Que faire face à la situation actuelle dans le secteur des arts et de la culture au Bénin pour mettre un terme à la crise, mais aussi poser les balises d’une gouvernance exemplaire des fonds alloués au Fonds d'aide à la Culture. La problématique alimente bien de débats depuis peu. Et la plate-forme Wanilo, devenue pionnière dans la dénonciation ces dernières semaines a tôt fait d’officialiser certaines suggestions.
On doit à la plate-forme Wanilo, et sans doute aussi à la volonté de l’actuel ministre en charge de la Culture, Ange N’koué, les mesures conservatoires appliquées au secteur des arts et de la culture, notamment au fonctionnement du Fonds d’aide à la Culture (Fac). Née de la révolte et de la contestation d’une frange d’acteurs culturels, dépités du fonctionnement des instances de financement du secteur culturel, la plate-forme Wanilo s’est érigée en une force d’opposition et de propositions. «Nos actions consistaient à faire arrêter le processus d’élection, consulter les acteurs sur la question d’amélioration du fonctionnement du fonds et enfin faire des propositions pour des réformes profondes de transparence, de crédibilité et d’impact du fonds», synthétisent ses responsables. Pour l’instant, la revendication majeure portant sur l’arrêt du processus de désignation des administrateurs du Fac est déjà un acquis. Depuis le 7 juin dernier, ledit fonds a basculé dans un vide juridique et bien malin qui pourrait présager de la suite du processus, surtout que jusque-là le ministre en charge de la Culture, dont l’intervention est très attendue, n’en dit mot.
Pour sa part, la plate-forme Wanilo, «après plusieurs investigations et consultations, a conclu que laisser passer le renouvellement des membres du Conseil d’administration serait entretenir ou encourager une mauvaise gouvernance qui s’érige en principe de gestion du Fonds d’aide à la Culture».
«Pour collecter des propositions, nous avons conduit une série de consultations publiques. La première méthode consiste à organiser des forums publics sur les propositions pour un meilleur fonctionnement du fonds. Ensuite, il a été mis en place une adresse électronique sur laquelle les acteurs ont envoyé des propositions quelle que soit leur situation géographique », détaille le document de synthèse rendu public par l’organisation au terme de son processus de consultation. Au total, 157 artistes et acteurs culturels représentant toutes les disciplines artistiques, bénéficiaires ou non-bénéficiaires du Fonds d’aide à la Culture, 24 acteurs culturels de la diaspora, ont pris part à l’opération qui s’est soldée par une série de propositions visant à faire changer la donne dans le secteur culturel. ?
Que veut Wanilo ?
Selon la vision et les objectifs de la plate-forme Wanilo, le secteur culturel béninois doit connaître un processus de démocratisation directe. L’opération « Un acteur culturel, une voix » sera la première revendication phare de cette association pour faire obstacle au mode de désignation des administrateurs. « Dans le contexte actuel où la crédibilité et l’effectivité des associations et fédérations d’artistes sont remises en cause, nous proposerions de procéder à une cartographie du secteur et au recensement par discipline, par métier et par catégorie des acteurs et des organisations du secteur. Ce travail de recensement doit se baser sur le statut de l’artiste en République du Bénin », suggère Wanilo. En dehors des exigences relatives au processus électoral et la candidature, les responsables de l’organisation formulent aussi des propositions pour un meilleur fonctionnement de l’outil de gestion des ressources du secteur.
Les administrateurs de type nouveau attendus dorénavant au sein du Conseil d’administration du Fac auront l’obligation de rendre compte une fois par an à leur base et le mandat du Conseil d’administration ne dépassera pas deux ans renouvelables une fois. S’agissant de la direction générale du Fonds d’aide, elle doit être un instrument technique de régulation, d’accompagnement et de facilitation et avoir la possibilité de faire des propositions au CA. Elle doit, pense la plate-forme Wanilo, «organiser le suivi et l’évaluation des projets financés et, par l’entremise d’un cabinet d’étude, établir les outils et canaux d’évaluation et de suivi uniformes et consensuels pour tout le secteur ». Aussi, doit-elle mesurer chaque année l’impact du financement sur le secteur et sur l’économie nationale et publier des bulletins statistiques. Quid des montants alloués aux acteurs et aux structures ? A ce niveau, Wanilo dresse un éventail très large de propositions dont la finalité permettra de renforcer la dépendance de l’acteur culturel et le financement des initiatives culturelles, loin de toutes tentatives de corruption avec des impacts sur le secteur et sur l’économie.
La liste n’est pas exhaustive et ce travail conduit par une équipe de coordination, avec à sa tête, Espéra Donouvossi, consultant, opérateur et administrateur culturel, Giovanni Houansou, acteur culturel et comédien et bien d’autres experts à divers niveaux de la chaîne culturelle, selon nos investigations, devrait déjà être aux mains du ministre Ange N’koué et de ses collaborateurs. Pour la plate-forme Wanilo, la mise en application de ses propositions, avec l’appui de tous les acteurs culturels suffirait à concrétiser la volonté du président Patrice Talon, tel que mentionné dans son projet de société à savoir « Mettre en place une véritable politique de soutien aux vocations et talents artistiques ».
Josué F. MEHOUENOU