Alors que la loi lui fait obligation de déclarer son patrimoine lors de son entrée en fonction, le Chef de l’Etat ne s’est pas encore exécuté.Il résiste et pourrait confirmer les craintes de ses critiques.
La Chambre des comptes de la Cour suprême n’a toujours pas reçu la déclaration du patrimoine du président Patrice Talon. Près de six mois après son accession au pouvoir, le Chef de l’Etat ne s’est pas encore plié à cette obligation imposée par l’article 52 de la Constitution du 11 décembre 1990. Une obligation reprise par l’article 3 de la loi n° 2011-20 du 12 octobre 2011 portant lutte contre la corruption et autres infractions connexes en République du Bénin. Le sixième rapport de l’Autorité nationale de Lutte contre la Corruption (Anlc) est très édifiant. Or,la déclaration des biens reste une preuve de transparence dans la gestion des affaires publiques. Elle permet en principe de chasser tout doute sur les risques de confusion entre le patrimoine du Chef de l’Etat et les biens publics. Patrice Talon doit se soumettre à cet exercice pour éviter les polémiques inutiles. Homme d’affaires prospère, il avait été brocardé lors de la campagne électorale de 2016. Beaucoup avaient juré qu’une fois élu, le roi du coton considèrerait le Bénin comme son entreprise. En se refusant à publier la liste de ses biens, Patrice Talon donne de l’eau au moulin des indiscrets. Mieux, sans en avoir la preuve, des opposants pourraient soutenir à raison que le Chef de l’Etat gère toujours ses entreprises et s’adonne donc à une activité professionnelle en violation de l’article 51 de la Constitution. Patrice Talon méconnait la Constitution. Il a été un bon donneur de leçons lors de la présidentielle de 2016. Mais il ne donne pas encore l’exemple prôné et revendiqué. Le Chef de l’Etat n’est pas le seul à violer la loi. Selon le rapport publié par l’Anlc sur son site web (sus cité), sur les vingt-et-un (21) ministres du gouvernement, quatre (04) ont déclaré leur patrimoine à l’entrée en fonction. A l’Assemblée nationale, six (06) des quatre-vingt-trois (83) députés de la 7ème législature ont satisfait à l’obligation légale de déclaration de patrimoine à l’entrée en fonction à la date du 17 mai 2016. La situation est donc préoccupante.
Renforcer la loi…
L’article 4 de la loi n° 2011-20 du 12 octobre 2011 portant lutte contre la corruption et autres infractions connexes en République du Bénin réprime la dissimulation ou de fausses déclarations. Le refus de déclaration est puni selon la même disposition d’une amende dont le montant est égal à six (06) mois de rémunération perçue ou à recevoir dans la fonction occupée. Pour certains observateurs, les sanctions ne sont pas efficaces. A les entendre, elles ne sont pas assez dissuasives pour obliger les hautes personnalités de l’Etat ainsi que les hauts fonctionnaires à s’acquitter de leurs devoirs. La loi présente beaucoup de failles et il y a lieu de la renforcer en adoptant des solutions plus corsées afind’amoindrir les risques de corruption, d’enrichissement illicite ou encore de conflits d’intérêt. Le Chef de l’Etat qui se fait passer pour un réformateur doit intégrer ce point important dansles vastes réformes promises. Cela devrait contribuer davantage à la sécurisation des caisses publiques.
Mike MAHOUNA