Le consensus. C’est le mot phare à retenir de l’entretien accordé le week-end écoulé par l’ancien président Boni Yayi à la radio Capp Fm au sujet des conditions devant permettre au processus de toilettage de la loi fondamentale de connaître un heureux aboutissement. Si le débat est actuellement focalisé sur le mandat unique, l’ancien chef de l’Etat, sans donner une position tranchée sur la question, pense plutôt qu’en dehors de trois points qui ne peuvent pas faire l’objet de référendum à savoir la laïcité de l’Etat, le jeu démocratique et l’intégrité du territoire, tous les autres articles de la Constitution du 11 décembre 1990 peuvent faire l’objet de révision. « Là où il est écrit que le président de la République est élu pour un mandat de cinq ans renouvelable une seule fois, de façon consensuelle, peut être modifié en fonction de ce que le peuple veut… », a affirmé l’ancien président Boni Yayi qui a noté que l’essentiel est le consensus et que ce processus ne soit pas source d’affrontement si tant est que la révision de la loi fondamentale doit conduire à la paix.
Le calme avant la tempête ?
Contrairement donc aux appréhensions que peuvent légitimement avoir certains analystes sur la position de l’ancien président au regard des divergences qui ont caractérisé ses relations avec son successeur ces dernières années, l’équivoque est désormais levé. Boni Yayi est pour la révision de la Constitution. Sa position n’a d’ailleurs pas varié après son départ de la Marina. Mais de là à déduire qu’il adhère aux différentes réformes qui seront retenues à l’issue du processus, c’est aller vite en besogne. Car, s’il est vrai qu’au sein de la Commission Djogbénou, il se retrouve des personnalités qui, par le passé, ont travaillé à une éventuelle relecture de la loi fondamentale alors que le président Yayi était au pouvoir, le contexte et les motivations qui sous-tendent les réformes en cours ne sont pas les mêmes.
L’autre chose et pas moins surprenante à retenir de la sortie médiatique de l’ancien président Boni Yayi est qu’il entretient d’excellentes relations avec son successeur Patrice Talon à qui, il souhaite de réussir à la tête du Bénin. Et tout ceci, sur fond d’explication des raisons qui ont été à la base de l’inimité entre lui et son successeur. Toutefois, il faut souligner que dans les propos tenus par l’ancien chef de l’Etat sur Capp Fm, il y a une constante : la paix et le consensus. Même le ton, pour ceux des Béninois qui ont souvent fustigé son impulsivité a changé. Est-ce le calme avant la tempête ou Boni Yayi ne serait-il pas aussi, petitement mais lentement, après environ trois mois de son successeur à la tête de l’Etat en train d’apporter sa caution à ses projets de réformes ? En tout cas, si consensus il y a autour de tout ce que Talon entreprendra, Boni Yayi ne lui ménagera pas son soutien, et c’est le plus important.
Cela ne doit pas être une source d’affrontement
Aujourd’hui, à l’état actuel de notre Constitution, personne ne peut diriger le Bénin pendant plus de deux mandats consécutifs. Après les deux mandats consécutifs,vous êtesrayé à vie. C’est à l’américaine. Au même moment, la Constitution dit qu’elle peut faire l’objet de révision sauf sur trois points : la laïcité, le régime démocratique et l’intégrité du territoire. Ces trois points ne peuvent pas être négociés ou faire l’objet de référendum. Les autres points peuvent être modifiés de manière consensuelle. Par exemple, là où il a été écrit que le Président de la République est élu pour un mandat de cinq ans, renouvelable une fois, en aucun cas personne ne peut diriger le Bénin pour plus de deux mandats. De manière consensuelle, lors d’un débat entre les fils du Bénin, ce point peut être modifié en fonction de ce que le peuple veut ou que les forces vives de la nation veulent. Cela ne doit pas être une source d’affrontement, si pour autant, ça doit conduire à la paix, à la sécurité, et à la prospérité de notre peuple.
En réalité, conformément à notre Constitution, le mandat a pris fin le cinq avril à minuit.Pour la petite histoire, j’étais au bureau à minuit moins cinq minutes. J’ai dû fuir pour que le nouveau président élu devienne maitre des lieux le 06 avril à partir de 00 heure et pour que les Béninois ne me voient pas dans l’enceinte de la présidence. Je suis interdit de séjour dans l’enceinte de la présidence le 06 avril à partir de 00 heure.
Les relations sont excellentes. Excellentes pour la simple raison que la passation de charge a eu lieu. Je lui ai remisle pouvoir conformément au respect que j’ai pour le peuple béninois et la paix. C’est un peuple pacifique. Je le félicite de nouveau pour son élection et je lui souhaite la réussite à la tête de notre pays. La passation de charge a eu lieu, on a eu le tête-à-tête, on s’est parlé entre amis. Ce qui nous unit est plus important que ce qui nous divise. Et même, est-ce qu’il y a quelque chose ? Je voudrais vous dire qu’il y a un problème d’incompréhension dans cette affaire. Il n’y avait pas de problème politique. Lui, il disait que c’était un problème politique, pas du tout. J’étais mû par le souci de réussir mon mandat. Mais lui, en tant qu’opérateur économique, il était mû par le souci du gain. Mais pour moi, il n’était pas question que je quitte la présidence sous la pression des cailloux, parce que le pays aura été mal géré, ou parce que j’aurais organisé la concussion ou j’aurais nourri un seul fils alors qu’il y a au moins dix millions de Béninois. Pour moi, l’intérêt général prime sur toute amitié.
Angelo DOSSOUMOU