Les produits biologiques ont récemment défrayé la chronique lors de la célébration de la semaine verte organisée par la Ligue pour la défense du consommateur au Bénin. Lydwine Baloitcha, ingénieur-agroéconomiste, l’une des tenancières du stand du réseau Jinukun, qui s’investit dans la culture bio et Florence Sèhlin, cliente venue se ravitailler apprécient chacune les avantages liés à l’usage des produits biologiques. Dr Colette Azandjèmè a à la même occasion, souligné et déploré quant à elle les dangers liés à la consommation des produits conventionnels.
Du piment rouge, du vernonia (aman vivè), de l’oximum (tchayo), de la grande morelle(gboman), de l’échalote(oignon vert), de la laitue, de la carotte, du chou, du maïs, de la papaye, de l’oignon, du concombre et de la tomate. Tels sont entre autres les produits que Lydwine Baloitcha pouvait offrir aux visiteurs du stand qui a ouvert du jeudi 6 au samedi 8 octobre sur l’esplanade du stade général Mathieu Kérékou.
«Nous faisons la production naturelle, nous utilisons des fientes de volailles et pour lutter contre les petits ravageurs qui détruisent souvent les plantes, on utilise l’huile de neem pour les traiter. Autour de nos différentes planches, il y a la citronnelle appelée “tiiman“ assez efficace contre les ravageurs. Il y aussi le compostage naturel fait à base de cendre et de débris végétaux », déclare Lidwine Baloitcha pour assurer les visiteurs que les produits exposés sont vraiment des produits bio.
Et pour les distinguer des autres produits, elle invite les observateurs à prendre l’exemple de la carotte conventionnelle tellement rouge qui se différencie de celle bio produite naturellement sans pesticide, qui n’est pas si rouge et avec un goût sucré. De même, spécifie-t-elle, les légumes conventionnels sont tellement gros que tout le monde les apprécie. Mais par contre les légumes bio sont vraiment différents des légumes conventionnels.
« Les produits-bio garantissent totalement la santé, luttent aussi contre les malformations, le cancer et beaucoup d’autres maux. Ils assurent l’intelligence intellectuelle surtout pour les enfants. Une femme enceinte qui consomme du bio assure sa santé et celle de son enfant », rassure Lidwine Baloitcha.
En termes de satisfaction éprouvée en tant que promotrice des produits-bio, Lidwine Baloitcha révèle que cela permet de garantir la santé de la population et d’avoir un développement durable. C'est dire, selon elle, que quand on consomme bio, on sait qu’on lutte pour un environnement durable, parce que le bio protège l’environnement, l’écosystème et on est vraiment fiers de ça. «On sait qu’on fait beaucoup pour la santé de la population béninoise. Il faut de la volonté et tout ira bien. On rencontre des difficultés dans tous les domaines mais avec le temps tout rentre dans l’ordre», concède Lidwine Baloitcha.
Les produits bio aux mêmes prix
Concernant les coûts, Lidwine Baloitcha relève que les produits bio sont pratiquement servis aux mêmes prix que les produits conventionnels. « Il n’y a pas une grande différence. Les gens se disent, quand on parle de bio que c’est cher mais c’est faux, les produits-bio ne sont pas chers», fait remarquer l’ingénieur agroéconomiste. Un avis que ne partage pas forcément Florence Sèhlin pour qui de plus en plus les cultivateurs utilisent beaucoup de pesticides sans contrôle et sans norme. Les cultivateurs en font usage sans savoir la quantité à doser, donc parfois ils en abusent et cela rentre dans les productions dont les stocks se retrouvent sur le marché.« Nous les consommons et cela cause des problèmes de malformation, de fertilité aussi bien chez les hommes que les femmes. Pour remédier à tout ça, il faut des normes pour l’utilisation des pesticides, mais il faut aussi privilégier les produits-bio, conseille-t-elle.
Avec ces pesticides, poursuit Florence Sèhlin, les produits d’origine sont entrain de disparaitre; donc c’est avec les produits bio», que nos produits d’origine vont revenir et nous pourrons ainsi les consommer sans incidence majeure, estime-t-elle.
«Les produits-bio coûtent chers parce que les pesticides ont conduit les gens à les produire en quantité industrielle, ce qui entraîne donc la chute des prix. Mais ceux qui n’utilisent pas les pesticides ressentent des difficultés à produire en grande quantité; mais ils produisent en qualité», relève Florence Sèhlin. Elle conçoit que les consommateurs devraient rechercher non pas la quantité mais la qualité. «Si tu consommes 1kg de produit renfermant des pesticides, ça te rend malade, mais tu peux consommer 500g de produit bio sans aucun problème. Il vaut mieux privilégier ces produits-bio même si c’est cher et encourager ceux qui sont en train de le produire à maximiser leur production» conçoit-elle. De cette manière, les prix seront de plus en plus abordables pour les consommateurs.
