Gestion du pouvoir Exécutif au Bénin : Pas de place pour deux présidents (Le préfet Modeste Toboula met en garde Thomas Boni Yayi) - Et si Boni Yayi s’approprie le statut de la société civile ?
lundi 22 août 2016 01:04 | Imprimer | E-mail
Avant et après le 20 mars 2016, les Béninois, quoique optimistes, avaient manifesté un certain scepticisme du fait de la réaction qu’aurait l’ex président de la République chez qui on sentait une forte frénésie quant à laisser le pouvoir. Les faits semblent confirmer ce scepticisme. Si d’aucuns voient en la visite de l’ancien chef d’Etat à l’aéroport de Tourou un non évènement, cela ressemble quand même à une volonté affichée de sa part de montrer à qui veut l’entendre qu’il est toujours aux affaires. Cette visite repose le problème des limites à ne pas dépasser par un ancien chef de l’Etat dans ses agissements publics
Ce ne sont pas Patrice Talon et Thomas Boni Yayi qui ont prêté serment ensemble pour codiriger le Bénin pour l’actuel mandat présidentiel qui court jusqu’au 4 avril 2021. La Constitution du Bénin ne reconnaît qu’un seul président et il en a été toujours ainsi depuis le 1er août 1960. Même au temps du triumvirat, système présidentiel qualifié de monstre à trois têtes, chacun des trois présidents devrait diriger la Nation à tour de rôle et dans le respect de l’un et de l’autre quoique, l’expérience ait été stoppée.
La visite qu’aurait effectuée l’ex chef d’Etat Thomas Boni Yayi sur le chantier de l’aéroport de Tourou à Parakou semble inopportune. Raison pour laquelle, tout la polémique autour. Avait-il réellement besoin d’effectuer cette visite ? Si oui pourquoi et dans quel but ? Lorsque lui Thomas Boni Yayi a dirigé le Bénin du 4 avril 2006 au 4 avril 2016, jamais feu Général Mathieu Kérékou ne s’est aventuré sur un chantier initié en son temps pour en voir la finalisation ou l’achèvement parce qu’il en a été l’initiateur. Jamais il ne s’est immiscé directement ou indirectement dans la gestion du pouvoir par Thomas Boni Yayi. L’Etat étant une continuité, les projets initiés et inachevés au temps d’un président sont achevés par le nouveau président durant son mandat. L’aéroport de Tourou rentre bien dans ce schéma puisqu’il n’est pas construit sur financement personnel de Thomas Boni Yayi, c’est un patrimoine de l’Etat béninois. D’autre part, un aéroport est une zone de haute sécurité dont la visite par une tierce personne est soumise à un accord régulier de la part des autorités devant donner l’autorisation. Bien qu’il soit fraichement ou un récent ancien chef d’Etat, il se devait par respect pour lui-même, pour le président élu, pour la Nation béninoise et pour les textes qui la régissent, se comporter comme un bon citoyen en ne tordant pas le coup à la règlementation. L’accès en visite à l’aéroport est soumis à une permission en bonne et due forme vu que c’est une zone très sensible. C’était encore plus à son honneur que de se conformer à la loi. En temps normal, tous ceux qui n’ont pas fait preuve de vigilance en le laissant effectuer cette visite sous prétexte qu’il est ancien chef d’Etat devaient être rappelés à l’ordre. Il pouvait simplement faire un point de presse pour dénoncer ce qui lui tient à cœur.
On l’aura constaté, depuis le 20 mars et le 4 avril 2016, des comportements de sa part semblent confirmer que Thomas Boni Yayi se croit toujours dans le manteau présidentiel. Le Bénin n’a pas deux présidents pour un mandat. De même, il ne peut y avoir de bicéphalisme au niveau de l’Exécutif pour qu’il y ait un président du septentrion, un président du sud. Le Bénin est une Nation une et indivisible dont le 6ème président démocratiquement élu en succession à Thomas Boni Yayi s’appelle Guillaume Athanase Patrice Talon.
