Les occupants des domaines publics sont sommés de déguerpir au plus tard le 31 décembre prochain. Si l’objectif du gouvernement est de faciliter désormais la mobilité humaine en libérant les trottoirs pour les piétons afin de réduire les accidents de circulation, il faut reconnaitre que la pilule a du mal à passer dans l’opinion, tant les résistances et les oppositions sont nombreuses.Quand bien même, les concernés comprennent le bien-fondé de l’opération, leur opposition se justifierait par le fait que le contexte ne s’y prête pas.
L’opération d’aménagement urbain et de libération de l’espace public est saluée de tous même des usagers concernés par le déguerpissement. Inutile cependant de rappeler que le contexte actuel de morosité économique ne favorise point la réussite de ladite opération. Encore qu’il n’y a pas longtemps, des commerçants avaient subi de lourdes pertes dans l’incendie qui a récemment dévasté une partie du marché international de Dantokpa. Ils en trainent toujours les séquelles avec un acharnement des structures de microfinance. Plusieurs sinistrés ont dû donc recourir aux espaces publics pour se relancer en attendant la régularisation de la situation au niveau du marché Dantokpa. Ce qui parait plus inquiétant dans cette affaire est la déception et le regret que pourraient ressentir les populations à l’endroit du gouvernement de la Rupture. Les “Rupturiens“ ont-ils oublié qu’ils ont été portés à la tête du pays parce que les populations avaient faim ? Ont-ils oublié qu’ils ont été élus parce que les populations ont cru en leur capacité à infléchir la tendance haussière de la pauvreté ? Ont-ils déjà pu garantir le minimum parlant de mieux-vivre aux populations avant de déclencher une telle opération ? Une opération qui, sans nul doute, va contraindre plusieurs personnes à végéter dans l’oisiveté pendant un moment car ne pouvant tout de suite s’offrir une place dans les marchés publics. Ont-ils déjà construit de nouveaux hangars dans les marchés publics pour les accueillir tous?Ont-ils sensibilisé suffisamment les occupants desdits espaces ? Le délai accordé aux occupants est moins raisonnable. Autant de préalables cruciaux bafoués par le gouvernement de la Rupture dans la mise en œuvre de cette réforme. Le gouvernement entend ainsi restaurer le principe du respect de la loi, celle qui interdit l’occupation anarchique des espaces publics. Mais à quel prix ? Il importe de laisser assez de temps aux occupants illégaux de se retirer surtout à cause de la morosité qui frappe actuellement le pays et des préalables qui n’ont pas encore été pris en compte. Il faut les dégager mais avec diplomatie. Chose curieuse, les autorités ne veulent pas l’entendre de cette oreille, surtout pas le préfet du Littoral, Modeste Toboula qui avertit qu’à partir du 2 janvier 2017, ceux qui n’auraient pas libéré volontairement les domaines publics seront contraints à le faire. Que gagne le Préfet en recourant chaque fois à la force dans ses réformes ? En tout cas, il est souhaitable que la Rupture repense sa manière de faire dans cette opération afin que la réforme passe sans heurt.
Aziz BADAROU