La valse d’audits commandités par le nouveau régime ne se limitera pas aux structures étatiques. Elle va s’étendre aux Communes du pays, dont seize principalement. Si l’objectif des audits est d’identifier les goulots d’étranglement à l’efficacité de la conduite des affaires du pouvoir local afin d’envisager les actions pertinentes, cela permettra aussi de vérifier entre autres la gestion des dépenses publiques et les passations des marchés publics par les maires en fonction.
Seize Communes du pays, vu leur importance ont été ciblées pour être auditées dans les tout prochains jours. Abomey, Abomey-Calavi, Allada, Aplahoué, Bohicon, Cotonou, Dassa-Zoumé, Djougou, Kandi, Lokossa, Malanville, Natitingou, Ouidah, Parakou, Pobè, Porto-Novo recevront à cet effet des cabinets d’audits déjà sélectionnés dont la mission principale est de ressortir au terme de trente jours de travail, les insuffisances qui affectent l’efficacité de la gestion communale. Ainsi, il s’agira primo pour les missions dépêchées de faire le diagnostic organisationnel. Ce qui permettra d’analyser le système de gestion des finances locales afin de faire ressortir les principales zones d’amélioration du cadre juridique et organisationnel. Et, secundo, il sera question de faire l’audit financier. Il portera sur un échantillon d’opérations financières et d’infrastructures réalisées par la Commune. Cet audit permettra aussi d’apprécier la véracité des dépenses jugées inéligibles par les missions d’audit du Fadec. Ces audits avaient été menés par l’Inspection générale des finances et l’Inspection générale des affaires administratives au titre des exercices 2012, 2013 et 2014. Les cabinets devront confirmer ou infirmer les observations de ces deux organes sur les dépenses qu’ils ont jugées inéligibles. Les auditeurs ont été également mandatés pour contrôler la régularité des dépenses effectuées à travers le respect des règles et procédures budgétaires qui incombent aux services de l’ordonnateur. Les maires dont les Communes ont été ciblées, Léhady Soglo de Cotonou, Emmanuel Zossou de Porto-Novo, Karim Souradjou de Parakou, Sévérin Adjovi de Ouidah, Nicaise Fagnon de Dassa-Zoumé, Luc Atrokpo de Bohicon, Blaise Ahanhanzo Glèlè d’Abomey, Georges Bada d’Abomey-Calavi, Charlemagne Honfo de Sèmè-Podji pour ne citer que ceux-là, devront s’apprêter à répondre aux questions des auditeurs sur d’autres aspects spécifiques de l’audit. Par exemple : le contrôle de la régularité et la transparence des procédures de passation des marchés publics, le contrôle de la régularité des dépenses effectuées à travers le respect des règles et procédures comptables, le contrôle de l’effectivité ou de la réalité des dépenses. Cet audit sur leur différente gestion concerne la période allant de janvier 2015 à juin 2016.
Bonne gouvernance et amélioration des services offerts aux populations
La décision d’auditer les Communes du Bénin a été prise par le régime de la Rupture, notamment par le chef de l’Etat dans le but de connaître leur situation avant de leur donner les moyens adéquats pour leur développement. Cela se justifie par le souci de Patrice Talon de mettre en œuvre son programme d’action à l’endroit des Communes pour relever le défi du développement local. La nécessité d’avoir une meilleure connaissance de la situation sur la bonne gouvernance des administrations locales s’accompagne du souci du président de la République d’éliminer les obstacles au développement des Communes. Car, à la fin des audits, il va falloir définir des mesures pertinentes et des actions visant la promotion de la bonne gestion des deniers publics. Mais aussi, c’est d’accroître la transparence et la qualité des services publics délivrés aux populations. Ce travail a été confié aux cabinets d’audit et d’expertise comptable agréés et reconnus pour leur expérience en audit financier avec une connaissance suffisante du système de gestion des finances publiques.
Fidèle Nanga
Les conseils communaux à l’épreuve
La série des destitutions de maires a démarré sous la Rupture un peu comme ce fut le cas sous le président Kérékou. Pour prévenir cela sous le Changement, Yayi avait imposé les élections pour voir accéder à la mairie ses pions. Le cycle des remises en cause perpétuelle refait surface.
Sous Yayi Boni, aucun maire non Fcbe n’était vraiment sûr de garder son fauteuil jusqu’à la fin. Pour un oui ou un non, le conseil communal, se réserve le droit le plus absolu de remettre en cause la légitimité de celui qu’ils ont eux-mêmes élu. Tout part d’un petit noyau de dissidents qui prend corps et grandit progressivement un peu comme une tumeur toujours sur l’inspiration d’un plus fort tapis dans les buissons qui actionne tout de loin. Les remises en cause se multiplient, la machine une fois huilée, les partisans d’hier deviennent des dissidents redoutables. Un beau matin, le maire qui entre-temps était confortablement installé dans son fauteuil commence par sentir de fortes secousses dans le dos. Sans qu’il ne soit informé de rien, les dissidents, toujours motivés, appellent les caméras et condamnent avec engagement et ferveur les actions du maire en place. Tout va très vite, surtout quand l’autorité départementale qui assure la tutelle est en accord avec eux. Le scénario risque-t-il de se reproduire ? Ce qui est facile à établir est qu’à Parakou, Djidja, Zakpota et Savalou, le ballet des destitutions a commencé. Parakou et Allada semblent déjà en poche, les autres Communes s’affairent également. Ce qui surprend est qu’on ne sait presque jamais les raisons de ces remises en cause survenues à un moment ou à un autre. La difficulté permanente, c’est l’absence de lisibilité dans ces destitutions. Le conseil communal chasse le maire contesté, mais rien ne change fondamentalement du point de vue de la gouvernance. Mieux, ces destitutions dans la majeure partie des cas ne contribuent pas au développement de ces Communes. L’aspiration des populations au mieux-être et au rayonnement de leur Commune a toujours été un vœu pieux.
Les contours toujours flous de ces destitutions
La décision de destitution est purement politique. La loi n’a pas été suffisamment explicite sur les motifs ainsi que sur les conditions de destitution. La loi parle vaguement de « désaccord ou de crise de confiance », comme motifs de destitution. Le Conseil est libre à un moment ou à un autre de retirer sa confiance au maire s’il estime qu’il ne lui convient plus. Dans la pratique généralement, les raisons avancées sont souvent liées à la gestion de l’élu communal. On l’accuse de mauvaise gestion, mais de plus en plus aussi, de bradage de réserves administratives. Sur ce plan, la loi ne motive pas. Mais pour contourner ce laisser-aller, et faire penser qu’on n’a pas laissé libre champ au conseil communal, l’Exécutif a pour organiser la destitution avec la formule de la conciliation. Ceci est conduit par l’autorité de tutelle qui offre la chance aux parties de revoir leurs positions. Ces formes de conciliation peuvent déboucher sur le maintien du maire ou la confirmation de sa destitution à travers un vote de défiance. Est-ce que tout ceci ne perturbe pas vraiment le développement des communes ?