Il y a des choses avec lesquelles on ne joue pas et cette visite s’assimile à de la provocation. Et s’il devrait continuer sur cette lancée, il serait seul responsable de ce qui pourrait en advenir. L’autorité de l’Etat se respecte et cela, Thomas Boni le sait très bien. Qu’il ne se prenne pas non plus pour le meilleur président de la République du Bénin. A moins que ses encenseurs le maintiennent toujours dans ce piège à rats grâce auquel, ils ont réussi à faire de lui leur vache à lait qu’ils continuent sûrement de traire. La nostalgie n’est pas non plus un mode de gestion du pouvoir Exécutif. La Constitution béninoise a prévu les avantages dus à tout ancien président de la République. Ce qui est valable pour Tomas Boni Yayi aujourd’hui le sera aussi pour Patrice Talon demain. Force doit rester à la loi pour le respect des institutions de la République.
Et si Boni Yayi s’approprie le statut de la société civile?
L’actualité sociopolitique a été agitée ces derniers jours par la supposée visite de l’ancien Président de la République du Bénin, Thomas Boni Yayi sur le chantier de l’aéroport de Tourou en construction. Une visite que les caciques de la rupture et même le gouvernement jugent inopportune et qui aurait perturbé, à la grande surprise du peuple, le congé gouvernemental des ministres de Talon.
Si aucune preuve audio ni vidéo ne confirme ce passage de l’ex Chef d’Etat béninois, cette supposée visite faite avec un cortège de véhicules avec des déclarations que certains jugent de « déplacées » puisqu’il aurait agi tout comme s’il était toujours au pouvoir, a visiblement permis de régler une question cruciale, celle de la disponibilité du scanner de cet aéroport.
Selon les propos abondamment relayés sur les réseaux sociaux et dans les médias nationaux, Thomas Boni Yayi aurait menacé le régime en place de « ne pas toucher à son scanner chèrement payé pour la compétitivité de cet aéroport ». Un tel propos a écourté le congé du ministre en charge des Travaux et des infrastructures dans le pays. Une fois sur le terrain, le ministre Hervé Hehomey, annonce le retour du fameux scanner et d’autres réformes pour la finition, à temps, de ce chantier pour lequel « il s’est battu au cours de son deuxième quinquennat présidentiel ».
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Au-delà donc des différentes déclarations et des menaces qu’auraient proférées le ministre Hehomey et certains acteurs politiques qui l’avaient suivi, on pourrait, penser que c’est la sortie de l’ancien numéro 1 Béninois qui a accéléré les choses sur ce chantier.
À défaut donc de jouer l’opposant politique face au régime en place, Thomas Boni Yayi, aimant le populisme, pourrait se plaire dans ce rôle de la société civile parce que tout porte à croire que les déplacements de cet homme dans la République attirent plus l’attention des dirigeants et les font vite réagir.
Le préfet Modeste Toboula met en garde Thomas Boni Yayi
Les derniers déplacements de l’ancien chef d’Etat, Thomas Boni Yayi font toujours débat au sein de la classe politique et également au sein de l’opinion publique. Ce dimanche sur la chaîne de télévision, Golfe TV, le préfet du département du Littoral, Modeste Toboula, s’est prononcé sur la question et, dans un langage clair et limpide, met en garde Thomas Boni Yayi.
« Si éventuellement monsieur Thomas Boni Yayi se lançait sur un chantier relevant de notre juridiction compétente sous prétexte d’une quelconque visite de chantier, nous serions dans la triste obligation de le mettre à sa place et de lui montrer le chemin de la bonne conduite et du respect des droits et du statut d’un ancien Chef d’Etat », a clairement signifié le préfet du département du Littoral, Modeste Toboula. Selon la première autorité préfectorale, « aucune dérive du genre ne saura être tolérée dans un Etat de droit ».
« J’ose croire que monsieur Thomas Boni Yayi ne fera pas pareille chose dans le Littoral. Je ne pourrai pas accuser mon collègue du Borgou. Mais je crois que c’est un signal que nous a donné l’ancien Chef d’Etat et que cela sera, qu’il le sache clairement, la dernières tentative de troubler l’ordre et la quiétude du citoyen béninois », martèle le préfet tout en invitant ses pairs à plus de vigilance pour que d’éventuels incidents ne se produisent à l’heure où tout le peuple prône un nouveau départ.
KMS & JF