A titre d'exemple
«Je ne peux pas dire que je mange toujours bio. J‘aime manger et je privilégie les produits bio. J’étais venue à la banque, mais dès que j’ai vu les produits, cela m’a attirée et effectivement je ne m’étais pas trompée. Je vais faire un partenariat avec l’entreprise pour qu’elle puisse me livrer les produits et là je vais consommer tout le temps des produits-bio pour ma santé », s’est réjouie Florence Sèhlin.
A titre d’appel à lancer aux concitoyens, cette dernière recommande la consommation des produits bio parce que les produits conventionnels qui prennent de l’ampleur ne font pas du bien à la santé. Au temps de nos grands parents, rappelle Florence Sèhlin, le cancer n’était pas si populaire, les maladies congénitales non plus. «Aujourd’hui, il y en a tellement et c’est la disparition de nos produits d’origine qui en sont à la base. Je demande à ceux qui hésitent encore de commencer par consommer les produits-bio, et à ceux qui les apprécient déjà de continuer à en consommer pour encourager les promoteurs parce que c’est du beau travail qu’ils font », exhorte-t-elle. Comme les producteurs n’utilisent pas les pesticides, explique Florence Sèhlin, cela leur demande beaucoup d’efforts, donc il faut les encourager à continuer par produire et cet engagement va décourager ceux qui utilisent les pesticides qui ont des effets néfastes sur la santé.
Beaucoup de décès attribués aux produits conventionnels
Si les produits bio ont des avantages, ceux conventionnels présentent des conséquences que déplore Colette Azandjèmè. «Beaucoup de personnes décèdent et on ne comprend pas la cause de leurs décès. Certains décès sont dus à des maladies chroniques. Parfois ces décès sont dus à des accidents vasculo-cardiaques ou encore le diabète», a-t-elle souligné dans la communication présentée sur le thème "Les fruits et légumes biologiques : un nouvel enjeu pour la protection du consommateur", lors de la célébration de la semaine verte. Dr Colette Azandjèmè a fait part des bienfaits liés à la consommation des produits biologiques. Elle a également mis en exergue les conséquences qu’engendrent les produits conventionnels sur notre santé.
En 2008, révèle-t-elle, sur environ 3000 décès on a noté que la plupart étaient dus à des maladies diarrhéiques et pulmonaires.
« Il y a une étroite relation entre le fait d’être exposé aux pesticides et ces maladies. On s’expose aux pesticides de diverses manières : en consommant les légumes, les fruits, l’eau que nous buvons, le sol que nous touchons, l’air que nous respirons. Ce n’est pas seulement les pesticides qui nous contaminent », explique Dr Colette Azandjèmè. Pour elle, tout ce qu’il y a comme produit chimique nous rend malade sans compter les additifs qu’on ajoute aux repas qui en rajoutent également. Tous ces produits agissent, insiste-t-elle, sur le système endocrinien de l’homme.
Pourquoi accuse-t-on les pesticides de tous ces problèmes ? interroge-t-elle. Une étude effectuée au nord du Bénin a révélé, expose Dr Colette Azandjèmè que les gens qui étaient exposés aux pesticides organo-chlorés couraient quatre à cinq fois le risque d’être obèses et avaient deux à trois fois plus de chance d’être diabétiques.
Le lapin n’est pas supposé manger de la provende, explique-t-elle, mais il devrait être soumis à une alimentation à base d’herbe, car la provende contient des pesticides. Les concentrations des produits chimiques notamment des pesticides organo-chlorés qui sont persistants dans le sol pendant des années induisent du fait de l’alimentation, des concentrations nettement au-delà des normes recommandées dans le sang, le lait maternel, les légumes, les fruits, le sol, et dans l’eau notamment le fleuve Ouémé.
« Plus on mange des produits dans lesquels il y a de pesticides, plus on a envie de manger des choses qui sont vraiment gras. Ainsi l'enfant né d’une mère exposée a une dose importante de pesticides dans son corps; le lait maternel de la mère peut aussi lui apporter encore des pesticides. Les pesticides vont aller jusqu'à modifier le phénotype de l’enfant, et même ses génotypes» a encore déploré Dr Colette Azandjèmè. Nos sols sont dans la majorité contaminés, admet-elle, à cause de l’utilisation anarchique des pesticides; nous ne pouvons plus les utiliser pour faire de l’agriculture bio. Nous ignorons parfois si l’eau qu’on utilise pour arroser est contaminée ou pas, déplore-t-elle.
« Avoir des produits cent pour cent bio n’est pas possible, mais en avoir un maximum est possible, parce que l’environnement dans lequel nous vivons est pollué par les pesticides. Selon Dr Colette Azandjèmè, à comparer ce qu’on gagne dans les produits bio par rapport à sa santé, ils ne sont pas chers, car lorsqu’on prend le prix des produits pour le traitement des productions conventionnelles, et ceux qu’on utilise pour les produits bio, on constate que les produits bio sont avantageux, relève-t-elle. «L’intrant bio n’existe pratiquement pas. Les effets des pesticides sont vraiment néfastes», a-t-elle retenu.
Didier Pascal DOGUE