Sept mois passés à la tête du pays, et l’homme du Nouveau départ éprouve le besoin de s’expliquer sur les actions menées par le gouvernement depuis le 6 avril 2016. Talon présente un bref bilan de sa gouvernance aux populations de Djougou et Parakou : « Les sept mois qui viennent de s’écouler ont été, pour moi, éprouvants. Il a fallu consacrer mes jours, mes nuits à repenser plus que je ne l’imaginais, à réorganiser le pays dans tous les sens, dans tous les secteurs pour faire face au quotidien et engager la réflexion pour la suite », a déclaré le chef de l’Etat. C’est dire que l’homme d’affaires est véritablement à l’épreuve de la gouvernance politique. Talon sait que les attentes sont encore loin d’être comblées et demande à demi-mot la clémence de ses compatriotes du septentrion. A en croire le président, la rupture vient de finir le travail de déblayage et peut désormais s’attaquer aux maux qui minent le pays pour le bien-être de ses concitoyens. « Nous avons maintenant établi, avec pertinence, ce qu’il faut faire dans chaque domaine. Nous avons déjà les accords de principe de tous nos partenaires techniques et financiers. Dans quelques mois, nous allons mettre le pays entier en chantier ». Voilà de quoi attiser à nouveau les flammes de l’espérance sur l’épineux chemin du développement. De toute évidence, Talon cherche encore ses marques à la tête du pays.
Entre les promesses électorales et la réalité du pouvoir, il y a un fossé.
Espérer malgré tout
S’il était aisé de vanter les mérites de l’homme du Nouveau départ pour ses performances dans le secteur cotonnier, il sera moins facile de soutenir le bilan de sa gouvernance politique au sommet de l’Etat. C’est à juste titre que le chef de l’Etat n’a pas commis la maladresse de s’aventurer sur le chemin des réalisations au cours des sept derniers mois. Cela aurait été sans doute en contradiction avec le quotidien des Béninois de façon générale et de ceux du Bénin dit ‘’profond’’ en particulier. Que pouvait dire Talon face à la morosité économique, à l’insécurité grandissante, aux grèves perlées dans le secteur de la santé, aux menaces de débrayages dans le secteur de l’éducation, aux polémiques autour des questions de licenciement et autres ? L’homme prudent voit le mal de loin. Talon ne fera pas ce bilan. Le chef de l’Etat a juste annoncé qu’il vient de semer pour l’avenir et reste convaincu que les fruits tiendront la promesse des fleurs. L’homme de la rupture réclame un prolongement de l’état de grâce : « J’ai besoin de votre mobilisation. J’ai besoin que mes compatriotes soient déterminés pour serrer encore la ceinture afin qu’on parvienne rapidement à résoudre les problèmes qui se posent à notre pays. Nous allons construire le pays et vous allez commencer à voir les effets très bientôt ». Pour Patrice Talon : « Quand on a faim, on est impatient. Quand on manque de tout, chaque minute qui passe paraît une éternité… Mais on a beau avoir faim, il n’est pas convenable de manger un plat mal préparé. Il faut avoir la patience d’attendre qu’il y ait des ingrédients ». Mais pour l’homme qui a rêvé d’être porté en triomphe au terme d’un mandat qu’il souhaite unique, et pour lequel il s’est préparé, il en faudrait bien plus pour convaincre les Béninois. Cinq années passent si vite. Que la vigilance du peuple ne saurait être confondue à de l’impatience. L’Etat est une continuité et gouverner, c’est prévoir. Talon doit donner la preuve de ses ambitions.
Arnaud DOUMANHOUN