La prolifération des boissons nigérianes en l’occurrence la bière ‘’Goldberg’’ dans les buvettes et restaurants au Bénin, malgré les mesures coercitives de la douane béninoise contre l’importation sur le territoire national, est une nouvelle preuve que le Bénin est un grand pays de la contrebande non maîtrisée par l’Etat central. Cette situation démontre à suffisance que la douane nationale a montré ses limites au regard de l’ampleur de la prédominance des boissons nigérianes dans le pays.
Depuis quelques mois, les buvettes et restaurants à Cotonou, Porto-Novo et dans l’ensemble du pays sont envahis par les boissons en provenance du Nigéria. Actuellement, partout, c’est la bière ‘’Goldberg’’ qui est devenue la coqueluche du public béninois au détriment des produits de la Société béninoise de brasserie (Sobebra). Même, lors des cérémonies de funérailles, de mariage, de baptême et autres occasions de réjouissance, le consommateur préfère les boissons venues du Nigéria parce qu’elles coûtent moins chères en raison de la dépréciation du coût de la monnaie nigériane (Naïra). Pour lutter contre ce trafic illicite, la douane a déployé ses éléments au niveau des frontières. Elle réussit à arraisonner parfois quelques quantités de la bière en question.
La Direction générale des douanes et droits indirects, il y a quelques jours, a même donné une conférence de presse à son siège à Cotonou pour insister sur la nécessité de combattre le phénomène des boissons nigérianes sur le territoire national. Des instructions fermes ont été données à tous les douaniers de traquer comme des délinquants, les importateurs de ces produits au Bénin. Et pourtant ! Les efforts des disciples de Saint-Mathieu ne sont pas visibles sur le terrain. Les buvettes et restaurants sont toujours inondés par ces boissons avec des prix plus bas que ceux pratiqués par la Sobebra.
La conclusion à tirer est que l’Etat, à travers la douane, est en train d’échouer lamentablement une fois encore dans la lutte contre la contrebande. Qu’est-ce qui peut expliquer cet état de choses ? Le manque de sécurité adéquate aux frontières béninoises est la première raison de cette situation. En effet, les contrebandiers trouvent toujours des moyens pour contourner les dispositifs de la douane. Des jeunes se reconvertissent dans le transport de cette bière. Ils ont abandonné la filière des véhicules d’occasion en crise pour importer comme l’essence frelatée dite ‘’Kpayo’’ ladite boisson. « Sur les parcs, les Libanais ne nous paient plus. Ils nous doivent des arriérés de salaires, parce que la filière ne marche plus. Heureusement, grâce au trafic de la bière ‘’Goldberg’’, j’essaie de nourrir ma petite famille… », a avoué Jean vivant à Djeffa dans la Commune de Sèmè-Podji. « Je me lève très tôt le matin pour éviter les tracasseries routières. Parfois, on donne de l’argent aux douaniers pour passer la frontière. La fois dernière, j’ai donné 50000f aux douaniers pour qu’ils me laissent désormais… », a-t-il fait savoir. Un gérant de buvette confie ceci : « En vendant les boissons venues du Nigéria, je fais plus de bénéfices… ». Aujourd’hui, le Bénin a clairement montré ses limites à maîtriser ses frontières. Il est pratiquement devenu un pays où l’on veut ce qu’on veut, où l’on veut et quand on veut. Qu’on ne soit pas étonné de voir des armes et autres produits avariés traversés facilement les frontières pour être déversés sur le territoire national. La situation actuelle pose une fois en plus les problèmes de porosité des frontières béninoises. A l’allure où vont les choses, le Bénin risque d’être un vaste marché d’écoulement des produits nigérians au détriment de ceux fabriqués au Bénin.
Jérôme Atindéhou