Patrice Talon était hier soir, à 21 heures, sur la télévision nationale pour défendre son bilan. En berne dans les sondages, le chef d'Etat a tenté d'expliquer ses choix. Au plus bas dans les sondages, contesté dans son propre camp... le «roi du coton» n’a pas convaincu. Accusé de "trahison" par beaucoup de ceux qui ont voté pour lui, notamment au niveau de la coalition de la «rupture», Patrice Talon a raté une très bonne occasion pour rassurer les Béninois, qui ont perdu tout espoir, après trois mois seulement de gouvernance. Sa prestation a été largement commentée par les téléspectateurs. Certains estiment que c'était "un véritable naufrage en direct", plein "d'autosatisfaction évidemment indécente vu ses résultats". D’autres ont carrément exprimé leur insatisfaction. «Il passe son émission à expliquer que tout ce qu'il a fait était bien, que le Bénin va mieux aujourd’hui qu’hier. Mais on a bien vu que ses trois mois de présidence ont aggravé la misère, la pauvreté, la précarité, l’insécurité, le délestage… dans le pays», déclarent d’autres, qui dénoncent un Patrice Talon "totalement déconnecté des réalités du pays" car il "ne connait pas le monde politique, c’est un homme d’affaires".
En effet, pour Patrice Talon, toute gouvernance qui remet en cause ses intérêts personnels est mauvaise. L’ancien régime, a-t-il affirmé, a battu le record de financements publics au profit de la filière coton. «Au Bénin, les finances publiques ne subventionneront plus la filière coton», a-t-il expliqué. Mais qui bénéficiait de ces subventions ? C’est bien évidemment Patrice Talon. Et les résultats obtenus après la reprise en main de la filière par l’Etat sont plus reluisants qu’au moment où il régnait en maître, il détenait le monopole, sous l’ancien régime. La production cotonnière est passée de 190,857 tonnes à 174,052 tonnes de 2006 à 2012 (au moment où le privé gérait seul la filière) contre 240,028 tonnes à 303.000 tonnes de 2013 à 2015, quand l’Etat a pris ses responsabilités.
Les Béninois ont aussi relevé le manque d’humilité du chef de l’Etat pour qui rien n’a été fait par le passé, tout ce qui a été fait avant lui est mauvais. Or, il est également comptable de ce qui a été fait par le passé. Jusqu’en 2012, il sait très bien celui qui gérait la filière des véhicules d’occasion. Pourquoi alors lancer un audit ciblé à partir de 2012 ? «Deux déceptions sur la sortie médiatique du président Talon : le soutien sans équivoque au zèle du préfet du Littoral et la justification laborieuse de la décision du gouvernement de considérer 2012 comme année de référence de l'audit sur la gestion des véhicules d'occasion», note le syndicaliste Anselme Amoussou, sur sa page facebook.
Etienne AVONON