Qui mieux que le président de l’Assemblée nationale peut présenter la nouvelle configuration de l’institution depuis l’avènement du régime de la rupture ? Adrien Houngbédji ne va pas se dérober à se devoir de vérité à la Nation. Du haut de son perchoir, le n°1 de la 7e législature, peut balayer de son regard d’homme avisé, les agissements des représentants du peuple et affirmer avec forte conviction que face à la nouvelle donne politique : « beaucoup de députés cherchent encore leurs marques… », après six de gouvernance Talon. C’est presque inédit dans un régime qui se veut démocratique. C’est aussi la preuve que celui des Béninois à ses spécificités que l’on ne saurait comparer aux modèles occidentaux. Sinon, comment comprendre que des représentants du peuple continuent de se ‘’chercher’’ à l’hémicycle au terme d’une bataille électorale qui a fait des vainqueurs et des vaincus ? D’ailleurs, la plupart des partis représentatifs sur l’échiquier politique national ont pris part à ce scrutin présidentiel qui a conduit à la victoire de l’homme du nouveau départ. Il va de soi, qu’une opposition se dégage et que les vaincus s’investissent à reconquérir le pouvoir. Ce qui devrait être le cas dans une démocratie classique. Mais en cette matière aussi, on dira comme feu Mathieu Kérékou, que le Bénin étonne le monde. Le chef de l’Etat ne peut pas se prévaloir d’une majorité politique confortable à au parlement, malgré la grande coalition de la rupture qui l’a porté au pouvoir, et sa plus grosse terreur, les masques de l’opposition. Quid des partis ou alliances de partis politiques assume ce statut à l’hémicycle. En dépit de la défaite à une joute électorale, ces formations peuvent toujours changer de veste et rejoindre le camp des vainqueurs. C’est la démocratie à la béninois. Ces ouvriers, baptisés de la 25e heure, sont parfois plus choyés par le conquérant. Pas besoin d’un gouvernement d’union nationale, juste que chaque camp, tire son épingle du jeu. Les électeurs ne comprendront jamais assez ce deal politique qui veuille que le vainqueurs s’accoquine avec le vaincu pour une cogestion du pouvoir, sur le fallacieux argument de ‘’l’intérêt’’ du peuple. Circonstance aggravante sous l’ère Talon, c’est bien l’ancien sponsor politique qui est aux affaires. Qui voudrait se révolté contre cet homme, qui dans un passé récent, alimentait financièrement plusieurs formations politique ? C’est tout de même dommage pour le processus démocratique en cours depuis l’historique conférence nationale du 1990. Les partis ont déserté le terrain de l’animation de la vie politique, et les positions ne sont pas souvent tranchées. L’on préfère jouer les centristes, fuir au maxime le champ de l’opposition. Et demain ne sera pas la fin. La confusion qui règne à l’Assemblée nationale est symptomatique de l’image d’une démocratie béninoise à double vitesse, caractérisée par une absence d’idéologie au niveau de la classe politique, et cela inhibe la fonction constitutionnelle de contrôle de l’action gouvernementale dévolue à l’institution.
Pour régler cette situation de façon significative, il faut intégrer aux réformes politiques et institutionnelles, initiées par le régime en place, de nouvelles dispositions pour corser le fonctionnement des formations politiques. Les rendre plus responsables vis-à-vis de leurs électeurs, et surtout de la Nation en générale. Il est impératif de trouver des mécanismes pour faire avancer le système démocratique béninois, vieux de 26 ans de pratique. Le vote de la loi sur le financement des partis politiques, le renforcement des dispositions sur le statut de l’opposition, ne serait qu’un début. Mais en attendant que les députés ne retrouvent leur marque, Houngbédji plaide pour la formule du consensus. Vraiment drôle. Une Assemblée de consensus pour contrôler l’action gouvernementale. Cela sous-entend, toute sorte de compromis et de compromission. Vivement les réformer pour que le parlement retrouve ces lettres de noblesse. Cela va de l’enracinement de la démocratie.
Arnaud DOUMANHOUN