Le changement climatique affecte dangereusement la demande en énergie des populations. Au Bénin, alors même que la demande en énergie évolue considérablement, les prévisions prévoient une tendance à la baisse de la production énergétique.
La demande énergétique du Bénin a été estimée au cours de la conférence inaugurale la Journée de la Renaissance Scientifique de l’Afrique, sous l’égide du Centre Béninois de la Recherche Scientifique et Technique, le 24 Juin 2013 à l’ISBA, Cotonou. Il en ressort qu’au Bénin, jusqu’à ces 10 dernières années, près de 60% des consommations énergétiques continuent de provenir des énergies traditionnelles que sont le bois de feu et le charbon de bois, contre 35% pour les produits pétroliers et seulement 5% pour l’électricité ; et cette électricité est utilisée par seulement 25% de la population béninoise en moyenne, avec moins de 4% dans les zones rurales. Quant à la consommation des rares industries du Bénin, elle est très faible, moins de 5% de la consommation totale. Une étude faite en 2000 a établi une prévision de la demande sur une période de 15 ans (2000 à 2015), qui est allée de 115 MW à 380 MW, soit un accroissement de 15,4% par an. La demande d’électricité au Bénin continue donc d’augmenter parallèlement à la croissance du PIB (environ 5%). La part du secteur industriel croît tandis que le secteur agricole se diversifie. Ce phénomène renforce la croissance du Bénin, qui atteint 11% en 2025. Le taux d’électrification atteint en 2025 dans ce scénario serait de 95% dans les aires urbaines et de 65% dans les zones rurales (contre 51,6% et 1,7% en 2005). La conséquence serait une augmentation majeure de la demande d’électricité dans le pays. Le Bénin dispose d’importantes ressources énergétiques. Néanmoins, le pays fait face à plus de deux décennies de crise énergétique, ce qui amplifie l’impact des changements climatiques.
Vulnérabilité du secteur face aux impacts des changements climatiques
La vulnérabilité aux changements climatiques a été évaluée par le Programme des nations unies pour le développement (Pnud), au profit du Bénin, dans le cadre du Programme d’action national d’adaptation aux changements climatiques du Bénin (Pana-Bénin) et ce, pour tous les aléas autour de la production et le transport de l’énergie. Elle est différente selon le type d’énergie impliquée (biomasse, hydroélectricité, autres énergies renouvelables, énergie thermale, importations d’électricité). Parmi ces sources d’énergie, les plus vulnérables sont la biomasse, l’hydroélectricité et les importations d’électricité.
Hydroélectricité et transport d’énergie
Dans le cas de l’hydroélectricité par exemple, l’augmentation de la température devrait modifier de façon significative le cycle hydrique des principales rivières du Bénin et donc leur potentiel hydroélectrique. Les événements hasardeux, tels que les sécheresses extrêmes devraient affecter le potentiel hydroélectrique des basins principaux. Les changements affectant la saison des pluies posent un risque accru d’inondation des centrales électriques, des réseaux de transmission et des stations de distribution d’électricité. Ces dernières sont les plus vulnérables aux inondations, alors que les infrastructures de production d’électricité sont plus vulnérables à l’augmentation du niveau des océans (et aux inondations conséquentes). L’opportunité de renforcer la résilience aux inondations de celles-ci se présente quand les infrastructures électriques existantes deviennent obsolètes et doivent être remplacées, mais cela dépend énormément de la structure et de la localisation desdites infrastructures.
L’augmentation des températures aura également un impact sur les réseaux électriques : la température ambiante peut en effet réduire la puissance des câbles électriques jusqu’à 5% dans les réseaux de transmission et jusqu’à bien plus pour les réseaux de distribution. L’électricité disponible à la distribution peut ainsi être significativement réduite en raison de son transport dans une température ambiante plus élevée, où la demande est générale la plus élevée (climatisation).
Energie solaire
Le potentiel en énergie solaire augmenterait, mais les risques d’un impact négatif sur la performance des équipements risquent également de se faire plus conséquents sur le long terme. Certains secteurs d’activité nécessitent d’être continuellement desservis en électricité (l’alimentation par exemple, avec la nécessité de congeler ou de réfrigérer) et se trouvent ainsi considérablement exposés.
Energie issue de la biomasse
La biomasse est l’une des ressources énergétiques les plus vulnérables aux changements climatiques. En effet, l’augmentation des températures devraient réduire l’étendue des forêts en engendrant des stress hydriques et thermiques, et ce alors même que la demande en bois devrait baisser. Les ménages à faible revenus sont particulièrement vulnérables car leur consommation énergétique repose essentiellement sur la biomasse. L’évaluation de la vulnérabilité montre que les inondations, les pluies torrentielles et les sécheresses sont les risques climatiques ayant l’impact le plus néfaste sur l’écosystème des forêts et les communautés rurales. Les modes de vie des petits forestiers et des fermiers sont les plus exposés, la production agricole et les services à l’écosystème (protection du territoire, conservation des ressources hydriques) étant particulièrement menacés par les changements climatiques.
Mesures d’adaptation
D’après le rapport d’étude du Pnud, les points clefs sur lesquels il faut se concentrer sont la lutte contre la déforestation et l’urgence d’une meilleure utilisation des résidus et déchets agricoles. Ainsi, une des réponses à la vulnérabilité climatique du secteur de l’énergie au Bénin serait la mise en place des mesures techniques renforçant les sources d’énergie et les infrastructures énergétiques, tout en intégrant les risques climatiques dans les anticipations et processus institutionnels, ainsi qu’en encourageant les comportements permettant de promouvoir l’utilisation rationnelle, durable et diversifiée du potentiel énergétique. Ces mesures devraient être étayées par la promotion de sources de revenues alternatives et la mise en œuvre par le Bénin de mesures institutionnelles, règlementaires et politiques visant à mettre fin aux barrières contre l’adoption des mesures d’adaptation évoquées précédemment. Les changements climatiques (réchauffement, élévation du niveau des océans, etc.) établissent de nouvelles conditions beaucoup moins favorables pour le secteur de l’énergie du Bénin, poussant à la prise d’action et à l’adoption de mesures d’adaptation. Le rapport souligne par ailleurs que, là où les changements climatiques peuvent réduire la disponibilité en eau, des centrales électriques peuvent être conçues pour pomper et consommer moins d’eau pour leur fonctionnement, à travers un système de « recirculation ». D’autres mesures d’adaptation peuvent être évoquées : l’augmentation du volume d’eau traitée, le développement de sources alternatives d’eau, etc. Le choix des techniques appropriées pour s’adapter à des températures plus élevées et des ressources en eau réduites peuvent être spécifiques à la situation géographique et locale. L’adoption des énergies renouvelables est une alternative crédible pour lutter contre les affres du changement climatique.
Thomas AZANMASSO