Il est loisible de retrouver quelques semaines après le 1er juin, des plants mourants, dominés par les mauvaises herbes, faute d’entretien. Entre les communes et les structures en charge de la protection de l’environnement, à qui incombe l’entretien des plants mis en terre ? Dans tous les cas, les villes et les villages s’appauvrissent en végétation malgré les journées de l’arbre.
L’autre réalité de ces journées est la non implication effective des populations. Le reboisement semble être l’apanage des agents des eaux et forêts. Combien de citoyens se sont-ils sentis obligés de mettre, ne serait-ce qu’un plant en terre dans le cadre du Programme 10 millions d’âmes, 10 millions d’arbres ? Il est rare de trouver dans les concessions en ville, un moindre mètre carré dédié à un espace vert ou la plantation d’un arbuste. Pis, autorités et citoyens ont une certaine facilité à déboiser et à remplacer les espaces verts par du béton. Le cas de la destruction des plants sur l’espace côtier à Fidjrossè au profit de la construction d’une voie bitumée en est une preuve.
L’arbre est au cœur même de la vie de l’espèce humaine, et il serait mieux de redéfinir le concept de la Journée nationale de l’arbre au-delà du cérémonial du reboisement. L’innovation que constitue la distinction des meilleurs planteurs pour inciter davantage le secteur privé et les populations est déjà un pas. Celle qui consiste à interdire, pour le moment, l’exportation des produits forestiers en est un autre. Mais, il faudrait aller bien au-delà pour toucher la conscience de chaque citoyen, potentiel agent de protection de la nature. La réinstallation des clubs écologiques dans les écoles primaires, lycées et collèges ne sera pas de trop. Il faudra au Bénin, non plus une journée consacrée à l’arbre, mais toute une vie à protéger nos ressources naturelles. La journée nationale de l’arbre aura retrouvé son vrai sens quand on arrivera au principe ‘’un citoyen, un plant mis en terre chaque année, un arbre entretenu tous les jours’’. Ainsi, on aurait trouvé une réponse concrète à la préoccupation de Antoine de Saint Exupéry : Quelle terre laisserons-nous à nos enfants ?
Fulbert ADJIMEHOSSOU (Coll.)