Le président de l’Union nationale des magistrats du Bénin (Unamab), Michel Adjaka a réprouvé les nouvelles nominations intervenues dans le secteur judiciaire. Il a publié sur les réseaux sociaux hier un point de vue très critique ; une opinion qui prouve que le gouvernement fait le contraire des promesses électorales.
Le redéploiement du personnel magistrat violerait «la plupart des critères qui renforcent et confortent l’indépendance de la justice». Le président du puissant syndicat des magistrats est formel. Sur sa page Facebook ce mardi, il a relevé plusieurs irrégularités qui mettent en danger le fonctionnement des juridictions. Michel Adjaka connu pour son opiniâtreté a exprimé toute sa déception. «(…) Outre la violation par le gouvernement du secret des délibérations du Conseil supérieur de la magistrature (Csm) en ce qu’il a publié l’avis dudit conseil en lieu et place du relevé du conseil des ministres, il est à déplorer le non-respect par le Csm du critérium qu’il s’est librement donné par l’adoption du rapport MONSI relatif aux critères à suivre par le Csm pour donner son avis sur les nominations», a-t-il écrit. Et de s’interroger : «pourquoi certains magistrats bénéficient-ils du privilège de faire leur carrière à Cotonou au moment où d’autres font régulièrement l’objet de mutations injustes ?». Pour Michel Adjaka, «la grosse déception de cette avalanche de nominations réside dans les vacances de postes stratégiquement créées». Il montrera qu’à «Lokossa, il n’y a plus de juge d’instruction, ni de juges d’instruction du 1er et du 3ème cabinet à Abomey alors que cette dernière juridiction a le plus grand nombre de détenus après Cotonou ». « Ces nominations soulèvent des problèmes de grades. En effet, conformément aux dispositions de l’article 37 de nos statuts, pour être juge d’instruction du 1er cabinet dans une juridiction de première classe, il faut avoir le grade A1-8. Ce principe a encore été cette fois-ci violé », a-t-il par ailleurs dénoncé. Michel Adjaka qui porte la voix des magistrats n’a pas fait dans la dentelle. Pour lui, les nominations décriées sont à reprendre.
Vers un nouveau bras de fer gouvernement-Magistrats ?
Les actes de nominations pris dans la maison Justice sous la Rupture sont, décidément, souvent contestés. En mai dernier, la promotion de certains magistrats au ministère de la Justice avait irrité le président de l’Unamab. «Certaines nominations faites par le gouvernement de la rupture dans le secteur judiciaire insultent la morale et n’incitent pas à la vertu. On ne peut pas prôner et promettre au peuple la rupture et s’empresser de recycler des magistrats sanctionnés dans des dossiers criminels comme Amani Tidjani et Séverin Coovi par le Conseil supérieur de la Magistrature», avait-il lancé. Le gouvernement de Patrice Talon semble n’avoir pas encore appris des erreurs et errements désapprouvés. La Rupture prônée tarde à prendre corps au sein du secteur judiciaire. Ce qui pourrait déteindre sur les relations déjà détériorées existant entre les syndicats de la Justice et le gouvernement. L’Unamab vit, faut-il le souligner, depuis quelques mois la gouvernance décriée du Professeur Joseph Djogbénou (Garde des Sceaux). Elle passe au crible non seulement les nominations mais aussi la gestion judiciaire de la crise que traverse la Fédération béninoise de football. Un conflit peut-être violent couve au sein de la Justice. Les justiciables pourraient revivre les longs moments de paralysie connus dans les juridictions sous l’ancien président Yayi Boni. Si cette éventualité se concrétise, elle risque de refroidir dans bien des secteurs, l’ardeur qui doit accompagner les grandes réformes politiques et institutionnelles promises.
A.S